Détention arbitraire / Harcèlement judiciaire / Fermeture de locaux NER 001 / 0709 / OBS 095

09/07/2009
Appel urgent

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante au Niger.

Description de la situation

L’Observatoire a été informé par l’Association nigérienne de défense des droits de l’Homme (ANDDH) de la détention arbitraire de M. Marou Amadou, président du Front uni pour la sauvegarde des acquis démocratiques (FUSAD), du Comité de réflexion et d’orientation indépendant pour la sauvegarde des acquis démocratiques (CROISADE), membre du bureau national du Réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire - Publiez ce que vous payez, et représentant de la société civile à la Commission électorale nationale indépendante (CENI)

Selon les informations reçues, le 29 juin 2009, M. Marou Amadou a été arrêté par la police nigérienne à Niamey.

Le 30 juin, il a été accusé de “provocation à la désobéissance des forces de défense et de sécurité”, de “complot contre l’autorité de l’Etat” et d’“entreprise de démoralisation de l’armée” sur la base des articles 76, 78 et 79 du Code pénal nigérien - pour lesquels il encourt la peine capitale - ainsi que de “flagrant délit de presse”, sur la base de l’article 48 de l’Ordonnance portant régime de la liberté de la presse.

A l’heure où nous diffusons cet appel urgent, le parquet semblait vouloir requalifier ces charges, considérées comme infondées par le doyen des juges d’instruction au vu du manque de preuves. M. Amadou reste cependant détenu dans les locaux de la police judiciaire de Niamey.

Ces accusations font suite aux propos que M. Amadou a tenu lors d’une émission diffusée sur la chaîne de télévision Dounia le 29 juin, dans laquelle il a fait référence à une déclaration du Front de défense de la démocratie (FDD) invitant l’armée à respecter l’article 13 de la Constitution du Niger, qui prévoit que “nul n’est tenu d’exécuter un ordre manifestement illégal”[1].

Par ailleurs, le 30 juin 2009, le groupe de radio-télévision Dounia a été fermé, à la suite de l’intervention télévisée de M. Amadou.

L’Observatoire exprime sa plus vive préoccupation quant à la détention arbitraire de M. Marou Amadou, et craint que d’autres défenseurs des droits de l’Homme ne soient exposés à des actes de harcèlement similaires pour avoir dénoncé les récentes manipulations constitutionnelles du Président Tandja Mahamadou

Actions requises

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités nigériennes en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Marou Amadou et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme nigériens ;

ii. Procéder à la libération immédiate et inconditionnelle de M. Marou Amadou, arbitrairement détenu, en l’absence de toute charge valable à son encontre ;

iii. Procéder à la réouverture immédiate et inconditionnelle des locaux du groupe de radio-télévision Dounia ;

iv. Veiller à ce qu’un terme soit mis à toute forme de menaces et de harcèlement à l’encontre de tous les défenseurs des droits de l’Homme nigériens ;

v. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui stipule que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation de tous les droits de l’Homme et de toutes les libertés fondamentales aux niveaux national et international” et son article 12.2 qui prévoit que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;

vi. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par le Niger.

Adresses

* M. Mamadou Tandja, Président de la République du Niger, Fax : + 227 73 34 30.
* M. Seini Oumarou, Premier Ministre, Fax : + 227 73 58 59.
* M. Dagra Mamadou, Ministre de la Justice, Fax : +227 72 37 77.
* M. Albade Aboufa, Ministre de l’Intérieur, Fax : + 227 20 72 21 76
* Mission permanente du Niger auprès de l’Union européenne, Fax : + 32 2 648 27 84, E-mail : ambanigerbru@skynet.be
* Mission permanente du Niger auprès des Nations unies à Genève, mission-nigeria@bluewin.ch

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques du Niger dans vos pays respectifs.

***

Paris - Genève, le 1er juillet 2009

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :

E-mail : Appeals@fidh-omct.org

Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80

Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

[1] La référence à cet article s’inscrit dans un contexte où le président Tandja Mahamadou a procédé à la dissolution de l’Assemblée nationale, le 26 mai 2009, puis s’est attribué des pouvoirs d’exception sur la base de l’article 53 de la Constitution, lui permettant de gouverner par le biais d’ordonnances et de décrets. Il a depuis suspendu l’application des articles 104 à 107 de la Constitution relatifs à la Cour constitutionnelle, qu’il a par la suite dissoute. Il compte désormais procéder à un référendum, considéré comme inconstitutionnel par la Cour constitutionnelle dissoute, afin d’introduire dans la Constitution la non-limitation du nombre de mandats présidentiels. Cette modification doit lui permettre de briguer un troisième mandat.

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