Appel urgent de l’Observatoire : Harcèlement de M. Ales Bialiatski

19/06/2012
Communiqué
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Nouvelles informations, BLR 007 / 0811 / OBS 104.7

Bélarus, 19 juin 2012

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’homme – un programme conjoint de la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT) ‑ a été informé de mesures punitives et de corvées supplémentaires imposées à M. Ales Bialiatski, président du Centre de défense des droits de l’homme « Viasna » et vice-président de la FIDH. L’Observatoire demande votre intervention urgente.

Nouvelles informations :

Le 15 juin 2012, l’Observatoire a appris que M. Ales Bialiatski faisait l’objet de mesures punitives et de corvées supplémentaires imposées par l’administration pénitentiaire. Cette information a été communiquée par M. Bialiatski lui-même dans une lettre adressée au vice-président du Centre de défense des droits de l’homme "Viasna" Valiantsin Stefanovich. Dans cette lettre, M. Bialiatski affirme ceci :

« J’ai déjà reçu un blâme et une corvée supplémentaire. J’ai l’impression qu’il y en aura d’autres. Globalement, il semble que je suis loin d’être un prisonnier modèle… »

L’administration de la prison reprocherait à M. Bialiatski son refus de reconnaître sa culpabilité et de participer à des « groupes créatifs amateurs » et, tout récemment, d’avoir été condamné à une mesure punitive.

La durée des rencontres de M. Bialiatski avec sa femme a également été réduite de trois jours à un seul, et il n’est désormais autorisé à recevoir que la moitié des colis alimentaires habituels.

L’Observatoire redoute que ces mesures visant M. Bialiatski n’aient pour seul objectif que de le présenter comme un contrevenant au règlement, afin de le priver de la possibilité de bénéficier de la loi d’amnistie prévue pour le 3 juillet 2012 et d’autres mesures de libération anticipée.

L’Observatoire craint également que le droit de M. Bialiatski à recevoir et à envoyer des courriers demeure limité : à ce jour, les autorités de la prison ne lui ont toujours pas remis une partie significative de sa correspondance.

Contexte :

M. Ales Bialiatski a été arrêté le 4 août 2011 par les forces de police du Département d’enquêtes financières, sous le chef d’accusation d’évasion fiscale, conformément à l’Article 243, partie 2, du Code pénal de la République du Bélarus (« dissimulation de revenus à très grande échelle »), passible au maximum de sept ans d’emprisonnement. Le 24 novembre 2011, le Tribunal du district de Pervomaïskoé (ville de Minsk) a condamné Ales Bialiatski à quatre ans et demi d’emprisonnement dans des conditions de régime sévère, ainsi qu’à la confiscation de ses biens, y compris les locaux de Viasna, et à une amende. En janvier 2012, le montant de l’amende a été entièrement transféré sur le compte bancaire du Tribunal, après que les ONG locales ont recueilli les fonds nécessaires pour couvrir l’amende et les frais de justice, une somme qui s’élève au total à 757 526 717 roubles bélarusses (approximativement 70 000 euros). Le 24 janvier 2012, le Tribunal de la ville de Minsk a confirmé la sentence. Le 28 février 2012, M. Ales Bialiatski a été transféré à la colonie pénitentiaire N°2 de Babrouisk. La cour a décidé qu’il y passerait les quatre prochaines années (étant donné qu’il a déjà passé sept mois en prison). Le 29 mars 2012, le Tribunal du district de Pervomaïskoé (ville de Minsk) a pris une nouvelle décision à l’encontre de M. Ales Bialiatski, lui ordonnant de verser une majoration de 140 366 151 roubles (environ 12 700 euros), en addition des 757 526 717 roubles bélarusses (approximativement 70 000 euros) déjà versés en janvier 2012. Prétexte invoqué : l’amende à laquelle il avait été condamné dans le cadre du verdict prononcé le 24 novembre 2011 (et confirmé le 24 janvier 2012) n’avait pas été indexée sur l’inflation, et devait donc être relevée. L’arrêt rendu le 29 mars précise que l’indexation sur l’inflation correspond à la période qui a commencé en mai 2008, quand des fonds étrangers ont été déposés sur le compte en banque de M. Bialiatski, et s’est achevée en janvier 2012, quand son épouse, Mme Natalia Pintchouk, a transféré le montant de l’amende sur le compte en banque du Tribunal du district de Pervomaïskoé. L’arrêt du Tribunal a été rendu en l’absence de l’accusé, actuellement incarcéré. Il n’a pas été officiellement informé de cette audience, et n’était même pas au courant de sa tenue. Il convient de préciser, pour ce qui concerne la valeur de cette nouvelle procédure, que le Code des Impôts bélarusse ne prévoit aucun type d’indexation des amendes.

Le 30 avril 2012, des membres de Viasna ont fait appel auprès du Tribunal du district de Pervomaïskoé de la décision d’indexer le montant de l’amende sur le taux d’inflation. L’ONG a déposé une autre requête, auprès de la Cour de cassation, contre l’« amende surtaxée du gouvernement » qui, selon les avocats de M. Bialiatski, ne repose sur aucune base légale.

De plus, de nouvelles mesures restrictives illicites ont été imposées à M. Ales Bialiatski concernant ses conditions de détention. En particulier, le salaire de base qu’il touche en prison a été réduit à un cinquième de ce que touchent normalement les autres détenus pour acheter des biens aux boutiques de la prison.

Actions requises :

Nous vous prions d’écrire aux autorités bélarusses pour les presser de :

i. Libérer immédiatement et inconditionnellement M. Ales Bialiatski, puisque sa détention est arbitraire et semble avoir pour unique objet de le punir pour ses activités dans le domaine de la défense des droits de l’homme ;

ii. Mettre fin à toute forme de harcèlement – y compris aux niveaux judiciaire et administratif – contre M. Ales Bialiatski et annuler toutes les mesures punitives, les corvées supplémentaires et les décisions judiciaires prises précédemment à son endroit.

iii. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Ales Bialiatski ;

iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme, adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU le 9 décembre 1998, ainsi qu’aux standards internationaux et aux accords internationaux ratifiés par le Bélarus.

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