Dégradation très préoccupante de la situation,

18/07/2003
Rapport
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Grave développement des pratiques arbitraires
Appel pour une commission internationale d’enquête sur le décès de Mme Kazemi
Demande de suspension immédiate du Procureur Général de Téhéran

La FIDH et la LDDHI sont profondément choquées par les informations sur les conditions de la mort en détention de Mme Zahra Kazemi, photographe irano-canadienne. Mme Zahra Kazemi avait été interpellée le 23 juin 2003 par des hommes en civil appartenant aux milices qui, dirigées par le Procureur Général de Téhéran, Saïd Mortazavi ont procédé aux arrestations de leaders étudiants de journalistes, et actes de violence pendant les manifestations d’étudiants. Elle a été transférée dans la prison n° 359 du service de renseignement des Pastaran (Gardiens de la révolution). Le lendemain de son interpellation, le Procureur de Téhéran ordonnait une perquisition de son domicile, entreprise par la police.

Le 27 juin 2003, Mme Kazemi a été transférée, dans le coma, à l’hôpital militaire de Baghiatollah. Son décès y a été constaté peu de temps après, officiellement d’abord, des suites d’un accident cérébral vasculaire.

Le 13 juillet 2003, le Président Khatami a ordonné à quatre de ses ministres une enquête sur les conditions entourant son décès. Le 16 juillet le vice-président iranien Mohammed Ali Abtahi a rendu public les premiers résultats de l’enquête, reconnaissant que le décès à la suite d’une hémorragie cérébrale résultait de coups que Mme Kazemi avait reçus à la tête.

Le sort de sa dépouille est aujourd’hui inconnu puisque des informations contradictoires circulent sur son inhumation.

La FIDH et la LDDHI sont extrêmement préoccupées par ces informations, d’autant que outre Mme Kazemi, ce sont plusieurs dizaines de leaders étudiants et de journalistes qui ont été interpellés par ces mêmes milices et sont à présent détenus dans des lieux inconnus. A ceux là s’ajoutent, près de 2000 personnes actuellement en détention sur les 4000 interpellées à la suite des manifestations de juin dernier et du début du mois de juillet, en violation des règles du droit international. La FIDH et la LDDHI ont de fortes raisons de craindre que ces personnes soient l’objet de mauvais traitements, et que leur détention soit arbitraire.

La FIDH et la LDDHI demandent, en conséquence, l’établissement immédiat d’une mission internationale d’enquête indépendante et impartiale, composée de médecins légistes et de juristes, chargée de lever le voile sur les conditions entourant la mort de Mme Kazemi.

La mission devra également évaluer les responsabilités individuelles engagées dans le décès de Mme Kazemi, et ordonner la poursuite des personnes identifiées comme responsables devant des tribunaux indépendants et impartiaux. Cette mission devra intégrer le Rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté d’opinion et d’expression, dont la visite, initialement autorisée, a été repoussée à une date inconnue par les autorités iraniennes.

En outre, la FIDH et la LDDHI demandent d’ores et déjà, la suspension de ses fonctions du Procureur général de Téhéran, M. Saïd Mortazavi, et l’ouverture d’une instruction à son encontre pour responsabilité dans la commission d’actes de torture du fait de sa direction des milices qui ont semé la terreur, battu et enlevé les manifestants et leaders étudiants et journalistes, et de son autorité sur les centres de détention des gardiens de la révolution, où Mme Kazemi aurait été torturée.

Son histoire est tristement célèbre, puisque le Représentant spécial des Nations unies sur l’Iran, M. Copithorne, avait déjà reconnu que M. Mortazavi avait été à l’origine de la fermeture de journaux en 2000, de la vague d’arrestation de journalistes et d’éditeurs, de l’arrestation des intellectuels ayant participé à une conférence à Berlin, de l’arrestation d’avocats pour des faits relevant de l’exercice légitime de leur mission de défense. Sa récente désignation aux fonctions de Procureur général de Téhéran a, pour ces mêmes raisons, été dernièrement qualifiée de « regrettable et contestable » par le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, dans son rapport sur la visite du Groupe en Iran.

Enfin, la FIDH et la LDDHI ordonnent que les leaders étudiants, journalistes et quelques 2000 personnes encore détenues dans des lieux inconnus soient immédiatement libérés compte tenu du caractère arbitraire de leur détention. S’il existait pour certains d’entre eux des charges valables, la FIDH et la LDDHI demandent que le droit à un procès équitable leur soit garanti ainsi que des conditions de détention conformes aux normes internationales et régionales applicables.

La FIDH et la LDDHI adressent enfin un appel à la Communauté internationale et à la Présidence italienne de l’Union européenne notamment dans le cadre de son dialogue sur les droits de l’Homme avec l’Iran, à exercer des pressions fermes pour que ces recommandations prennent effet sans plus tarder.

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