Des enquêtes impartiales doivent être menées avant que l’Égypte ne sombre dans la spirale de la violence

11/07/2013
Communiqué
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La FIDH prend note de l’annonce faite par le Président égyptien par interim, Adli Mansour, de mettre en place une commission d’enquête judiciaire sur les événements qui se sont déroulés autour du bâtiment de la Garde républicaine le 8 juillet 2013. La FIDH soutient toutefois totalement la déclaration commune des ONG rendue publique le 9 juillet, appelant à des enquêtes impartiales sur ces événements, appelant instamment l’armée à se conformer aux standards internationaux et à s’abstenir de recourir à l’usage de la force pouvant entraîner la mort contre des manifestants et toutes les parties ainsi que les médias, à mettre fin immédiatement à toute forme d’incitation à la violence. La FIDH insiste sur le fait qu’une telle commission d’enquête doit être pleinement indépendante et dès lors inclure des experts des droits humains et judiciaires indépendants. Cela est d’autant plus important que l’interférence politique dans le travail du pouvoir judiciaire est reconnue pour avoir prévalu en Égypte pendant des décennies, et ce y compris depuis la chute de Hosni Moubarak.

Ci-dessous un communiqué de presse co-signé par plusieurs organisations égyptiennes de défense des droits humains

Les organisations signataires déplorent et condamnent fortement l’usage excessif de la force par l’armée et les forces de sécurité égyptiennes à l’encontre des partisans du président renversé, Mohamed Morsi, alors que ceux-ci étaient réunis devant le bâtiment de la Garde républicaine au Caire. Selon le ministère de la Santé, ces violences auraient causé la mort d’au moins 51 personnes et fait plus de 400 blessés.

Les organisations signataires insistent sur le fait que toute réponse aux manifestations doit se conformer aux normes internationales et ce y compris lorsque dans le cadre des manifestations, des manifestants font usage de violence ou utilisent des armes à feu. Les standards internationaux n’autorisent pas plus l’usage excessif de la force létale que les tirs délibérés à balles réelles de snipers appartenant aux forces de police ou militaires, sur une foule de manifestants. Le recours à la force doit strictement se limiter à ce qui est requis pour empêcher l’usage de la violence par des individus armés. Ces standards s’appliquent aux événements mentionnés ci-dessus, présentés par les Forces armées dans une déclaration comme une tentative d’attaque contre des bâtiments de la Garde républicaine.

Les organisations signataires rappellent que l’armée et les forces de sécurité ont la responsabilité de garantir la protection de l’ensemble des manifestants, qu’ils soient partisans ou opposants au président destitué.

Parallèlement, les organisations signataires condamnent vivement les appels des Frères musulmans et de leurs partisans à la violence et au meurtre ainsi qu’à prendre part à des affrontements répandus qui ne font qu’aggraver la crise politique en Égypte. Nous condamnons toutes les formes de violence perpétrées par certains groupuscules d’organisations islamistes, et notamment les actes de violence qui ont eu lieu dans les quartiers de Manial et de Maspero au Caire, ainsi que dans le quartier de Sidi Gaber à Alexandrie.

De la même manière, nous condamnons tous les actes de violence qui ont visé les Frères musulmans et leurs partisans, notamment à Sidi Bishr et à Zagazig ainsi que les incitations à la haine proférées à leur encontre par certains médias.

Les organisations signataires insistent sur la nécessité de faire la vérité sur les événements qui se sont produits lors des affrontements qui ont eu lieu hier à l’aube et appellent à établir les responsabilités de toutes les parties concernées. Pour être impartiale et indépendante, l’enquête sur ce massacre nécessite la participation d’organisations indépendantes des droits humains. Il faudra également veiller à rendre publics les résultats de cette enquête immédiatement après la conclusion de celle-ci. La participation de telles organisations est essentielle. En effet, la politisation du système judiciaire égyptien, que ce soit sous le régime de Moubarak et du Conseil suprême des forces armées ou, au cours de la dernière année, en lien avec les pratiques des Frères musulmans et du président déchu, a continué de saper la crédibilité du pouvoir judiciaire et des autorités en charge des enquêtes, de diviser les juges et de faire du pouvoir judiciaire une victime d’une polarisation politique et idéologique.

La commission d’enquête devrait impérativement être composée de personnalités judiciaires et des droits de l’Homme connues pour leur professionnalisme et leur impartialité, afin que cette commission bénéficie de la confiance de l’ensemble des parties et d’éviter la remise en cause de son rapport final. Les organisations appellent toutes les parties, y compris les Frères musulmans et leurs partisans à soutenir ces exigences.

Enfin, nos organisations réitèrent leur appel à la fin immédiate de toutes formes d’incitation à la violence et au meurtre et à ce que toutes les parties s’abstiennent de mettre en danger la paix civile. L’incitation continue à l’effusion de sang rendra impossible la relance d’une processus politique global permettant de réaliser les objectifs de la révolution en Égypte.

Organisations signataires :
1. Cairo Institute for Human Rights Studies
2. Andalus Institute for Tolerance & Anti-violence Studies 
3. Arab Penal Reform Organization
4. Arabic Network for Human Rights Information
5. Association for Freedom of Thought and Expression
6. Center for Appropriate Communication Techniques
7. Center for Egyptian Women’s Legal Aid
8. Egyptian Center for Economic and Social Rights
9. Egyptian Initiative for Personal Rights
10. Habi Center for Environmental Rights
11. Hisham Mubarak Law Center
12. Human Rights Association for the Assistance of Prisoners
13. Land Center for Human Rights
14. Masriyon Against Religious Discrimination
15. Nazra for Feminist Studies

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