Paris, le 25 juin 2024. Cinq ans, deux mois et deux semaines de détention dans des conditions d’isolement punitives, qui ont succédé à sept années passées reclu dans l’ambassade de l’Équateur. La saga judiciaire, diplomatique et politique commencée en 2010, lorsque Julian Assange publie avec Wikileaks des milliers de documents sur les activités militaires des États-Unis touche à sa fin.
« La FIDH s’est mobilisée pour Julian Assange, parce qu’au delà de son cas, c’est une affaire de droits humains, de libertés fondamentales, de liberté d’expression et de droit d’informer », a déclaré Maryse Artiguelong, Vice-Présidente de la FIDH. « Ce qui était en jeu, c’est l’intimidation des lanceur·ses d’alerte et des journalistes dans le monde entier. Les États doivent les protéger, plutôt que les persécuter. »
Plaider coupable, une stratégie qui ne préjuge d’aucune culpabilité
Pour obtenir sa libération, l’équipe d’avocat·es de Julian Assange a négocié avec la justice américaine une procédure de « plaider coupable ». Julian Assange reconnaît ainsi sa culpabilité sur un chef d’accusation, sur les 17 pour lesquels il était poursuivi, en échange de l’abandon du reste des poursuites et d’une peine limitée à 62 mois prison, déjà purgée sur le sol anglais. Un arrangement classique de certaines juridictions, notamment la juridiction américaine.
« La procédure de plaider-coupable est à double tranchant », déclare Maître Alexis Deswaef, avocat international et Vice-Président de la FIDH. « Elle permet à un État de ne pas perdre la face tout en garantissant la libération de l’accusé. Soyons cependant très clair·es : elle ne préjuge en rien de la culpabilité réelle de Julian Assange, dont nous saluons la libération. Il est probable qu’à l’instar d’autres défenseur·es des droits, cette procédure soit utilisée à l’avenir contre lui, ne nous faisons pas d’illusions. »
La FIDH a suivi le cas Assange et a apporté son soutien à de nombreuses reprises, en particulier devant la Commission Européenne, au Parlement Européen et plus récemment, en février 2024, à Londres à l’occasion de son audience devant la Haute Cour pour l’autoriser ou non à faire appel de son extradition vers les Etats-Unis. L’avocat Alexis Deswaef avait pris la parole en public et dans les médias à cette occasion.
« Par ailleurs », continue Maître Deswaef, « ce cas illustre tout le problème de l’impunité : les soldats américains et les donneures d’ordre que nous avons vu commettre des crimes de guerre en Irak n’ont jamais été inquiétés, tandis que Julian Assange, Edward Snowden ou Chelsea Manning, les lanceurs et lanceuses d’alerte, privé·es de liberté ont perdu de nombreuses années de leurs vies, sans parler de leurs santé physique comme mentale. Il y a un problème moral évident d’une part, et d’autre part, un enjeu pour l’état de droit dans nos démocraties qui laissent impunies des violations graves commises par les forces armées. »
La FIDH dénonce l’usage de l’Espionage Act, loi étasunienne de 1917, pour poursuivre Julian Assange. Elle reste toujours en vigueur et pourrait être utilisée contre d’autres défenseur·es des droits dans le futur.