Le 6 septembre 2023. Un décret signé le 4 septembre par le de facto président du Bélarus, Alexandre Loukachenko, interdit effectivement aux Bélarusses vivant à l’étranger de renouveler leur passeport et autres documents essentiels en dehors du Bélarus. Pour obtenir de nouveaux documents, les Bélarusses seront désormais contraint⋅es de retourner dans leur pays d’origine, au lieu de se rendre dans les ambassades du Bélarus à l’étranger, ce qui expose tous⋅tes les opposant⋅es au régime à un risque de persécution de la part de l’État.
Des milliers de défenseur⋅ses Bélarusses des droits humains, de membres du mouvement d’opposition démocratique et de critiques du régime de Loukachenko ont fui le Bélarus en raison des menaces, du harcèlement et du risque imminent de poursuites de la part des autorités. Une obligation à retourner au Bélarus pour obtenir des documents équivaut à un risque d’arrestation, de détention ou d’autres formes de répression presque certaine à leur retour. Dans le cas contraire, tous les opposant⋅es au régime dont le statut n’a pas été régularisé à l’étranger seront confrontés à des restrictions de voyage et à des charges administratives accrues à l’expiration de leur passeport. En plus d’accroître la vulnérabilité des membres de la société civile et des dissident⋅es, la nouvelle mesure fait craindre que toutes les personnes vivant à l’étranger soient considérées comme des apatrides par les autorités étrangères à l’expiration de leur passeport.
En outre, la nouvelle mesure viole les droits, notamment la liberté de circulation et les droits de propriété, de centaines de milliers de citoyens du Bélarus à l’étranger, en imposant des charges administratives et financières supplémentaires liées au retour au Bélarus pour renouveler leurs passeports. Pourtant, l’objectif sous-jacent de la nouvelle loi est de cibler les défenseurs⋅ses des droits humains et tous les militant⋅es de l’opposition qui risquent d’être persécutés par l’État une fois au Bélarus. Elle fait donc partie de l’une des nombreuses mesures répressives déployées par le régime de Loukachenko pour cibler l’opposition, comme le souligne le récent rapport de l’Observatoire (FIDH-OMCT).
Les acteurs de la société civile parmi les groupes les plus ciblés
Depuis le début des manifestations contre la fraude électorale au Bélarus en août 2020 et la répression du régime qui s’en est suivie, les membres de la société civile ont fait partie des groupes les plus lourdement ciblés dans le pays. Au 1er août 2023, au moins 93 défenseurs⋅ses des droits humains, y compris des employé⋅es d’organisations de défense des droits humains, des syndicalistes, des avocat⋅es et des journalistes, ont été injustement détenu⋅es au Bélarus sur la base d’accusations forgées de toutes pièces. Des défenseur⋅es comme Ales Bialiatski, lauréat du prix Nobel de la paix 2022 et président de Viasna, ainsi que son adjoint et vice-président de la FIDH Valiantsin Stefanovic, et d’autres militant⋅es de Viasna comme Uladzimir Labkovich, Marfa Rabkova, Andrei Chapuik et la défenseuse des droits humains Nasta Loika sont actuellement détenu⋅es. Toutes les organisations indépendantes de défense des droits humains, les médias et les syndicats ont été fermés de force et leurs activités injustement qualifiées d’extrémistes et d’infractions pénales. De la même façon le 23 août 2023, Viasna a été déclarée organisation extrémiste et ses activités ont été interdites au Bélarus.
Compte tenu des conséquences potentielles de la nouvelle loi, il est impératif que la communauté internationale et les organisations de défense des droits humains suivent de près la situation et apportent leur soutien aux membres de la société civile touché⋅es par ces restrictions. La FIDH et le HRC Viasna appellent les autorités bélarusses à abroger la loi, et les États membres de l’UE à fournir assistance et soutien aux défenseur⋅ses des droits humains, à l’opposition démocratique et à toutes les personnes affectées par cette mesure, notamment en leur fournissant des documents de voyage et de résidence temporaires et d’autres documents essentiels, ainsi que des garanties de non-refoulement.