Paris, 19 avril 2024. Le mercredi 10 Avril 2024, les autorités maliennes ont, à travers un décret, procédé à la suspension « jusqu’à nouvel ordre » et pour « raison d’ordre public » « des activités des partis politiques » et celles « à caractère politique des associations ». Dans un communiqué publié le même jour, le gouvernement justifie cette mesure par « la création des conditions pré-requises devant être réalisées pour mener des activités majeures de la Transition, en particulier le Dialogue inter-malien pour la Paix et la Réconciliation nationale ».
« Cette suspension des partis politiques est une violation flagrante de la nouvelle Constitution du Mali adoptée par le régime actuel lui-même en juillet 2023. Elle constitue également une entrave sérieuse au dialogue inter-malien. Bien qu’il s’agisse d’un dialogue imparfait, cette suspension empêche désormais les partis et la société civile d’y participer », déclare Alice Mogwe, Présidente de la FIDH.
« Le gouvernement s’était engagé à transférer le pouvoir à un gouvernement civil le 26 mars 2024 à la suite d’un scrutin présidentiel. Au lieu de cela nous assistons à la restriction de l’espace civique et une tentative de confiscation du pouvoir », déclare Me Drissa Traoré, Secrétaire général de la FIDH. « Après des dissolutions d’associations et de partis politiques, ainsi que plusieurs arrestations et détentions arbitraires qui ont suivi, les autorités maliennes confirment une fois de plus leur volonté d’étouffer toute voix dissonante et de conduire le Mali dans un régime dictatorial sans précédent », poursuit-il.
La FIDH appelle l’Union Africaine et les Nations Unies à exhorter davantage les autorités maliennes à abroger son décret antidémocratique et à respecter les libertés fondamentales protégées par la Constitution du 22 juillet 2023 et les instruments juridiques régionaux et internationaux. La FIDH encourage la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples à effectuer une mission de promotion des droits humains au Mali.
Un espace civique et démocratique désormais très réduit au Mali depuis le coup d’État de mai 2021
Le 11 avril 2024, soit le lendemain de la prise de décision, la Haute autorité de la communication (HAC), en application du décret, a invité « tous les médias à arrêter toute diffusion et publication des activités des partis politiques ». La FIDH dénonce cette tentative de musellement de la presse par la HAC qui constitue une violation flagrante de la liberté de la presse.
Depuis le dernier semestre de 2023, les autorités maliennes ont dissous, pour des motifs fallacieux, des associations et des partis politiques critiques du régime. Au moins, six associations ont été dissoutes, dont l’Observatoire pour les élections et la bonne gouvernance, la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS), ou encore l’Association Karoual. Le processus de dissolution du Parti solidarité africaine pour la démocratie et l’indépendance (Sadi) est pendant devant la justice. Le 18 avril 2024, à l’issue du conseil des ministres, le Gouvernement a dissous une dernière association : la Coordination des organisations de l’appel du 20 février 2023 pour sauver le Mali. En outre, plusieurs activistes de la société civile font l’objet de harcèlement judiciaire, d’arrestations et de détentions arbitraires.