Rapport de situation sur le drame de Chacona à Brazzaville

14/09/2018
Rapport

Brazzaville - Entre les 21 et 23 juillet dernier, à Brazzaville, la police congolaise procède à l’arrestation d’une vingtaine de jeunes hommes dans les quartiers nord de Brazzaville. Ces jeunes sont ensuite transportés dans plusieurs commissariats de la ville. Tous se retrouvent finalement au Commissariat de Chacona à Mpila, où officiellement 13 personnes décèdent dans la nuit du 22 au 23 juillet. Ces décès sont intervenus des suites d’actes de torture et de traitements cruels inhumains et dégradants. L’OCDH a pu identifier 12 familles sur les 13 impliquées.

A travers ce rapport de situation l’OCDH, organisation membre de la FIDH en République du Congo, a pour seul souci de contribuer au travail déjà en cours de réalisation par les autorités congolaises pour faire toute la lumière sur ce massacre et que les responsabilités des uns et des autres puissent être établies à tous les niveaux de commandement.

Malgré les témoignages, le Procureur de la République 3 près le tribunal de grande instance de Brazzaville et le Gouvernement 4 nient, dans un premier temps, la réalité des faits, et affirment que ces jeunes avaient perdu la vie lors d’une rixe entre bandes rivales surnommées « bébés noirs » à Djiri, quartier périphérique de Brazzaville. Une version fermement réfutée par l’OCDH.

Les recherches sur le terrain montrent au contraire que ces jeunes ont été torturés et exécutés. En peu de temps, la version du gouvernement rejoint celle de l’OCDH. Le 27 juillet, à l’Assemblée nationale, le Ministre de l’intérieur 5 reconnaît d’ailleurs que les victimes étaient décédées en garde à vue sans aucune précision sur les circonstances de ce massacre. Par ailleurs, il donne une explication curieuse de cette opération 6 de la police qui montre clairement l’implication des hauts officiers de la police. Le Ministre de la Communication quant à lui confirme que « manifestement quelque chose s’est passé dont les circonstances sont à déterminer. »

Pour éviter la répétition du drame de Chacona, il est absolument important pour le Président de la République et éventuellement son Premier Ministre de :
 Instruire le parquet du tribunal de grande instance de Brazzaville de reconsidérer le procès annoncé pour le 24 octobre prochain et en même temps poursuivre les enquêtes afin de rendre une justice de qualité ;
 Mettre en place immédiatement une commission d’enquête véritablement indépendante, dans laquelle seront pleinement impliqués les parents des victimes et les ONG des droits de l’Homme ;
 Procéder à l’exhumation des corps des victimes. Des plus amples analyses médicales (autopsies) sont requises afin d’établir les causes réelles et exactes de ces décès tragiques ;
 Décréter des mesures sociales d’accompagnement aux familles éplorées en attendant une réparation du préjudice par la justice ;
 Limoger le Ministre de l’intérieur pour avoir failli dans sa mission comme cela transparait dans son intervention devant le Parlement : « ... cette tragédie n’est pas seulement due à un grave dysfonctionnement dans le système de surveillance des personnes en garde à vue. Elle pose surtout, un vrai problème structurel dans la nomenclature du personnel ainsi que de manque de locaux construits dans les normes des commissariats ». Après 16 ans à la tête de ce Ministère, il n’a pas été en mesure de reformer la police congolaise ;
 Prendre des sanctions administratives contre les deux responsables de la direction générale de la police. L a responsabilité propre des subordonnés ne dégage les supérieurs d’aucune de leur responsabilité hiérarchique ;
 Diligenter la mise en place de la Commission d’enquête nationale chargée d’enquêter sur les violations des droits de l’Homme commises entre 2015 et 2016, Commission consentie par le Gouvernement congolais.

Aux partenaires bilatéraux de la République du Congo de :
 Suspendre leur soutien aux forces de défense et de sécurité congolaises, en particulier, la police ;
 Reconsidérer toute leur coopération bilatérale avec le Gouvernement congolais en intégrant la dimension humaine comme condition sine qua non.

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