DES VICTIMES PORTENT PLAINTE CONTRE HISSENE HABRE, LE " PINOCHET " DE L’AFRIQUE ?

Le 25 janvier 2000 à 10h00, 7 victimes tchadiennes et l’Association des victimes des crimes et de la répression au Tchad (AVCRT) soutenues par la FIDH, HRW, l’ONDH, la RADDHO, la LTDH, l’ATPDH, Agir ensemble pour les droits de l’Homme et Interights, ont déposé une plainte avec constitution de partie civile près du Doyen des Juges d’instruction du Tribunal régional hors classe de Dakar, à l’encontre de Monsieur Hissène Habré, ancien président de la République du Tchad entre le 7 juin 1982 et le 1er décembre 1990, qui réside actuellement à Dakar.

En effet, il ressort des enquêtes menées sur cette période que plus de 40.000 personnes auraient été sommairement exécutées ou seraient mortes en détention et 200.000 autres soumises à la torture, et que de très nombreuses personnes sont toujours portées disparues. Il n’y a aucun doute sur le fait que Monsieur Hissène Habré porte une responsabilité personnelle et directe dans les exactions commises entre 1982 et 1990. Il a en effet créé, et supervisé constamment et personnellement, différents services de sécurité, et notamment la Direction de la Documentation et de la Sécurité (DDS).

La plus grande partie des violations graves des droits de l’Homme commises au Tchad sous le régime d’Hissène Habré l’ont été par des agents de la DDS, qui s’est rapidement érigée en une machine de répression d’une cruauté rarement atteinte dans l’histoire contemporaine.
Monsieur Hissène Habré réside actuellement à Dakar. Ainsi, les victimes de ces exactions ou leurs ayant-droits sont fondés à voir le Juge sénégalais se déclarer compétent, et poursuivre et juger

Monsieur Hissène Habré pour les crimes commis. Elles pourront également lui demander réparation pour les préjudices subis. En effet, les juridictions sénégalaises sont compétentes en application des mécanismes de compétence universelle, qu’il s’agisse du crime de torture en vertu de la Convention des Nations-Unies du 10 décembre 1984 (New York), ou qu’il s’agisse des crimes contre l’humanité en vertu du droit international coutumier, consacré par l’affaire Pinochet. On rappellera également que le crime de disparition a été consacré judiciairement comme un crime de torture permanent et ainsi comme un crime continu.

Il est demandé au Sénégal, en poursuivant et en jugeant Monsieur Hissène Habré, de satisfaire à ses obligations juridiques internationales et nationales. Après avoir été le premier pays à ratifier le statut de la Cour Pénale Internationale, le Sénégal, en cohérence avec cette décision, contribuera ainsi à mettre un terme au cercle vicieux de l’impunité qui affecte le continent Africain. Enfin, il est essentiel que le Sénégal continue de montrer l’exemple, alors même que les pays du Nord ont été et restent trop souvent défaillants dans l’application de ces principes.

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