Résolution sur la situation des droits de l’Homme en Chine, adoptée par le Congrès de la FIDH à Erevan

11/04/2010
Communiqué
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Résolution sur la situation des droits de l’Homme en Chine

Les droits de l’Homme en Chine dans une situation critique : menaces sur la liberté d’expression

En 2009 la situation des droits de l’Homme en Chine s’est détériorée sur tous les fronts. Le gouvernement chinois a envoyé un message clair et fort à ses citoyens ainsi qu’à la communauté internationale : les droits fondamentaux, inscrits dans le droit international aussi bien que le droit interne chinois, ne seront plus tolérés si l’exercice de ces droits risque de compromettre le contrôle absolu du pays par le Parti Communiste Chinois (PCC).

L’année 2009 a été marquée par plusieurs dates anniversaires importantes et très délicates sur le plan politique : le 20ème anniversaire du massacre du 4 juin et de l’intervention au Tibet ainsi que le 60ème anniversaire de la fondation de la République Populaire de Chine. Le 60ème anniversaire de la fondation a été célébré avec grandes fanfares et déploiement de force militaire, alors que les autres anniversaires ont été marqués par la répression et l’étouffement des voix des dissidentes.

Les actions des dirigeants, en 2009 et après, indiquent une inquiétante détérioration de leur attitude vis à vis, particulièrement, des droits universellement reconnus à la liberté d’expression et d’opinion, protégés par l’Article 19 de la Déclaration Universelle des droits de l’Homme, qui garantit que “Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression” y compris “ le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit”, ainsi que par de l’Article 35 de la Constitution chinoise elle-même, qui stipule que les citoyens chinois “jouissent de la liberté d’expression, liberté de la presse, du libre droit de réunion et d’association, de défilé et de manifestation”.

Les récentes attaques contre la liberté d’expression et d’opinion comprennent :

° La mobilisation de la police et des pouvoirs judiciaires, pour menacer, harceler, surveiller et emprisonner les signataires de la Charte 08, le document clef dans lequel figurent des propositions concernant la réforme constitutionnelle, l’indépendance du système judiciaire, la liberté d’expression et de protection des droits de l’Homme en Chine. La principale cible des autorités a été le rédacteur de la Charte 08, Liu Xiaobo, qui a été condamné à 11 ans de prison et 2 ans de privation de droits civils, le 25 décembre 2009, pour “incitation à subversion du pouvoir d’État”, en raison du rôle qu’il avait joué dans la campagne de collecte de signatures en faveur de la Charte 08. Outre des universitaires éminents, des écrivains, des professeurs, des juristes et des dissidents, on trouve parmi les signataires de la Charte des citoyens de toute origine, paysans, ouvriers, ainsi que des personnes expulsées et des auteurs de pétitions.

° Comme en témoigne l’affaire Liu Xiaobo - ainsi que les poursuites contre d’autres défenseurs des droits de l’Homme - prouve bien que les autorités ont de plus en plus souvent recours au chef d’accusation “incitation à subversion du pouvoir d’État” pour punir et emprisonner tout individu ayant utilisé les nouveaux média et moyens de communication pour faire valoir leurs revendications et demander une réforme démocratique et sociale.

° La promulgation d’une directive gouvernementale exigeant que tous les fabricants nationaux d’ordinateurs - ainsi que tous les fabricants qui exportent des ordinateurs vers la Chine - pré-équipent leur matériel d’un logiciel de filtrage connu sous le nom de “Green Dam/Youth Escort”, pour que les utilisateurs ne puissent avoir accès à certaines sources d’information jugées “nocives” par le gouvernement chinois.

° Les projets de renforcement du système de protection des secrets d’État, un dispositif très puissant permettant de contrôler l’accès à l’information et de punir quiconque exprime des opinions que le gouvernement désapprouve. Les projets de révision visent à prendre en compte les progrès technologiques réalisés depuis la promulgation de la Loi sur la protection des secrets d’État, en 1988, et à exercer un contrôle encore plus étendu, sévère et rigoureux sur les informations classées secrètes, en cette nouvelle ère de communication digitale.

En ce même moment où les menaces contre la liberté d’expression ne font que croître à l’intérieur de la Chine, le gouvernement chinois refuse systématiquement et de plus en plus catégoriquement de céder aux pressions internationales et de rendre compte des atteintes aux droits de l’Homme perpétrées en Chine. Par exemple, à la fin de 2008, la Chine a prétendu que les membres du Comité des Nations-Unies contre la Torture “avaient fait preuve de graves préjugés à l’égard de la Chine” et “n’avaient pas tenu compte des faits” lors de la rédaction des conclusions sur le non respect par la Chine de la Convention contre la Torture. En décembre 2009, le gouvernement chinois a simplement rejeté les préoccupations internationales, lors du procès du Liu Xiaobo, et a suscité un scandale au plan international en faisant exécuter un citoyen britannique mentalement handicapé, dont le procès avait été marqué par des vices de procédure qui avaient gravement affecté sa défense.

Conscient qu’une réforme démocratique et un authentique changement en Chine dépend de la possibilité, pour les citoyens chinois, de faire entendre leur voix, et que l’attitude de la Chine vis à vis des droits de l’Homme affectera inévitablement le respect des droits de l’Homme dans tous les pays, le Congrès de la FIDH :

Exprime un soutien fort aux défenseurs des droits de l’Homme en Chine ;

Demande instamment aux ONG de tous les pays de :

° Constituer un front uni et parler d’une seule et même voix pour dire “non” aux violations des droits de l’Homme commises par le gouvernement chinois, dans la mesure où aujourd’hui le problème des droits de l’Homme en Chine et devenu un problème mondial ;

° Exercer une surveillance attentive sur les différents gouvernements et sur les accords qu’ils négocient avec le gouvernement chinois, pour les empêcher de donner aux autorités chinoises le feu vert aux violations des droits de l’Homme pour obtenir en retour des avantages politiques et économiques ;

° Soutenir le développement de la société civile en Chine, en prenant contact avec des associations non gouvernementales chinoises, en leur apportant une aide concrète dans tous les domaines et en établissant des liens de collaboration durables.

Insiste auprès du gouvernement de la République Populaire de Chine pour qu’il :

°Respecte ses obligations en vertu du droit national et international en matière de droits de l’Homme, et en vertu de tous les traités auxquels il est signataire ;

° Ratifie le Pacte international relatif aux droits civils et politiques

° Libère toutes les personnes détenues pour “incitation à la subversion d’État”, en violation de leur droit à la liberté d’expression ;

° Réforme le système de protection des secrets d’État, pour renforcer l’ouverture et améliorer la transparence, réforme également la culture du secret et s’emploie à promouvoir un État de droit.

Lance un appel aux Nations-Unies et aux gouvernements nationaux afin qu’ils :

°Soutiennent les défenseurs des droits de l’Homme à l’intérieur de la Chine ;

° Appellent le gouvernement chinois à libérer les personnes détenues pour’ “incitation à la subversion d’État”, en violation de leur droit à la liberté d’expression ;

° S’interrogent sur la valeur réelle de leurs relations économiques et politiques avec une puissance qui ne respecte pas les droits de l’Homme et la vie de ses propres citoyens ou de citoyens d’autres États.

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