« Combien de temps allons-nous devoir encore attendre avant que justice ne soit rendue » a déclaré Asmaou Diallo, présidente de l’association des victimes, parents et amis du 28 septembre (AVIPA). « Nous reconnaissons les progrès réalisés, mais nous attendons avec impatience le jour où les personnes responsables des meurtres et des viols de nos proches seront jugées. »
Les six organisations sont la FIDH, Human Rights Watch (HRW), l’Organisation guinéenne de défense des droits de l’Homme et du citoyen (OGDH), l’Association des victimes, parents et amis du 28 septembre (AVIPA), Les mêmes droits pour tous (MDT), et la Coordination des organisations de défense des droits de l’Homme (CODDH).
L’enquête, qui est menée par un pool de juges d’instruction guinéens, a été ouverte en février 2010 mais n’a toujours pas été clôturée. Néanmoins, des progrès majeurs ont été réalisés au cours des six dernières années en dépit des obstacles politiques, financiers, et logistiques. D’anciens et d’actuels hauts fonctionnaires ont été inculpés, notamment l’ancien président de la junte du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD), Moussa Dadis Camara, et son vice-président Mamadouba Toto Camara. De même, plus de 400 victimes et des membres de leurs familles ont pu être auditionnées par les juges, qui ont également entendu des témoins y compris au sein des services de sécurité.
Certains aspects de l’enquête demeurent cependant en suspens, notamment l’interrogatoire d’au moins un témoin important, la localisation d’au moins un suspect, et l’identification des fosses communes où se trouveraient les corps d’environ 100 victimes qui sont toujours portées disparues. Des témoins affirment que les forces de sécurité se sont efforcées de dissimuler les preuves de leurs crimes et de falsifier le nombre de personnes tuées. Ces éléments ne devraient pour autant pas conduire les autorités judiciaires guinéennes à retarder la fin de l’enquête, ont déclaré nos organisations.
« Les victimes, leurs avocats de la FIDH et de l’OGDH, et nos organisations veulent maintenant une clôture de l’instruction et la tenue d’un procès qui permettra enfin la vérité, la justice et la réparation pour les victimes. »
Le début d’une réforme profonde du système judiciaire en 2014 a conduit à des progrès significatifs dans le dossier et a jeté les bases d’une modernisation attendue du système, ont déclaré nos organisations. Ces changements sont essentiels pour combler les lacunes importantes du système judiciaire guinéen et pour renforcer son indépendance, son impartialité et son efficacité.
La Cour pénale internationale (CPI), qui a ouvert un examen préliminaire sur la situation en Guinée en octobre 2009, a régulièrement rappelé au gouvernement guinéen son obligation de mener ce dossier jusqu’au procès. Le gouvernement guinéen devrait veiller à ce que la phase d’enquête du dossier se termine dans les meilleurs délais pour organiser un procès, ont déclaré nos organisations.
La CPI est une juridiction de dernier recours. Conformément au principe de complémentarité, elle n’intervient que lorsque les tribunaux nationaux sont incapables ou refusent d’enquêter et de poursuivre les cas qui relèvent de sa compétence.
« La Guinée pourrait devenir, avec ce procès attendu, un véritable leader en matière de justice pour les crimes graves en Afrique », a déclaré Corinne Dufka, directrice adjointe de la division Afrique à Human Rights Watch. « Le gouvernement guinéen devrait apporter tout son soutien aux juges d’instructions pour qu’ils achèvent leur travail afin que les auteurs du massacre au stade soient jugés dans les plus brefs délais ».