Dans une lettre datée du 10 mai 2005, le Président de la troisième chambre de la Cour européenne des droits de l’Homme a indiqué, en application de l’article 39 [1] du règlement de la Cour, qu’il était préférable, « dans l’intérêt des parties » et du bon déroulement de la procédure, de ne pas expulser 11 immigrés du territoire italien.
Cette mesure intervient à l’occasion de l’ouverture de l’examen devant la Cour d’une affaire présentée par les avocats, demandant l’annulation des demandes d’expulsion de l’Italie vers la Libye.
« Ces mesures conservatoires sont un premier pas vers la reconnaissance de l’illégalité des mesures d’expulsion vers la Libye », a déclaré l’avocat Antonio Lana, à l’origine de la plainte, et membre de l’UFTDU.
La FIDH, l’UFTDU et l’Association européenne pour les droits de l’Homme (AEDH) estiment que cette mesure conservatoire doit être appliquée à l’ensemble des immigrés susceptibles d’être refoulés. « La décision sur les cas examinés doit valoir pour l’ensemble des immigrants et requérants d’asile qui sont dans la même situation : derrière le gel du renvoi de ces 11 personnes, c’est l’ensemble des accords d’expulsion de l’Italie vers la Libye qui doivent être gelés, tout comme la négociation des accords UE-Libye sur les mêmes sujets », a déclaré Sidiki Kaba, Président de la FIDH, « les autorités italiennes et européennes doivent à présent s’en remettre à la Cour, qui va se prononcer sur le fond de l’affaire ».
Dans un rapport à publier fin mai, la FIDH analyse la situation des immigrants et des demandeurs d’asile en Italie, démontrant que la politique italienne en matière d’immigration et de droit d’asile est à l’origine de nombreuses violations de normes internationales de protection des droits de l’Homme et des réfugiés, que sont la Convention de 1951 sur les droits des réfugiés, le Pacte international sur les droits civils et politiques et la Convention contre la torture.
Cette décision est le plus récent développement d’un débat politique majeur qui a déjà vu la condamnation de l’Italie par le Parlement européen [2]. Un grand nombre d’ONG internationales, dont la FIDH, ont également condamné l’Italie pour avoir passé un accord avec la Libye afin de renvoyer les immigrants arrivant sur son territoire. Derrière l’Italie, c’est aujourd’hui l’Union européenne qui est en pourparlers avec la Libye, pour organiser les expulsions.