Confirmation partielle de la mise en accusation de Majdi Nema (Islam Alloush) devant la Cour d’assises de Paris

11/12/2023
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Riccardo Milani / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Le 20 novembre 2023, la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris a infirmé une partie des charges retenues à l’encontre de Majdi Nema (Islam Alloush), ancien porte-parole et cadre du groupe armé syrien Jaysh al-Islam. Elle a toutefois confirmé sa mise en accusation devant la Cour d’assises de Paris pour complicité de crimes de guerre (enrôlement de mineurs) et participation à un groupement formé en vue de la préparation de crimes de guerre.

Paris, 11 décembre 2023. En juillet 2023, les juges d’instruction du Pôle Crimes contre l’humanité du Tribunal judiciaire de Paris ont renvoyé Majdi devant la Cour d’assises de Paris. Celui-ci était mis en accusation pour complicité de crimes de guerre, de disparitions forcées et participation à un groupement formé en vue de la préparation de crimes de guerre. Après un appel de la défense sur cette décision, la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris a rendu sa décision le 20 novembre 2023.

« La Chambre de l’instruction a, à juste titre, retenu ce que les parties civiles soutiennent depuis le début de cette affaire, à savoir l’existence de charges suffisantes à l’encontre de Majdi Nema s’agissant de son implication dans les crimes d’enrôlement de mineurs et de participation à un groupement formé en vue de la préparation de crimes de guerre », a déclaré Marc Bailly, avocat des parties civiles.

Cependant, sans remettre en cause la responsabilité de Jaysh al-Islam dans la commission de ces crimes, les juges ont écarté les trois autres infractions pour lesquelles Majdi Nema était mis en accusation, à savoir la complicité de disparitions forcées d’une part, et d’attaques délibérées contre les populations civiles, d’atteintes volontaires à la vie et à l’intégrité physique et d’enlèvements et de séquestrations constitutifs de crimes de guerre d’autre part. Les avocats des parties civiles ont formé un pourvoi en cassation contre cette décision. Le procès public de Majdi Nema devant la Cour d’assises de Paris sera organisé une fois la décision de la Cour de cassation rendue.

Une reconnaissance du rôle de Jaysh al-Islam dans la disparition des quatre collègues du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression - SCM

Concernant les disparitions forcées, la Chambre de l’instruction a indiqué « qu’il résulte effectivement de l’information et des nombreux témoignages recueillis que Jaysh al-Islam doit être considéré comme responsable de la disparition des quatre militants ». Les juges ont toutefois estimé que le critère d’agent de l’État ou d’individu agissant avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, au sens de la Convention des Nations unies contre les disparitions forcées, dont est issue la définition de l’infraction en droit français, n’était pas rempli s’agissant du groupe Jaysh al-Islam.

« La Cour a estimé que les critères juridiques de qualification de l’infraction de disparition forcée n’étaient pas réunis en l’espèce, ce qui apparaît être en contradiction avec l’état actuel du droit. Nous avons donc formé un pourvoi en cassation contre cette décision », a indiqué Clémence Bectarte, avocate des parties civiles et coordinatrice du Groupe d’action judiciaire de la FIDH.

« Pour la première fois, une juridiction établit très clairement la responsabilité du groupe Jaysh al-Islam dans la disparition des figures emblématiques de la révolution syrienne Razan Zeitouneh, Wael Al-Hamada, Samira Khalil et Nazem Hamadi, a déclaré Mazen Darwish, directeur général du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression (SCM). Cela constitue une motivation supplémentaire pour poursuivre notre quête de justice pour toutes les victimes de disparitions forcées en Syrie.  »

Concernant les attaques délibérées contre les populations civiles et atteintes volontaires à la vie et à l’intégrité physique, enlèvements et séquestrations, les juges ont reconnu le rôle de Jaysh al-Islam dans ces exactions. Ils ont notamment rappelé que les nombreux témoignages et éléments de l’information judiciaire permettaient d’établir l’imputabilité de ces crimes au groupe. Ils ont toutefois estimé que le rôle de complice de Majdi Nema dans la commission de ces crimes n’était pas suffisamment établi au terme de l’enquête judiciaire.

En janvier 2020, suite à une plainte déposée par le Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression (SCM), la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et la Ligue des droits de l’Homme (LDH), Majdi Nema a été arrêté à Marseille et mis en examen pour complicité de crimes de guerre et de disparitions forcées survenus entre 2013 et 2016.

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