Droits humains en Égypte : le Parlement européen appelle à des mesures fortes de l’UE en réponse à la crise

fdecomite via Wikicommons

25 novembre 2022. Douze organisations de la société civile (OSC) régionale, internationale et égyptienne saluent le débat en plénière du Parlement européen avec le commissaire Janez Lenarčič sur la situation des droits humains en Égypte et la politique de l’Union européenne à l’égard du pays. Après l’échange du 23 novembre 2022, le Parlement européen a adopté une résolution en plénière sur la situation des droits humains en Égypte avec une majorité de 326 voix pour.

Le Parlement européen (PE) a mis en lumière, à plusieurs reprises, des questions et cas urgents relatifs aux droits en Égypte, et a adressé des recommandations aux autres institutions de l’Union européenne (UE), aux États membres de l’UE et aux autorités égyptiennes. Cette fois-ci, le débat en plénière et la résolution surviennent après la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (Cop 27), accueillie par l’Égypte à Charm el-Cheikh. Celle-ci avait fait l’objet de critiques publiques en lien avec bilan de l’Égypte en matière de droits et sur la fermeture de l’espace civique par les autorités, en réponse à la campagne menée par les militant·es égyptien·nes, les défenseur·es des droits et la société civile internationale à cette occasion.

La résolution adoptée par vote en plénière met en évidence l’absence d’amélioration de la situation des droits humains en Égypte et souligne que « l’Égypte n’a modifié aucun texte législatif pertinent avant d’accueillir la Cop 27, y compris en ce qui concerne le droit à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association et la liberté des médias, bien que l’octroi d’un espace à la société civile soit un engagement commun inscrit dans les priorités du partenariat UE-Égypte et inscrit dans la Constitution égyptienne ». Le texte appelle à la libération immédiate et inconditionnelle du défenseur des droits humains et militant pacifique britannico-égyptien Alaa Abdel-Fattah. À ses côtés doivent être libéré⋅es des dizaines d’autres défenseur⋅es des droits, avocats, journalistes, militant⋅es pacifiques, hommes et femmes politiques et influenceur⋅es sur les réseaux sociaux. En outre le texte demande à l’Égypte d’« abandonner le recours massif à la détention provisoire abusive.  »

Dans la résolution, le Parlement européen « demande instamment aux États membres de l’Union de plaider en faveur de la mise en place, au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, d’un mécanisme de suivi et de signalement des violations graves des droits de l’homme en Égypte  » ; « réitère son appel en faveur d’un réexamen approfondi et complet des relations de l’Union avec l’Égypte, compte tenu des progrès très limités réalisés par ce pays en matière de droits de l’homme et de la répression de la dissidence, malgré le soutien continu des partenaires européens  » ; et « demande instamment à tous les États membres de l’Union de respecter pleinement les conclusions du Conseil de l’Union du 21 août 2013 annonçant la suspension des licences d’exportation pour tout équipement utilisé à des fins de répression interne, y compris les technologies de surveillance utilisées pour traquer les voix dissidentes. »

Lors du débat de la soirée du 23 novembre 2022, après une déclaration au ton plutôt optimiste du Commissaire Janez Lenarčič, les membres du Parlement européen (MPE), dont plusieurs de la délégation officielle du Parlement européen à la Cop 27, ont souligné leur vive inquiétude quant au sort de la société civile égyptienne et des prisonnier⋅es politiques, dont Alaa Abdel-Fattah, après la fin de la conférence, appelant leur libération. Les députés Bas Eickhout et Mick Wallace ont rappelé les centaines de personnes nouvellement arrêtées ces dernières semaines, ainsi que l’intimidation et le harcèlement de la société civile.

M. Eickhout a rappelé le harcèlement de la délégation officielle du Parlement européen lors de la Cop 27 pour avoir porté des badges en solidarité avec les prisonnier⋅es de conscience. Le député Jan-Christoph Oetjen a fait remarquer que les prisonnier⋅es qui ont été libéré⋅es n’auraient jamais dû être détenu⋅es arbitrairement. Plusieurs député⋅es ont critiqué la politique deux poids, deux mesures de l’UE qui dénonce les violations des droits en Russie ou en Chine, mais se montre plus indulgente à l’égard de l’Égypte. Le commissaire européen Lenarčič a répondu en assurant que les droits humains font « partie intégrante des relations entre l’UE et l’Égypte » et que l’UE « poursuivra et renforcera son engagement  » avec l’Égypte dans ce domaine ; il a ajouté que l’UE estime que la stabilité et la sécurité à long terme de l’Égypte «  ne peuvent être atteintes que si tous les aspects des droits humains sont pleinement mis en œuvre et respectés ».

Malgré les affirmations et les gestes suggérant que les autorités égyptiennes mettent en œuvre des réformes en matière de droits humains, la dure réalité reste que le gouvernement égyptien opère par la répression et la suppression de la dissidence pacifique.

Plus tôt en 2022, les organisations de défense des droits humains avaient proposé des mesures sérieuses pour améliorer la situation des droits, notamment un mécanisme concret pour la libération de tous les prisonnier⋅es politiques, mais le gouvernement égyptien n’a pas répondu à ces recommandations. Les détracteur⋅es pacifiques du gouvernement, notamment les défenseur⋅es des droits humains, les figures de l’opposition politique, les journalistes et les militant⋅es, sont toujours détenu⋅es à tort. La répression soutenue de la société civile indépendante se poursuit et il est nécessaire que l’UE fasse preuve d’une vigilance immédiate pour dissuader les autorités d’exercer des représailles contre les militant ;es égyptiens qui ont visiblement critiqué les politiques de l’État lors de la Cop.

Face à la crise persistante des droits humains en Égypte, il est urgent que la communauté internationale, et en particulier les dirigeant⋅es de l’UE et de ses États membres, prennent en compte l’avertissement du Parlement européen et fassent pression sur les autorités égyptiennes pour qu’elles cessent de réprimer le mouvement des droits humains et la société civile, et qu’elles respectent les droits de humains de tous les citoyen⋅nes et ressortissant⋅es étranger⋅es dans le pays.

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