Mexique : le défenseur indigène Fredy García Ramírez enfin libre !

Consorcio Oaxaca

Genève-Paris, 5 juillet 2022. La libération de Fredy García Ramírez, défenseur de la terre, du territoire et des droits des peuples autochtones, injustement emprisonné depuis près de trois ans, est un motif de réjouissance, a annoncé l’Observatoire (partenariat entre l’Organisation mondiale de lutte contre la torture - OMCT et la Fédération internationale pour les droits humains - FIDH). Cependant sa sécurité et son intégrité physique sont toujours un sujet d’inquiétude. L’Observatoire exige réparation complète pour la violation de ses droits.

Le 23 juin 2022, Fredy García Ramírez, indigène zapotèque et porte-parole du Comité de defensa de los pueblos indígenas (Codedi), a été acquitté en première instance par un juge de la Cour Supérieure de Justice de l’État de Oaxaca (TSJEO). Il a été remis en liberté un jour après ses 963 jours de détention arbitraire, causée par des allégations et accusations arbitraires, fabriquées de toutes pièces et sans fondement, le tribunal ne disposant d’aucun élément pour étayer l’accusation portée contre lui.

Le 6 novembre 2019, Fredy García Ramírez avait été arrêté violemment et arbitrairement avec un autre membre du Codedi, M. Celerino Gisael Martínez Castro. Les 12 hommes qui les ont arrêtés ne se sont pas identifiés, étaient lourdement armés, les ont agressés physiquement, ont pointé une arme vers eux et ne leur ont pas présenté de mandat d’arrêt à leur encontre. M. Martínez Castro a été libéré sans charge après huit heures de détention et d’isolement, tandis que la privation de liberté de M. García Ramírez était maintenue. Le 12 novembre 2019, il a comparu devant le Tribunal de contrôle de Valles Centrales, qui a ordonné la détention provisoire pendant le procès pour les délits présumés « d’agression », de « vol » et de « blessures ». Il a ensuite été transféré au Centre pénitentiaire pour hommes de Tanivet, à Tlacolula (Oaxaca), où il est resté en détention jusqu’au 24 juin 2022.

Pendant toute la période de détention arbitraire, Fredy García Ramírez a subi des mauvais traitements de la part des fonctionnaires pénitentiaires, ainsi que des menaces et des actes d’intimidation afin de le contraindre et l’empêcher de dénoncer les faits. En outre, en mai 2020, un grand nombre de personnes incarcérées à la prison de Tanivet, parmi lesquelles Fredy García Ramírez, ont présenté des symptômes associés au Covid-19. Cependant, la prison manquait de personnel médical et un médecin n’est intervenu que deux fois par semaine pour s’occuper des besoins sanitaires de tous les détenus.

Le droit de Fredy García Ramírez à une procédure régulière a été gravement enfreint pendant sa détention arbitraire. Les audiences ont été continuellement suspendues et reportées en raison de l’urgence sanitaire, contrevenant ainsi les appels internationaux à garantir une procédure régulière dans le contexte de la pandémie, en attribuant les ressources nécessaires pour mener à bien les audiences et les procès.

L’Observatoire se félicite de la libération du défenseur humains Fredy García Ramírez. Il rappelle cependant qu’il n’aurait jamais dû être détenu et il exige que l’État mexicain accorde au défenseur la réparation intégrale des dommages causés par la criminalisation, la détention arbitraire et les mauvais traitements qu’il a subis.

L’Observatoire rappelle que cette détention arbitraire s’inscrit dans le cadre d’une vigoureuse campagne de diffamation et de criminalisation à l’encontre du Codedi, ainsi que de criminalisation et d’attaques systématiques contre ses membres, qui se sont intensifies entre janvier 2018 et novembre 2019 avec cinq meurtres, deux tentatives de meurtre, six détentions arbitraires, trois violations de domicile et vols, ainsi que des menaces et harcèlements permanents, et la militarisation de la zone où se trouve le centre de formation du Codedi. Ces attaques restent impunies à ce jour, malgré les communications faites par les rapporteur·euses des Nations unies.

Par conséquent, l’Observatoire exprime sa préoccupation pour la sécurité et l’intégrité physique et psychologique de Fredy García Ramírez suite à sa libération, et exige que les autorités mexicaines prennent des mesures de protection pour lui et pour se famille, ainsi que pour tou·tes les membres du Codedi.

L’Observatoire réitère son inquiétude quant à la persistance au Mexique d’un modèle de criminalisation des défenseur·es des droits humains dans le but de faire taire leurs voix, en particulier celles et ceux qui défendent le droit à la terre et au territoire. La détention arbitraire et l’utilisation abusive des procédures pénales deviennent des instruments avec lesquels l’État entrave et punit celles et ceux qui, comme M. García, travaillent quotidiennement pour la défense, la protection et la promotion des droits humains.

L’Observatoire rappelle que ce schéma de criminalisation, en particulier dans l’État de Oaxaca, a été confirmé par le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire qui, au cours des dernières années, a émis huit avis dans lesquels il déclare la détention arbitraire de 32 défenseur·es des droits humains au Mexique et a exigé leur libération immédiate ; six de ces avis concernent des cas de Oaxaca.

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