Violences dans le nord-est de la RDC : les autorités et la communauté internationale doivent agir !

19/06/2023
Déclaration
RDC
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ALEXIS HUGUET / AFP

46 morts, dont de nombreux enfants, dans un camp de déplacé·es lors d’un massacre commis par la CODECO (« Coopérative pour le développement du Congo »), des fosses communes attribuées au M23, une milice soutenue par le Rwanda… Le cycle de violence qui ravage l’Est du pays doit être brisé. Les autorités nationales et la communauté internationale doivent enfin prendre leurs responsabilités. Dans cette optique, la récente visite du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) et l’ouverture par son bureau d’un examen préliminaire de la situation, sont des signaux encourageants, qui doivent être suivis d’effets.

Paris, Nairobi, Kinshasa, 19 juin 2023. Les civil·es, en particulier les femmes et les enfants, paient le prix des faiblesses de la communauté internationale. Depuis des décennies, les épisodes d’une violence inouïe se succèdent, sans que la communauté internationale ne sorte de son apathie. Des puissances régionales soutiennent des milices coupables d’atrocités et le gouvernement central n’a pas pu garantir une paix durable.

« Des parents sont assassinés devant leurs enfants, d’autres voient mourir leurs enfants sous leurs yeux, dans une ambiance de chaos général, » rappelle Dismas Kitenge du Groupe Lotus, organisation membre de la FIDH en RDC. « Dans quelle autre partie du monde accepterait-on cette situation ? Les congolais·es de l’Est méritent la paix, au même titre que le reste de l’humanité. L’ampleur de ces violences obligent les autorités nationales ainsi que la communauté internationale à agir vite, mieux et surtout, concrètement. »

Plusieurs raisons expliquent ces cycles de violences, mais celle sur laquelle la communauté internationale pourrait agir est l’impunité. L’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) concentre tous les éléments d’une situation intenable, poussés à l’extrême. Dans cette perspective, la justice nationale et internationale ont un rôle clé à jouer.

Karim Khan, Procureur de la CPI, en RDC : une visite bienvenue mais qui doit être suivie d’effets

Au terme d’une visite de quatre jours, le Procureur de la CPI et le gouvernement de la RDC ont signé, le 1er juin 2023, un Protocole d’accord afin de renforcer leur coopération dans la lutte contre l’impunité des crimes de guerre et crimes contre l’humanité perpétrés sur le territoire. Le 15 juin, le Procureur déclarait avoir notifié les juges de la saisine de son bureau par les autorités congolaises pour l’ouverture d’une enquête sur les crimes commis dans le Nord-Kivu depuis 1er janvier 2022.

« Nous, nous avons des preuves de tous ces crimes perpétrés sur la population congolaise et nous sommes prêts à collaborer avec la CPI au niveau de la justice pénale internationale », a déclaré Paul Nsapu, Président de la ligue des électeurs et Coordonnateur de la Commission nationale des droits de l’Homme.

Le Protocole d’accord est une manifestation du principe de « complémentarité positive » entre la CPI et les États parties : une approche complémentaire plutôt que concurrentielle. Le Bureau du Procureur pourra ainsi soutenir les autorités nationales en renforçant les capacités des institutions chargées de traiter les affaires de crimes internationaux, souvent complexes.

Dix-neuf ans après l’ouverture d’une enquête en RDC par la CPI qui a conduit aux condamnations définitives de Thomas Lubanga Dyilo, Germain Katanga et Bosco Ntaganda, le gouvernement congolais a saisi la CPI pour les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par le Mouvement du 23 mars (M23) à Kishishe, dans l’Est de la RDC depuis 2022. Alors que les Nations Unies ont condamné les attaques du M23 et que l’Union européenne a exhorté le Rwanda à cesser de soutenir le mouvement rebelle, le Procureur de la CPI a annoncé ouvrir un examen préliminaire de la situation.

Depuis de nombreuses années, les massacres sont documentés par les organisations nationales et internationales de défense des droits humains, dans des conditions sécuritaires difficiles, ainsi que par les agences des Nations Unies et les autorités nationales.

Avec une société civile prête à collaborer avec la CPI, un Protocole signé avec l’État et un Procureur de la CPI qui semble vouloir contribuer à mettre un terme à ce cycle interminable de violence, l’espoir est-il envisageable pour l’Est de la RDC ?

La FIDH, avec ses organisations membres, encourage le Bureau du Procureur de la CPI et le gouvernement de la RDC à joindre les paroles aux gestes et à appliquer. Elles feront leur possible pour soutenir les initiatives des acteurs concernés : l’impunité doit cesser, la paix doit revenir.

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