République démocratique du Congo : Menaces à l’encontre de M. Josué « Blaise » Mukubwa Karume

07/12/2012
Appel urgent
RDC

L’Observatoire a été informé par des sources fiables de l’existence de menaces à l’encontre de M. Josué « Blaise » Mukubwa Karume, président de la section Sud Kivu de l’Association africaine de Défense des droits de l’Homme (ASADHO).

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en République démocratique du Congo (RDC).

Description de la situation :

Selon les informations reçues, le 27 novembre 2012 vers 12h15, M. Mukubwa Karume a reçu un appel anonyme provenant du numéro 081 14 70 104, alors qu’il se trouvait à Kinshasa pour participer à un atelier de réflexion stratégique et d’échange d’expérience sur la lutte contre les crimes sexuels en RDC. Son interlocuteur lui a alors demandé : « Etes-vous en sécurité ? » avant de raccrocher.

Par ailleurs, le 30 novembre, M. Mukubwa Karume a été informé du fait que quatre inconnus s’étaient rendus à son domicile situé à Bukavu et avaient demandé la date de son retour. Le même jour à 14h35, ce dernier a en outre reçu un SMS provenant du numéro +254 73 32 27 090 dont la teneur était la suivante : « Dénichez et dénoncer les M23 qui ont changé de tenues en celle des policiers », avant d’en recevoir un autre du numéro +254 78 98 85 698 qui indiquait la chose suivante : « ce numéro est du système d’alerte SC. Ne pas téléphoner svp. Le système n’accepte que les sms. Le gros du M23 quitte actuellement Goma ».

Enfin, le 4 décembre 2012, M. Mukubwa Karume a été informé de la découverte d’une lettre à son attention glissée sous la porte de son domicile à Bukavu signée du chef de section M23 de Kadutu, l’avertissant du fait que « le gouvernement congolais a accepté de nous intégrer dans tous les services, oseras-tu nous appeler des mutins ou des rebelles ? Bukavu n’est pas si grande et nous y serons tous ensemble, car à nous y revoir, nous n’avons pas trop de maux contre toi ».

Cette série de menaces et d’intimidation s’inscrit dans un contexte d’insécurité croissante au Nord Kivu (à l’Est de la RDC) depuis l’offensive des rebelles du M23 contre l’armée congolaise et en particulier depuis la prise successive des villes de Rutshuru, Goma et Sake. Les forces du M23 ont systématiquement intimidé et parfois directement menacé toute personne ou organisation dénonçant les violations des droits de l’Homme commises dans ces zones.

L’Observatoire exprime sa vive préoccupation quant aux menaces décrites ci-dessus, qui ne visent manifestement qu’à sanctionner les activités de défense des droits de l’Homme de M. Mukubwa Karume. L’Observatoire rappelle que le M23, officiellement rebaptisé Armée révolutionnaire congolaise (ARC), est en grande partie composée d’anciens combattants du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) dont le leader militaire, Bosco Ntaganda, demeure recherché par la Cour pénale internationale pour les crimes commis par ses troupes pendant la guerre des Kivus entre 2007 et 2009. Ces mêmes éléments qui composent aujourd’hui le M23 connaissent et menacent les défenseurs des droits de l’Homme qui ont dénoncé ou risquent de dénoncer leurs crimes.

L’Observatoire demande par conséquent aux autorités congolaises et aux responsables de l’ARC / M23 de garantir l’intégrité physique et psychologique de tous les défenseurs des droits de l’Homme congolais et de diligenter des enquêtes immédiates, exhaustives et impartiales sur les faits décrits ci-dessus afin d’identifier tous les responsables et de les juger devant des tribunaux compétents.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités congolaises et aux responsables de l’Armée révolutionnaire congolaise (ARC) / M23 en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Josué « Blaise » Mukubwa Karume et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en République démocratique du Congo ;

ii. Diligenter une enquête immédiate, exhaustive et impartiale, au sujet de tous les faits décrits ci-dessus, afin d’identifier tous les responsables et de les juger devant des tribunaux compétents ;

iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de M. Josué « Blaise » Mukubwa Karume ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en RDC ;

iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement

 son article 1 qui stipule que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation de tous les droits de l’Homme et de toutes les libertés fondamentales aux niveaux national et international” ;

 son article 6 qui stipule que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres : a) De détenir, rechercher, obtenir, recevoir et conserver des informations sur tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales en ayant notamment accès à l’information quant à la manière dont il est donné effet à ces droits et libertés dans le système législatif, judiciaire ou administratif national ; b) Conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et autres instruments internationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales ; c) D’étudier, discuter, apprécier et évaluer le respect, tant en droit qu’en pratique, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales et, par ces moyens et autres moyens appropriés, d’appeler l’attention du public sur la question” ;

 et son article 12.2 qui prévoit que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;

v. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la RDC.

Adresses :

· S.E M. Joseph Kabila, Président de la République, Cabinet du Président de la République, Palais de la Nation, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax +243 88 02 120

· M. Richard MUYEJ MANGEZ Ministre de l’Intérieur et Sécurité, Email : adolumanu@yahoo.fr

· Madame Wivine MUMBA MATIPA, Ministre de la Justice et des Droits Humains, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, Fax : + 243 88 05 521, Email : luzolobambi@yahoo.fr

· Mission permanente de la République démocratique du Congo auprès des Nations unies, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, Email : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +41 22 740.16.82

· S.E. M. Henri Mova Sakanyi, Ambassadeur, Ambassade de la République démocratique du Congo à Bruxelles, 30 Marie de Bourgogne, 1000 Bruxelles, Belgique. Email : secretariat@ambardc.eu. Fax : + 32.2.213.49.95

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de la RDC dans vos pays respectifs.

***

Paris-Genève, le 7 décembre 2012

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
· E-mail : Appeals@fidh-omct.org
· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80
· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

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