Sur les six autres journalistes de la même affaire dont le juge a ordonné la libération après cinq ans de détention, un seul a été libéré à ce jour. Les autorités en exercice à Sanaa, les Houthis, doivent annuler immédiatement les condamnations à mort et de libérer les neuf autres journalistes qui ont été condamnés en violation de leur droit à la liberté d’expression.
Nous avons récemment célébré la Journée mondiale de la liberté de la presse, le 3 mai 2020. Le journalisme, en particulier le journalisme indépendant et critique, est essentiel pour promouvoir la transparence, la responsabilité, la bonne gouvernance et le respect des droits humains et de l’État de droit. Les journalistes ne sont en aucun cas des acteurs du conflit au Yémen et ne peuvent en aucun cas être pris pour cible.
Les quatre journalistes, Abdulkhaleq Ahmed Amran, Akram Saleh Al-Walidi, Al-Hareth Saleh Hamid et Tawfiq Mohammed Al-Mansouri ont été condamnés le 11 avril 2020 par la Cour pénale spécialisée de Sanaa, qui est contrôlée par les Houthis. Leur avocat, Abdelmajeed Sabra, qui n’a pas été autorisé à assister à l’audience du verdict, a entamé la procédure d’appel le 22 avril 2020.
Le juge a condamné les six autres journalistes, Hisham Ahmed Tarmoom, Hisham Abdulmalik Al-Yousefi, Haitham Abdulrahman Al-Shihab, Essam Amin Balgheeth, Hassan Abdullah Annab et Salah Muhammad Al-Qaedi, à une peine de prison déjà purgée, soit environ cinq ans, et les a également placés sous surveillance policière pour une période de trois ans supplémentaires. En outre, les appareils et matériels électroniques qui étaient en leur possession au moment de leur arrestation restent confisqués.
Le ministère public avait demandé que les peines maximales soient appliquées conformément aux articles 16, 21, 126 bis, et 136 du code pénal (loi n° 12 de 1994 sur les crimes et les peines).
Les journalistes ont été accusés de diffusion de fausses nouvelles "en soutien aux crimes de l’agression saoudienne et de ses alliés contre la République du Yémen". Les journalistes ont également été accusés de "nuire à l’intérêt public à travers la création de plusieurs sites et pages sur Internet et sur les réseaux sociaux et leur gestion secrète depuis plusieurs hôtels de la capitale, Sanaa". La coalition dirigée par l’Arabie Saoudite mène une guerre contre les Houthis au Yémen depuis 2015.
Le 9 juin 2015, un groupe de combattants Houthi a arrêté neuf des journalistes alors qu’ils utilisaient Internet à l’hôtel Qasr Al-Ahlam à Sanaa. Salah Mohammad Al-Qaedi a été arrêté plus tard à son domicile à Sanaa par les forces Houthi le 28 août 2015. Ils ont été arbitrairement détenus, longuement maintenus à l’isolement, torturés et maltraités pendant leur captivité, et n’ont été formellement inculpés que plus de trois ans plus tard. En décembre 2018, des accusations fabriquées de toutes pièces ont été lancées contre eux en rapport avec l’exercice pacifique de leurs droits à la liberté d’opinion et d’expression dans le cadre d’un simulacre de procès qui a violé les normes internationales en matière de procès équitable et de procédure légale.
Entre-temps, malgré la décision de la cour de libérer les six journalistes, les autorités continuent de retarder leur libération. Jusqu’à la date de cet appel, seul le journaliste Salah Mohammad Al-Qaedi a été libéré (le 23 avril 2020).
Les organisations soussignées appellent toutes les parties au conflit à respecter le droit à la liberté d’expression et à cesser leurs efforts pour museler les journalistes et les médias.
Nous, soussignés, appelons les Nations unies, en particulier le Groupe d’éminents experts sur le Yémen, ainsi que ses États membres, y les pays comme le Royaume-Uni et le Canada, qui coprésident la Coalition pour la liberté des médias de 35 États, à demander aux autorités en exercice à Sanaa, les Houthis, de :
• Annuler les peines prononcées contre les dix journalistes, en particulier les condamnations à mort des journalistes Abdulkhaleq Ahmed Amran, Akram Saleh Al-Walidi, Al-Hareth Saleh Hamid et Tawfiq Mohammed Al-Mansouri, et les libérer immédiatement ;
• Libérer immédiatement les journalistes Hisham Ahmed Tarmoom, Hisham Abdulmalik Al-Yousefi, Haitham Abdulrahman Al-Shihab, Essam Amin Balgheeth et Hassan Abdullah Annab, suite à l’ordre de la cour de les libérer du 11 avril 2020, et s’assurer qu’ils ne fassent pas l’objet de nouvelles mesures judiciaires visant à restreindre leur travail ;
• Libérer tous les journalistes yéménites détenus et disparus, et abandonner toutes les charges retenues contre eux ;
• Mettre en œuvre tous les efforts possibles pour assurer la sécurité et l’intégrité physique des journalistes - conformément au droit international humanitaire coutumier ; et
• Veiller à ce que les journalistes puissent exercer leur métier sans craindre d’être arrêtés ou de subir d’autres formes de représailles et de restrictions portant atteinte à leur droit à la liberté d’expression.