Elections en trompe-l’œil au Congo-Brazzaville

06/03/2002
Rapport

Le constat dressé par le PNUD, à quelques jours de diverses
échéances électorales, est sans complaisance mais réaliste,
comme a pu s’en rendre compte la mission d’enquête de la
Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme
(FIDH) qui a séjourné au Congo du 15 au 25 février 2002.

Après les guerres récurrentes qu’a connues le Congo, un
nouvel ordre politique s’est mis en place avec en 1997 le
retour au pouvoir, par les armes, du Général Denis Sassou
Nguesso, l’installation d’un gouvernement de "Salut public" et
d’un "Conseil National de Transition (CNT)". Des accords
militaires, signés le 29 décembre 1999, entre les Forces
Armées Congolaises (FAC) et les Forces d’Autodéfense et de
Résistance (FADR), du Révérend Pasteur Ntoumi, coalisées
au sein du Conseil National de la Résistance (CNR) ont
permis l’arrêt des hostilités et l’amorce d’actions de
pacification des régions touchées par les combats. C’est
grâce à ces accords que s’est tenu le dialogue national qui
devait logiquement regrouper les principaux protagonistes
des guerres, dans le souci d’aboutir à un véritable processus
de réconciliation et d’envisager des solutions face aux défis
de la période post-conflit. Malheureusement, de l’avis des
observateurs, ce dialogue national, organisé à Brazzaville du
17 mars au 14 avril 2001, n’aurait servi qu’à avaliser le projet
de Constitution que le gouvernement a proposé. Les
principaux opposants et protagonistes en exil, notamment
l’ancien Président Pascal Lissouba, Bernard Kolélas et Yombi
Opango, ayant été exclus du débat. Les confessions
religieuses ont été également ignorées par les organisateurs.
Le 20 janvier 2001, la nouvelle Constitution, examinée
pendant le dialogue national, a été soumise à référendum et
adoptée dans des conditions fortement critiquées par les
partis d’opposition ; ceux-ci la trouvent "taillée sur mesure"
parce que donnant des pouvoirs exorbitants au chef de
l’Exécutif. A titre indicatif, ils citent l’article 132 alinéa 4 de la
Constitution qui confère au Président de la République le
droit de légiférer par ordonnance, après avis de la Cour
constitutionnelle, lorsque sa demande d’habilitation pour
prendre des ordonnances pour des cas relevant du domaine
de la loi est refusée par le Parlement. L’article 58, alinéa 7
obligeant deux ans de résidence au Congo pour pouvoir se
présenter aux élections présidentielles semble quant à lui
prévu pour éliminer certains candidats potentiels de la course
présidentielle. La FIDH avait d’ailleurs critiqué le texte de
Constitution soumis à référendum dans un communiqué du
25 janvier 2002, tant pour les conditions d’éligibilité à la
présidence de la République que pour les pouvoirs
exorbitants qu’il confère au chef de l’exécutif.
Cependant, en matière de protection des droits humains, il
faut noter qu’en son préambule et aux titres I et II, cette
nouvelle Constitution présente des acquis positifs.
Les critiques concernent également les conditions
d’établissement des listes électorales. Ces listes, constituées
à partir d’un recensement administratif, auraient permis à
des non Congolais de voter et auraient exclu des Congolais du
processus électoral. C’est le cas notamment à Brazzaville, à
Pointe Noire, à Dolisie où les réfugiés de la RDC (République
Démocratique du Congo), du Rwanda et même des
ressortissants d’Afrique occidentale auraient été autorisés à
voter. D’ailleurs, le nombre d’électeurs, par région et par
district, n’a jamais été communiqué aux partis d’opposition.

C’est dans ce contexte socio-politique difficile marqué par un
climat de suspicion que les Congolais sont convoqués aux
urnes, le 10 mars pour le premier tour et le 7 avril en cas de
second tour, pour élire leur Président de la République. En
lice, dix candidats. Un pour toute la région du Nord, Denis
Sassou Nguesso et neuf pour la région du Sud. L’organisation
du scrutin a été confiée au Ministère de l’Intérieur et la
supervision sera assurée par la CONEL, la Commission
Nationale d’Organisation des Elections.
Ces élections présidentielles devraient être suivies,
respectivement en mai et en juin 2002 d’élections législatives
et sénatoriales.
Plusieurs éléments empêchent la tenue de ces échéances
électorales dans des conditions adéquates, conformes au
droit international1.

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