Atteinte à la liberté d’association

08/07/2004
Appel urgent

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de
l’Homme, programme conjoint de la FIDH et de l’OMCT, vous prie
d’intervenir de toute urgence à propos de la situation suivante au
Rwanda :

Description des faits :

L’Observatoire a été informé de la demande de dissolution de la Ligue
Rwandaise pour la Promotion et la Défense des Droits de l’Homme
(LIPRODHOR), portée par le Parlement devant le Gouvernement le 30
juin 2004.

Cette demande fait suite au rapport et aux recommandations établis
par la commission parlementaire chargée de mener des enquêtes sur
l’éventuelle propagation de l’idéologie génocidaire dans le pays,
interdite par la loi rwandaise. Cette commission a été établie fin
2003, suite aux meurtres de plusieurs survivants du génocide de 1994
dans la province de Gikongoro, et a transmis ses conclusions au
Parlement le 27 juin 2004. Elle a notamment accusé la LIPRODHOR,
ainsi que quatre autres organisations de la société civile basées
dans le nord du pays (Giseni), de propager des " idées génocidaires
", et recommandé leur dissolution ainsi que l’arrestation de leurs
responsables. Suite à l’adoption de ces recommandations par le
Parlement, le rapport devrait être transmis au Sénat sous peu.

L’Observatoire est vivement préoccupé par cette atteinte à la liberté
d’association, et souligne qu’aucun membre de la LIPRODHOR n’a été
consulté ou interrogé durant l’élaboration du rapport de la
commission. Les informations présentées dans le rapport semblent pour
beaucoup infondées et erronées : ainsi, alors que la commission
parlementaire dénonce par exemple " un réseau de près de 4,000
personnes visant à véhiculer une idéologie génocidaire à travers les
différents districts et provinces du pays ", la LIPRODHOR compte en
réalité 380 animateurs des droits de l’Homme.

L’Observatoire s’inquiète de cette utilisation de la loi contre
l’idéologie génocidaire, qui, telle qu’interprétée par la commission
et par le Parlement, peut être étendue à toute forme de contestation
contre le gouvernement.

L’Observatoire s’inquiète par ailleurs de ce qu’une dizaine de
responsables de la LIPRODHOR, notamment les membres du conseil
d’administration, aient été nommément cités dans le rapport de la
commission, et craint que ces personnes ne puissent être inquiétées.

L’Observatoire rappelle qu’en avril 2003, la LIPRODHOR avait été
accusée de " divisionnisme " par la commission parlementaire établie
fin 2002 et chargée d’enquêter sur le parti d’opposition, le
Mouvement démocratique Républicain (MDR). Alors accusée de collaborer
avec le MDR et de bénéficier de financements politiques, la LIPRODHOR
avait dû faire face à une vaste campagne de discrédit, relayée par
les médias .

Ces entraves contreviennent aux dispositions de la Déclaration sur
les défenseurs des droits de l’Homme adoptée le 9 décembre 1998 par
l’Assemblée générale des Nations unies, notamment à son article 1
selon lequel " chacun a le droit, individuellement ou en association
avec d’autres, des promouvoir la protection et la réalisation des
droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national
et international " et plus encore à son article 5 (b) en vertu duquel
"Afin de promouvoir et protéger les droits de l’Homme et les libertés
fondamentales, chacun a le droit, individuellement ou en association
avec d’autres, aux niveaux national et international, de former des
organisations, associations ou groupes non gouvernementaux, de s’y
affilier et d’y participer".

Actions demandées :
Merci d’écrire aux autorités rwandaises et de leur demander de :
i. Procéder à la révision du rapport soumis par la commission
parlementaire en menant des investigations impartiales et
approfondies, notamment en rencontrant les membres et responsables de
la LIPRODHOR.
ii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les
défenseurs des droits de l’homme adoptée par l’Assemblée générale des
Nations unies le 9 décembre 1998, notamment à son article 1er selon
lequel " chacun a le droit, individuellement ou en association avec
d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de
l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et
international " et son article 5.b mentionné ci-dessus.
iii. Se conformer plus généralement aux dispositions de la
Déclaration universelle des droits de l’Homme et aux dispositions de
la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.
iv. Garantir l’intégrité physique et psychologique des responsables
de la LIPRODHOR et des membres du Conseil d’administration qui ont
été nommément cités dans le rapport de la commission parlementaire.
Adresses :

Président de la République rwandaise :
Président Paul Kagame
B.P. 15, Kigali, Rwanda ; Fax : +250 572431

Ministère de la Défense et de la Sécurité nationale :
Général-Major Marcel Gatsinzi
B.P. 23, Kigali, Rwanda ; Fax : +250 576969

Ministre de la Justice :
Edda Mukabagwiza

Ministre de l’Administration locale :
Christophe Bazivamo

Lire la suite