Les conflits, l’instabilité politique et les guerres de l’information font que la liberté de la presse est de plus en plus menacée partout dans le monde, mais la FIDH a choisi d’alerter plus particulièrement sur la dégradation de la situation des défenseur·es des droits humains et des journalistes en Afrique.
« Ils et elles font face à des attaques répétées et de plus en plus virulentes, entravant leur travail légitime pour la défense des droits humains et la manifestation de la vérité, » a rappelé Hassatou Ba-Minté, responsable du bureau Afrique de la FIDH, « Les États doivent respecter leurs engagements internationaux et régionaux, notamment la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. »
Cette année, la FIDH et ses 39 organisations membres africaines ont documenté de multiples cas d’atteintes à la liberté d’expression. Burkina Faso, Djibouti, Guinée, Mali, Niger, Sénégal, Soudan, Tchad, Rwanda, Zimbabwe... : dans tous ces pays, les arrestations et détentions arbitraires se multiplient, tout comme les actes de harcèlement judiciaire et les violences. La FIDH et ses organisations membres exigent la libération de tous·tes ces défenseur·es des droits humains et de ces journalistes et appelle à mettre un terme immédiat aux violations et attaques à leur encontre et à lutter contre l’impunité des auteurs de ces actes. En particulier, la FIDH renouvelle son appel pour que justice soit faite dans le cadre de l’assassinat de Martinez Zogo en janvier dernier. La procédure judiciaire doit aller à son terme, les auteurs identifiés et punis, et la famille de la victime obtenir réparation.
Selon le Classement mondial de la liberté de la presse 2023 de Reporters sans frontières, sur le continent africain, la pratique du journalisme est estimée difficile dans près de 40 % des pays, et problématique dans plus de 45 %. Malgré quelques évolutions positives – le Botswana gagne 30 places au classement et atteint la 65e place mondiale – la région africaine recense certaines des baisses les plus importantes. Les attaques contre les journalistes et les restrictions de l’espace civique dans plusieurs pays du Sahel (Mali 113ème, Burkina Faso 58ème), mais aussi les restrictions accrues de l’espace civique au Sénégal (104ème) en plein contexte électoral inquiètent tout particulièrement.
Alors que la Journée mondiale de la liberté de la presse fêtait ses 30 ans, dans la salle des séances de l’Assemblée générale des Nations unies des Nations unies, la FIDH a appelé les États et les acteurs internationaux tels que les Nations unies, l’Union africaine et l’Union européenne à renforcer la coordination de leurs actions et leurs mécanismes de protection pour soutenir les défenseur·es des droits humains et les journalistes dans leur capacités d’action en faveur des droits humains, de la justice et de l’État de droit. Car les libertés fondamentales sont le socle sur lequel le respect des droits humains et de l’État de droit se construit et il est de la responsabilité des États de les garantir et les promouvoir. La liberté de la presse et l’accès à l’information sont indispensables pour bâtir des sociétés démocratiques.
C’est de la conscience profonde de ces principes qu’est née, le 3 mai 1991, la déclaration de Windhoek, promulguée à l’issue d’un séminaire durant lequel les idées échangées par les journalistes africain·es et les professionnel·les des médias a servi de catalyseur pour encourager la liberté de la presse, l’indépendance et le pluralisme en Afrique et dans d’autres parties du monde. Cette déclaration est considérée comme une référence en matière de liberté de la presse dans le monde et a été à l’origine de l’évolution des normes africaines et internationales pour affirmer la liberté de la presse selon cet idéal. Plus de 30 ans après cette étape historique, cet idéal qui n’a eu de cesse de témoigner de sa force et du potentiel libérateur qu’il contient, doit être ravivé et matérialisé dans les faits, non pas en dépit, mais bien grâce à une volonté politique renouvelée des États.