La FIDH et l’AMDH se sont, dès 2013, constituées parties civiles, dans cette affaire dite « des bérets rouges disparus », et accompagnent 23 membres de famille et proches de victimes. Les organisations se félicitent de la tenue de ce procès qui représente un pas important dans la lutte contre l’impunité des crimes graves commis depuis 2012 au nord et au sud du pays et pour le reste de l’Afrique. Elles appellent les autorités judiciaires à assurer un procès juste et équitable.
« Les victimes et nos associations attendent de ce procès que leur parole et leurs intérêts soient pris en compte et qu’il se déroule de façon équitable et transparente, afin que justice soit rendue aux victimes »
Une importante délégation de la FIDH et de l’AMDH est présente à Sikasso et restera sur place tout au long du procès. Ses membres seront bien sur joignables pour explications et commentaires. |
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Les avocats du Groupe d’action judiciaire (GAJ) de la FIDH ont constitué l’AMDH et la FIDH parties civiles dès 2013 et ont accompagné tout au long de la procédure d’instruction les 23 victimes et familles de victimes qu’elles représentent également au procès de Sikasso. Le GAJ mobilise notamment des avocats maliens, sénégalais, français et ivoiriens issus d’organisations de défense des droits humains membres de la FIDH et engagés dans des procédures judiciaires contre des auteurs de crimes de masse dans leur pays ou en Afrique.
« Un tel procès est l’occasion de faire transparaître la vérité sur un épisode difficile de l’histoire récente du Mali au cours duquel, alors que le pays était attaqué au Nord, un quarteron d’officiers n’a pas hésité à faire exécuter froidement 21 militaires pour conserver le pouvoir acquis quelques jours plus tôt par un coup d’État militaire. Le Mali s’honore à rendre justice et donner aux accusés un droit que ces derniers ont nié à leurs victimes »
La FIDH et l’AMDH exhortent les autorités politiques maliennes à prendre les dispositions nécessaires à la bonne tenue du procès à Sikasso, en particulier afin d’assurer la sécurité des victimes, de leurs avocats, et des représentants des organisations de défense des droits humains qui assisteront au procès. A plusieurs reprises depuis 2013, des personnes se présentant comme des soutiens ou des partisans de Amadou Haya Sanogo ont fait pression ou menacés des familles de victimes pour qu’ils abandonnent leur combat pour la vérité et la justice sur le sort de leurs proches.
« Ce procès est hautement historique et symbolique pour le Mali, en proie à des violations graves des droits humains depuis janvier 2012. C’est une étape essentielle pour tourner la page des coups d’Etats militaires et sonner la fin des aventures putschistes. Il doit être également un catalyseur pour l’avancée des autres procédures judiciaires pendantes devant la justice malienne, notamment celles de « la mutinerie du 30 septembre 2013 » et celles sur les crimes commis au nord du pays depuis janvier 2012 »
Contexte : « Coup d’État et contre-coup d’État sur fond de conflit au Nord du Mali » Les 21 et 22 mars 2012, alors que le Mali fait face depuis janvier 2012 à une offensive de groupes armés indépendantistes touaregs et de groupes armés djihadistes qui ont déjà conquis près d’un quart du pays, un groupe d’officiers prend le pouvoir à Bamako et renverse le président Amadou Toumani Touré. A quelques jours de l’élection présidentielle, les putschistes se sont constitués en Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDR ou CNRDRE) et ont instauré une junte militaire avec à leur tête le Capitaine Amadou Haya Sanogo. Le 30 avril 2012, une tentative de contre coup d’État, menée par l’unité parachutiste de l’armée appelée « bérets rouges » restée fidèle à l’ancien chef de l’Etat Amadou Toumani Toure avec à leur tête le colonel Abdina Guindo, a été mise en échec et violemment réprimée par les putschistes qui capturent plusieurs dizaines de bérets rouges. Selon les enquêtes de la FIDH et de l’AMDH, dans la nuit du 2 mai 2012, 21 militaires bérets rouges ont été sortis de leurs cellules et transportés dans des camions militaires vers Diago une localité proche de Kati, quartier général de l’armée et du chef de la junte Amadou Haya Sanogo, situé à une vingtaine de kilomètre de Bamako. Ils y ont été exécutés et enterrés dans une fosse commune. Au cours de la transition politique, une instruction judiciaire a été ouverte pour « enlèvement de personnes » et a été confiée au juge Karambé du Tribunal de première instance de la commune 3 de Bamako. Le 28 novembre 2013, la FIDH et l’AMDH se sont constituées parties civiles au côté de 23 parents et proches des personnes disparues. Entre le 27 novembre 2013 et février 2014, 27 personnes, dont Amadou Haya Sanogo, ont été inculpées dont certaines ont été placées sous mandat de dépôt. Dans la nuit du 3 décembre 2013, l’instruction permet d’identifier un charnier à Diago où sont retrouvés 21 corps. La FIDH et l’AMDH ont alors demandé la requalification des faits « d’enlèvement » en « assassinats et meurtres et complicité de ces infractions », qui a été accordée par le parquet. L’instruction a été clôturée en 2015 après la réalisation d’analyses médico-légales et de tests ADN concluants que les 21 corps retrouvés étaient bien ceux des 21 bérets rouges « disparus » des geôles d’Haya Sanogo et sa garde rapprochée. Au terme d’une instruction menée avec célérité, l’affaire a franchi une étape importante le 22 décembre 2015, date à laquelle la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Bamako a mis en accusation Amadou Haya Sanogo et 17 co-accusés et les a renvoyés devant une Cour d’assises. |