Tunisie : la condamnation de Nessma TV entache la journée mondiale de la liberté de la presse

03/05/2012
Communiqué
ar fr

Le 3 mai 2012, le tribunal de première instance de Tunis a reconnu Nabil Karoui, directeur de la chaîne Nessma TV ainsi que son responsable du visionnage et Nadia Jemmel, responsable du doublage du film Persepolis dont la diffusion a été à l’origine de la plainte, coupables de « diffusion d’un film étranger susceptible de troubler l’ordre public et de porter atteintes aux bonnes mœurs ». Ils ont été respectivement condamnés à une amende d’un montant de 2400 et 1200 dinars tunisiens. La FIDH regrette que la justice tunisienne n’ait pas fait prévaloir le droit à la liberté d’expression et met en garde contre les risques d’instrumentalisation de la justice à des fins politiques ou idéologiques.

« Cette condamnation, aussi symbolique soit-elle, n’en est pas moins préoccupante. La justice tunisienne, par cette décision, s’inscrit en faux par rapport aux engagements de la Tunisie relatifs au respect des libertés fondamentales », a déclaré Karim Lahidji, Vice président de la FIDH qui a procédé à l’observation des deux précédentes audiences de ce procès. « Rendu le 3 mai, journée internationale de la liberté de la presse, ce verdict s’inscrit dans un contexte de multiplication des menaces à l’égard des journalistes et plus généralement à la liberté des médias », a-t-il ajouté.

Au cours des dernières semaines, plusieurs journalistes ont été victimes de menaces voire d’agressions. Entre le 20 et le 24 avril, des agressions ont ainsi été recensées lors d’un sit-in commencé début mars devant la chaîne de télévision nationale. Les manifestants réclamaient « l’épuration de la chaîne » qu’ils accusent d’avoir une couverture partisane ciblant en particulier le gouvernement en place et le parti de la majorité. Deux journalistes Walid Hamaroui et Kais Ben Mefteh, membre du syndicat de base des réalisateurs de la télévision nationale, ont ainsi été tous deux blessés par des sit-inneurs respectivement les 23 et 24 avril. A la demande du ministère de l’Intérieur, le sit-in a finalement été levé le 25 avril.

Déjà, lors de la commémoration de la journée des martyrs, le 9 avril 2012, et alors que les manifestants avaient été sévèrement réprimés, des journalistes tunisiens et étrangers avaient été pris pour cible. Du matériel avait alors été confisqué ou cassé, des clichés effacés et plusieurs journalistes frappés et arrêtés. Selon le syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) au moins 14 journalistes ont été agressés au cours de cette manifestation.

La FIDH appelle les autorités tunisiennes compétentes à veiller à la protection des professionnels de l’information et à garantir la liberté des médias et d’expression conformément aux standards internationaux et ce, y compris dans le cadre du processus de réformes entrepris et portant notamment sur le cadre légal régissant le secteur de l’information.

Lire aussi :

 Multiplication des atteintes au droit au rassemblement pacifique

 Tunisie- Procès Nessma TV : Une audience sous tension

 Tunisie : L’enquête à l’encontre de Nessma TV doit être interrompue !

Lire la suite