Soudan : alors que les affrontements continuent, les partenaires internationaux du pays doivent appeler à la responsabilité et à la justice

18/04/2023
Communiqué
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Crédit Satellite image ©2022 Maxar Technologies / AFP

Khartoum, Nairobi, Paris, Londres, 18 avril 2023. Depuis le 15 avril, le général Abdel Fattah al-Burhan, chef du Conseil souverain et des Forces armées soudanaises (SAF), et le général Mohamed Hamdan Dagalo, alias Hemedti, chef des Forces de soutien rapide (FSR), se sont livrés, dans leur quête du pouvoir, à des affrontements meurtriers à travers le Soudan. En deux jours, près de 100 civil⋅es ont été tué⋅es et 1 100 ont été blessé⋅es selon le Comité central des médecins soudanais. Les combats entre les deux factions font toujours rage.

La Fédération internationale des droits humains (FIDH), l’African Center for Justice and Peace Studies (ACJPS), CIVICUS, Gisa, Global Centre for the Responsibility to Protect, l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), REDRESS, Sudanese Human Rights Monitor (SHRM), Sudan Human Rights Hub, Humanity United, Komma Organization for Development Initiative (KODI) et Regional Centre for Training and Development of Civil Society (RCDCS) appellent à un arrêt immédiat de l’usage de la force par les deux parties. Ces organisations sont profondément préoccupées par les attaques délibérées contre la population.

« Depuis le coup d’État d’octobre 2021, au cours duquel les deux généraux ont de nouveau pris le pouvoir, la répression meurtrière des manifestant⋅es s’est poursuivie dans la capitale Khartoum et les violences commises par de multiples forces de sécurité, y compris les factions des Forces de soutien rapide (FSR) – d’anciens janjawids – au Darfour et dans l’est du Soudan se sont intensifiées, » a déclaré Ahmed Elzobier, directeur de SHRM.

Les civil·es, appelant à la démocratie, à la paix et à la justice, ont toujours été les premières victimes. Les partenaires internationaux (UNITAMS, Union africaine et IGAD), soutenus par les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Arabie Saoudite et les Émirats Arabes Unis, ont insisté sur la signature d’un accord politique pour préparer une transition civilo-militaire. Or, au cœur des négociations demeure la lutte de pouvoir entre le général Abdel Fattah al-Burhan, chef des forces soudanaises (SAF), soutenu par son proche allié égyptien, et le puissant chef des FSR, Hemedti, en raison de sa féroce milice et de son contrôle des mines d’or dans le sud du pays.

Les désaccords entre les deux généraux ont refait surface à propos de l’intégration des puissantes forces paramilitaires de soutien rapide (FSR) dans l’armée, dans le cadre de l’accord-cadre. Aujourd’hui, les SAF et les FSR s’affrontent pour prendre la direction du pays.

Des raids aériens et des affrontements violents ont lieu à Khartoum et dans ses environs, mais aussi à Méroé, à Port-Soudan, à Kassala, au Kordofan et au Darfour. Plus de 20 personnes ont été tuées dans le sud et le nord du Darfour, sur 100 personnes et 1 100 blessé·es dans l’ensemble du pays.

Les signataires exhortent les deux factions à faciliter et à sécuriser les déplacements vers et depuis les centres de soins. Ils requièrent également le respect de toutes les lois internationales qui protègent les droits humains et garantissent la protection des civil·es.

« La responsabilité et la justice ont été largement négligées dans cet accord. Cette situation nous rappelle une fois de plus que la paix ne peut exister sans justice, » a déclaré Alice Mogwe, présidente de la FIDH.

L’absence de justice et d’obligation de rendre des comptes a favorisé des cycles de violence répétés accompagnés de graves violations des droits humains depuis 2019. Derrière les atrocités commises au Darfour sous l’ère Béchir, l’armée soudanaise est en outre responsable de plusieurs massacres depuis la transition de 2019. Le 3 juin 2019, au moins 128 personnes ont été assassinées et plusieurs femmes ont été violées et agressées sexuellement. Les auteurs de graves violations des droits humains, y compris de crimes internationaux commis à l’époque du régime d’Omar el-Béchir, ainsi que de crimes commis pendant la période de transition et depuis le coup d’État de 2021, n’ont toujours pas été poursuivis.

« Ces acteurs ne peuvent pas faire partie de la solution au Soudan ; la seule option viable est la participation des civil·es. Ces demandes incluent la fin de l’impunité qui persiste au Soudan, » a déclaré Mossaad Mohamed Ali, directeur exécutif de l’ACJPS.

« Cette récente escalade du conflit armé entre l’armée et FSR, bien que prévisible, aura des conséquences dévastatrices à la fois pour la vie humaine et la transition démocratique du Soudan. Les acteurs internationaux et régionaux doivent maintenant donner la priorité à la responsabilité en tant que condition préalable essentielle pour assurer la stabilité et construire la démocratie, » a déclaré Rupert Skilbeck, directeur de REDRESS.

Les organisations signataires appellent les partenaires et institutions internationaux et régionaux à :
 condamner sans plus attendre le conflit qui entraîne des violations croissantes des droits humains et une crise humanitaire dans tout le pays ;
 appeler les deux factions à cesser immédiatement les affrontements en cours ;
 soutenir l’aspiration du peuple soudanais à consolider la démocratie par le biais d’un gouvernement civil ;
 prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les droits humains du peuple soudanais et fournir une aide humanitaire aux plus vulnérables en partenariat avec les agences des Nations unies, les organisations internationales et les ONG ;
 utiliser tous les moyens juridiques et diplomatiques, y compris la médiation, le système judiciaire, les sanctions ciblées et les mesures coercitives, pour établir l’obligation de rendre des comptes et réparer les violations flagrantes des droits humains commises ces dernières années.

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