Ce projet de loi avait auparavant été discuté devant le Congrès National. La longueur des discussions, et le texte finalement approuvé, continuent de susciter de sérieuses préoccupations concernant l’application réelle de cette loi. Elle constitue néanmoins une réelle avancée, puisque autorisant enfin l’avortement dans trois circonstances exceptionnelles et précises : risque pour la vie de la femme ; non viabilité du fœtus ; viol.
"La levée de l’interdiction de l’avortement dans trois cas précis est bien évidemment préférable à l’interdiction complète qui date de la dictature de Pinochet. Mais cette mesure n’est pas suffisante pour protéger les droits humains des femmes ! Le Chili doit garantir l’accès de toutes les femmes et filles à l’avortement légal et sûr, ainsi qu’à leur droit de choisir."
Il est fondamental que le parlement adresse un signe fort et sans équivoque en faveur de la protection des droits des femmes, en refusant les modifications d’envergure apportées au projet de loi initial présenté par le gouvernement de Michelle Bachelet. Ainsi, l’extension de l’objection de conscience à tous les membres de l’équipe médicale devrait être retoquée, puisque ne devant concerner que le médecin. Les modifications apportées à l’initiative des forces conservatrices et religieuses, s’écartent de ce que devait être la priorité de cette nouvelle loi : garantir l’accès libre des femmes aux services de santé sexuelle et reproductive.
"Ce projet est loin d’être idéal, mais il est grand temps que le Chili ne fasse plus partie des sept pays d’Amérique Latine [1] interdisant totalement l’avortement. Le Congrès et la société chilienne doivent montrer la voie pour garantir aux femmes chiliennes le droit à la vie, à l’intégrité physique et mental, à la non-discrimination, à l’égalité substantielle, à l’intimité, ainsi que le droit à jouir du meilleur état de santé physique et mental possible."
Comme l’a souligné la FIDH lors de sa mission au Chili en janvier dernier, la pénalisation de l’avortement au Chili constitue une violation grave des droits reproductifs et sexuels des femmes. Elle fait courir de graves risques à la santé et à la vie des femmes et des filles qui décident d’avorter, notamment lorsque celles-ci ne disposent pas des ressources et de l’information pour accéder à un avortement légal et sûr. Par ailleurs, ces femmes peuvent être dénoncées par des médecins et du personnel de santé et s’exposer au risque de poursuites pénales. Ce qui qui touche particulièrement les femmes pauvres, jeunes, migrantes et indigènes.
La FIDH souhaite que l’approbation de ce projet de loi s’accompagne d’autres types de mesures, comme la ratification par le Chili du Protocole facultatif de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF/CEDAW). Ce traité est le principal instrument juridique relatif aux droits des femmes à l’échelle internationale. Sa ratification est à l’examen au Sénat depuis... 2001. L’application de ce Protocole permettrait aux particuliers de saisir directement le Comité chargé de surveiller la CEDEF/CEDAW en cas de violations graves ou systématiques par le Chili des obligations contenues dans le traité.