Obstacles à la liberté de mouvement de Me Mohamed Abbou et de M. Taoufik Mezni

28/08/2007
Communiqué

Paris-Genève, le 28 août 2007. L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), dénonce une nouvelle fois les actes de harcèlement à l’encontre de Me Mohamed Abbou, avocat et défenseur des droits de l’Homme, membre du Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) et de l’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques (AISPP), qui a été libéré le 25 juillet 2007, après 30 mois d’emprisonnement [1].

Le 24 août 2007, Me Abbou a été refoulé et interdit de voyager vers le Royaume-Uni, où il devait se rendre afin de participer à une émission sur la démocratie et les droits de l’Homme dans les studios londoniens de la chaîne Al-Jazeera. En effet, alors qu’il s’apprêtait à passer la douane, la police de l’air et des frontières lui a interdit de quitter la Tunisie au prétexte que sa libération était conditionnelle et qu’il n’avait pas reçu l’accord du juge et du tribunal qui l’ont condamné.

L’Observatoire dénonce fermement cette atteinte à la liberté de mouvement de Me Abbou et souligne qu’en vertu de l’article 357 du Code de procédure pénale tunisien, la liberté de mouvement d’une personne en liberté conditionnelle ne peut être restreinte qu’au moment de sa libération, soit en l’assignant à résidence (art. 357(a)), soit en la plaçant d’office dans un service public ou une entreprise privée (art. 357(b)). Or à aucun moment Me Abbou ne s’est vu signifier l’une ou l’autre de ces restrictions.

L’Observatoire tient également à rappeler que le 18 août 2007, la somme de 3700 dinars tunisiens (environ 2200€), que l’organisation Frontline avait envoyé à Me Abbou par le biais de Western Union, a été retirée à sa place. Cette somme était destinée à couvrir ses frais de voyage pour un séjour à Paris.

L’Observatoire exprime sa plus vive préoccupation quant à ces actes de harcèlement à l’encontre de Me Abbou et considère que de tels agissements visent directement à entraver son action en faveur de la défense des droits de l’Homme et de la démocratie en Tunisie.

En outre, l’Observatoire exprime sa préoccupation quant au fait que le 25 août 2007, M. Taoufik Mezni, le frère de M. Kamel Jendoubi, président du Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH) et du Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), a été empêché de regagner la France, son pays de résidence depuis plus de sept ans. A l’aéroport de Tunis-Carthage, la police lui a en effet retiré son passeport, l’empêchant ainsi de prendre le vol Tunis Air de 9 heures. Il n’a pu regagner la France qu’après six heures d’attente. Par le passé, M. Mezni avait déjà été interrogé sur ses liens avec M. Jendoubi.

L’Observatoire réitère sa profonde préoccupation à l’égard de ces faits, qui reflètent une recrudescence des actes de harcèlement à l’encontre des défenseurs des droits de l’Homme en Tunisie, et rappelle que la Tunisie est tenue de se conformer aux obligations internationales en matière de droits de l’Homme, en particulier le Pacte relatif aux droits civils et politiques auquel elle est partie.

En conséquent, l’Observatoire prie les autorités tunisiennes de mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de Me Mohamed Abbou, de M. Taoufik Mezni et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme, afin qu’ils puissent exercer leur profession et mener leur activité de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave.

D’autre part, l’Observatoire demande aux autorités tunisiennes de se conformer aux dispositions de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 Décembre 1998, qui dispose que "chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international" (article 1), "chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales" (article 6.b) et "l’État prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la [...] Déclaration" (article 12.2).

Pour plus d’informations, merci de contacter :

FIDH : Gaël Grilhot : + 33 1 43 55 25 18
OMCT : Delphine Reculeau : + 41 22 809 49 39

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