Description de la situation :
L’Observatoire a été informé de sources fiables de l’arrestation arbitraire puis de la libération provisoire de M. Ali Idrissa, coordinateur national du Réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire (ROTAB) et de Publiez ce que vous payez-Niger (PCQVP).
Selon les informations reçues, le 9 avril 2020, M. Ali Idrissa a été convoqué dans les bureaux de la police judiciaire à Niamey, suite à une plainte déposée contre lui par l’ancien chef d’état-major de l’Armée, qui l’a accusé de diffamation dans le cadre d’un présumé scandale de corruption impliquant le ministère de la Défense. M. Ali Idrissa a été placé en garde-à-vue jusqu’au 14 avril 2020. Ce délai dépasse la durée légale de garde-à-vue qui, au Niger, est de 48 heures renouvelables une fois, et va à l’encontre de la décision du ministère de la Justice du 20 mars 2020 [1] visant à limiter, en période de pandémie de Covid-19, le recours à la garde-à-vue et à la détention « aux situations d’extrême urgence » et « en ce qui concerne les infractions criminelles, de terrorisme et les délits de troubles à l’ordre public », ce qui ne concerne pas M. Ali Idrissa.
Le 14 avril 2020, M. Ali Idrissa a été présenté au Parquet de Niamey, inculpé pour « diffamation contre le général de l’armée et l’épouse de l’ancien chef d’état-major » ainsi que « diffusion d’informations visant à troubler l’ordre public » (sur la base de la Loi sur la cybercriminalité de 2019). En cas de condamnation, il encourt jusqu’à trois ans de prison. M. Ali Idrissa a été libéré provisoirement à la fin de l’audience.
L’arrestation de M. Ali Idrissa intervient dans la cadre de la révélation de supposés détournements de fonds destinés à équiper l’armée nigérienne pour la lutte contre le terrorisme. L’Observatoire rappelle que dans le même contexte, une manifestation pacifique a été violemment réprimée le 15 mars 2020 à Niamey, et de nombreuses personnes arrêtées, y compris des défenseurs des droits humains [2]. Parmi eux, MM. Moudi Moussa, Mounkaila Halidou, Moussa Tchangari, Habibou Soumaila, Sani Chekaraou et Maïkoul Zodi, restent à ce jour toujours arbitrairement détenus [3].
L’Observatoire condamne fermement l’arrestation arbitraire et le harcèlement judiciaire à l’encontre de M. Ali Idrissa, qui ne semble viser qu’à sanctionner le légitime exercice de ses activités de droits humains. L’Observatoire appelle les autorités nigériennes à mettre un terme à tout acte de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à son encontre et à la libérer l’ensemble des défenseurs des droits humains arbitrairement détenus dans le pays.
Actions requises :
L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités nigériennes en leur demandant de :
i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de l’ensemble des défenseurs des droits humains au Niger ;
ii. Procéder à la libération immédiate et inconditionnelle de MM. Moudi Moussa, Mounkaila Halidou, Moussa Tchangari, Habibou Soumaila, Sani Chekaraou et Maïkoul Zodi et de l’ensemble des défenseurs des droits humains arbitrairement détenus au Niger ;
iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de MM. Ali Idrissa, Moudi Moussa, Mounkaila Halidou, Moussa Tchangari, Habibou Soumaila, Sani Chekaraou et Maïkoul Zodi et de l’ensemble des défenseurs des droits humains et militants de la société civile au Niger ;
iv. Respecter en toutes circonstances les libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique de la société civile nigérienne ;
v. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement ses articles 1, et 12 ;
vi. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits humains ratifiés par le Niger.
Adresses :
· M. Issoufou Mahamadou, Président de la République du Niger, Tél. : +227 20 72 24 72, Fax : +227 20 73 77 03
· M. Brigi Rafini, Premier Ministre, brigi_rafini@yahoo.fr, Cabinet du Premier Ministre BP 893 Niamey, Niger ; Tél : + 227 20 72 26 99, Fax : + 227 20 73 58 59
· M. Marou Amadou, Ministre de la justice, marou_amadou2000@yahoo.fr, Tél : +227 08 00 11 11, Fax : +227 20 72 37 77
· M. Bazoum Mohamed, Ministre de l’intérieur, Tél. : +227 20 32 32 62, Fax : + 227 20 72 21 76
· Direction générale des affaires juridiques du Ministère de l’intérieur ; Fax : +227 20 20 36 89
· M. Kalla Ankouraou, Ministre des Affaires étrangères de la coopération, de l’intégration africaine et des Nigériens à l’extérieur, Email : ibrayac2@gmail.com
· S.E. M. Ousmane Alhassane Abba, Ambassadeur, Mission permanente du Niger auprès de l’Union européenne, 78 avenue Franklin Roosevelt, B-1050 Bruxelles, Fax : + 32 2 648 27 84
· S.E Mme Fatima Sidikou, Représente permanente du Niger, Mission permanente du Niger auprès des Nations unies à Genève, 23 Avenue de France, 1202 Genève, Suisse. Tél : +41 22 979 24 50 – Fax : +41 22 979 24 51
Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques du Niger dans vos pays respectifs.
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Paris-Genève, le 20 avril 2020
Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.
L’Observatoire partenariat de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. La FIDH et l’OMCT sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Union européenne pour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par la société civile internationale.
Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
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· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80
· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29
[1] Voir : http://www.justice.gouv.ne/images/2020/PDF/Circulaire_du_MJGS_200320_CORONAVIRUS.pdf
[2] Voir l’appel urgent de l’Observatoire NER 001 / 0320 / OBS 022, publié le 17 mars 2020.
[3] Voir la Déclaration conjointe du 24 mars 2020 : https://www.fidh.org/fr/themes/defenseurs-des-droits-humains/niger-des-organisations-de-la-societe-civile-demandent-aux-autorites