Détenue depuis plus de deux ans, Victoire Ingabire était inculpée de six chefs d’accusation liés à des actes terroristes et à l’idéologie du génocide [1], sur la base de ses liens présumés avec les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), rebelles hutus. Connue pour ses critiques publiques à l’égard du gouvernement actuel, notamment lors de la période des élections présidentielles de 2010, Victoire Ingabire a été reconnue coupable de « conspiration, en vue de nuire au pays en semant la guerre et la terreur » et de « déni de génocide », alors que le parquet avait requis la réclusion criminelle à perpétuité.
Depuis le 16 avril 2012, Victoire Ingabire boycottait son procès, protestant contre des actes d’intimidation et des pratiques d’interrogatoires illégales qu’auraient subi certains de ses co-accusés [2], tous membres des FDLR, et contre une décision du tribunal d’écourter l’audition d’un témoin à décharge accusant les autorités rwandaises d’avoir fabriqué des preuves contre elle. « En faisant fit de ces accusations, la Haute Cour de Kigali n’a pas permis de garantir l’objectivité et la fiabilité des éléments de preuve apportés par le Procureur », a déploré Me Patrick Baudouin, président d’honneur et responsable du Groupe d’action judiciaire de la FIDH.
Par ailleurs, le contexte dans lequel s’est tenu ce procès, qui a duré plus de sept mois, était tendu. En effet, des membres du gouvernement ont eu des propos laissant croire à la culpabilité de Mme Ingabire, alors même que le procès était en cours.« Les déclarations intempestives de représentants politiques nuisent au bon fonctionnement de la justice et nous amènent à émettre des doutes quant à la non-ingérence politique dans les affaires judiciaires », a déclaré Souhayr Belhassen, présidente de la FIDH. « Les autorités rwandaises doivent respecter la séparation des pouvoirs et garantir l’indépendance de la justice », a-t-elle ajouté.
L’avocat de Victoire Ingabire a annoncé qu’il ferait appel de cette décision devant la Cour suprême du Rwanda.
La FIDH appelle les autorités rwandaises à se conformer à leurs obligations internationales en matière d’administration de la justice.