Les États et les organismes internationaux doivent se saisir du droit pour mieux protéger l’environnement

Foto-Rabe via Pixabay

À l’occasion de la 50ème Journée mondiale de l’environnement, la FIDH réitère son appel à investir le droit pour en faire un outil efficace de protection du droit à un environnement propre et sain en tant que droit humain autonome. Si de grandes avancées ont été réalisées ces derniers mois, des défis majeurs restent à relever.

5 juin 2023. Alors que la triple crise planétaire – changement climatique, perte de la biodiversité et pollution – s’intensifie, l’environnement et sa protection doivent être à l’avant-poste des développements juridiques à tous les niveaux de gouvernance. Cette nécessité commence lentement à être prise au sérieux et un certain nombre d’États ont déjà mis en place des mesures, y compris juridiques, pour protéger le droit à un environnement sain et les défenseur·es de l’environnement en première ligne.

L’Accord d’Escazú est un accord pionnier à cet égard. Il s’agit du « premier traité sur les questions environnementales dans la région » de l’Amérique latine et des Caraïbes et met particulièrement l’accent sur la protection des défenseur·es de l’environnement, notamment à travers les dispositions de l’article 9. Signé par 24 pays, il est entré en vigueur en avril 2021 et a été ratifié à ce jour par 15 pays.

L’année 2021 a également marqué un tournant aux Nations Unies lorsque le Conseil des Droits de l’Homme a reconnu le droit à un environnement propre, sain et durable comme un droit humain dans sa résolution 48/13. Moins d’un an plus tard, le 28 juillet 2022, l’Assemblée générale des Nations Unies a reconnu ce droit comme un droit humain en adoptant la résolution 76/300. La FIDH se félicite de ce vote, qualifié d’« historique » par António Guterres, qui marque une nouvelle étape vers le potentiel développement d’instruments juridiques internationaux de défense et de protection de l’environnement.

Des avancées majeures dans la reconnaissance du droit à un environnement propre, sain et durable

La société civile et les communautés se sont également mobilisés autour de cette question cruciale. Depuis plusieurs années, la FIDH milite pour la reconnaissance du droit à un environnement propre, sain et durable comme un droit humain. En septembre 2021, elle a lancé, aux côtés de plusieurs de ses organisations membres, sa campagne internationale #SeeYouInCourt, visant spécifiquement à soutenir et accompagner les communautés dans des actions en justice contre les atteintes à l’environnement et aux droits humains des entreprises. Plusieurs affaires ont été lancées à travers le monde dans le cadre de cette campagne.

Malheureusement, les décisions politiques ne se traduisent pas toujours par des développements concrets et applicables. Les résolutions adoptées au niveau des Nations unies mentionnées précédemment marquent des étapes importantes vers une meilleure protection de l’environnement. Toutefois, il ne s’agit pas de textes juridiquement contraignants qui obligeraient leurs signataires à respecter, protéger et mettre en œuvre le droit à un environnement propre, sain et durable. En outre, la transposition de la résolution 76/300 de l’Assemblée générale des Nations Unies dans un cadre juridique s’est avérée plus complexe que prévu et n’a pas encore été réalisée en raison de l’opposition politique de certains États.

Par exemple, dans une résolution adoptée en avril 2023, le Conseil des Droits de l’Homme a exhorté les États membres à « maintenir des dispositifs juridiques et institutionnels propres à réglementer les activités des acteurs publics et privés, ou de renforcer ces dispositifs s’ils existent déjà, afin de prévenir, de réduire et de réparer les dommages causés à la biodiversité et aux écosystèmes, en tenant compte des obligations et engagements relatifs aux droits de l’homme qui se rapportent à la jouissance d’un environnement propre, sain et durable ». Cependant, l’appel à l’action du Conseil a été accueilli avec scepticisme par des États comme la Chine, l’Australie et les États-Unis. Ces derniers ont exprimé leur prudence à l’égard de cette nouvelle résolution et sont réticents à l’idée d’être légalement tenus de respecter le droit à un environnement propre, sain et durable, en particulier par le biais de l’Examen Périodique Universel des États, comme le propose la résolution.

Les défis du passage de la sphère politique à la sphère juridique

Des réticences se font également encore sentir au sein du système européen des droits humains. Le Sommet des chefs d’État du Conseil de l’Europe de Reykjavik des 16 et 17 mai n’a pas débouché sur un appel fort à la reconnaissance du droit à un environnement propre, sain et durable en tant que droit autonome. La FIDH s’est mobilisée aux côtés d’autres organisations de défense des droits humains et de l’environnement en ce sens. Les États ont manqué l’occasion de lancer un appel fort afin de reconnaître formellement ce droit comme un droit autonome dans le cadre de la Convention européenne des droits de l’homme. Ils se sont toutefois engagés à renforcer leur travail sur les « aspects de l’environnement liés aux droits de l’homme ». La FIDH poursuit son travail aux côtés des organisations de la société civile pour s’assurer que le Conseil de l’Europe utilise efficacement le droit et son système d’application comme outil de protection de l’environnement.

La FIDH se réjouit des progrès réalisés dans la reconnaissance du droit à un environnement propre, sain et durable, et exhorte les États à adopter des mécanismes juridiques efficaces pour garantir ce droit. Y parvenir, c’est faire des prochaines Journées mondiales de l’environnement des journées de célébration et de progrès tangibles.

Lire la suite