L’EPU prévoit le passage en revue de la situation des droits humains d’un Etat membre par les autres Etats, permettant à ceux-ci d’exprimer leurs préoccupations et d’émettre des recommandations pour améliorer la situation dans le pays.
« L’Examen de la France intervient à un moment où l’État de droit est gravement mis à mal par les mesures mises en place depuis 2015 »déplore Michel Tubiana, Président Honoraire de la LDH. « Les pays membres de l’ONU doivent tirer la sonnette d’alarme face à la menace qui pèse sur les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité qui sont au cœur de la tradition démocratique française. »
La réponse du gouvernement français aux attaques terroristes de 2015 - 22 mois d’état d’urgence suivis de la transposition dans le droit commun administratif et pénal de certaines mesures exceptionnelles d’urgence – est non seulement discriminatoire et dangereuse pour les libertés individuelles et l’État de droit, mais aussi inefficace [1]. Les recherches de la FIDH et de la LDH montrent que sur les 4600 perquisitions menées sous le régime de l’État d’urgence, seulement 20 étaient liées au terrorisme, parmi lesquelles 16 relevaient d’actes d’apologie du terrorisme. A l’inverse, les mesures de contre-terrorisme ont permis le cautionnement de pratiques discriminatoires, en prenant pour cible certains individus et groupes déjà marginalisés dans la société française, et en entretenant ainsi les amalgames et la stigmatisation en fonction de l’origine ou de la religion. La Cour de Cassation elle-même a relevé le caractère abusif des contrôles d’identité discriminatoires menés par les officiers de police, et a condamné l’État.
La loi du 30 octobre 2017 [2], qui inscrit de manière permanente les mesures anti-terroristes dans le droit commun, est venue affaiblir davantage encore les prérogatives du juge judiciaire par une mise à l’écart de ce dernier au profit des autorités administratives. Et ce, notamment en matière de mesures individuelles de surveillance et de contrôles administratifs, de perquisitions et de saisies.
L’Examen de la France est d’autant plus crucial qu’il arrive à un moment critique, où les possibilités de recours ou d’abrogation de cette loi sont limitées au niveau national. A fortiori puisque que les membres du Conseil Constitutionnel, la dernière juridiction compétente pour exercer un contrôle de constitutionnalité, sont directement nommés par les branches exécutive et législative du gouvernement.
« La France se trouve dans une situation où des mesures d’exception sont devenues la règle, au nom du combat contre le terrorisme. Les États membres des Nations Unies doivent saisir cette opportunité pour rappeler à la France que les droits humains sont une caractéristique intrinsèque de la lutte contre le terrorisme, et ne doit pas être une raison pour aller à l’encontre de ses obligations internationales » conclut Dimitris Christopoulos, Président de la FIDH.