Protéger la Cour pénale internationale et défendre les droits des victimes face aux crises et menaces : les recommandations de la FIDH à la 23e Assemblée des États parties

28/11/2024
Rapport
en es fr
Danya Chaikel/FIDH
  • En amont de la 23e session de l’Assemblée des États parties (AEP23) au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), à La Haye (Pays-Bas) du 2 au 7 décembre 2024, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) publie sa note de position avec trois recommandations clés à l’attention des États Parties de la CPI.
  • Ces recommandations, qui s’appuient sur le plaidoyer de la FIDH tout au long de l’année et sur le travail dévoué de ses organisations membres, visent à protéger et à renforcer les opérations de la Cour, à défendre l’intégrité du système du Statut de Rome et à donner la priorité à une justice centrée sur les victimes au sein de la CPI.
  • La FIDH participe activement à l’AEP23, au cours de laquelle les États parties à la CPI prennent des décisions cruciales qui détermineront la capacité de la Cour à fonctionner de manière efficace. Celles-ci concernent notamment des élections des principaux organes de gouvernance, l’adoption du budget-programme 2025, la mise en œuvre des amendements proposés au Statut de Rome concernant les crimes d’agression et l’esclavage, et les discussions sur la menace imminente de sanctions imposées par les États-Unis et les allégations de harcèlement sexuel à l’encontre du Procureur de la CPI.

28 novembre 2024.

La CPI en 2024 : une année marquée par des progrès et des menaces croissantes

L’AEP23 se déroule dans un contexte de menaces pour les droits humains et la justice internationale. Des atrocités généralisées en Palestine, au Soudan, au Myanmar et en Ukraine, aux régimes oppressifs en Afghanistan et au Venezuela, ces crises reflètent un mépris flagrant pour le droit pénal international, le droit international humanitaire et des droits humains, avec des impacts dévastateurs sur les civil·es, en particulier les femmes et les enfants.

Les attaques israéliennes en Palestine et au Liban ont fait des dizaines de milliers de mort·es, tandis que les violences actuelles au Soudan ont entraîné le déplacement de plus de huit millions de personnes depuis avril 2023. En Afghanistan, les politiques draconiennes des talibans continuent de cibler les femmes, les personnes LGBTIQ+ et les minorités ethniques et religieuses. Au Venezuela, la répression s’est transformée en crimes contre l’humanité, selon une mission d’enquête des Nations unies.

L’indice d’intensité des conflits le plus récent révèle que la proportion du monde faisant face à un conflit a augmenté de 65 % au cours des trois dernières années. Dans ce contexte d’escalade des conflits armés et de violations généralisées des droits humains, l’AEP23 représente une occasion cruciale pour les États parties à la CPI de réaffirmer leur engagement à lutter contre l’impunité, en veillant à ce qu’une justice impartiale, indépendante et centrée sur les victimes reste au cœur des opérations de la Cour.

Cette année est marquée par des réalités contrastées : bien que des étapes importantes aient été franchies pour faire progresser la justice et la responsabilité par le biais des mécanismes de la CPI, des menaces de plus en plus fortes ont également sapé les opérations et la crédibilité de la Cour. Parmi les réalisations importantes, citons la ratification du Statut de Rome par l’Arménie et l’Ukraine, la première condamnation prononcée par la CPI dans le cadre de la situation au Mali, une ordonnance de réparation sans précédent dans l’affaire Ongwen et des mandats d’arrêt délivrés dans le cadre des situations en Ukraine, en Palestine et en Libye, et demandés dans le cadre de la situation au Bangladesh / Myanmar.

Pourtant, la CPI continue de faire face à des défis importants qui entravent son mandat, notamment des menaces externes telles que l’ingérence politique, l’Illegitimate Court Counteraction Act des États-Unis, les cyberattaques et les allégations d’espionnage, mais aussi des défis internes, à savoir une culture d’entreprise en crise. Les menaces externes et internes qui pèsent sur la CPI s’inscrivent dans une tendance mondiale plus large d’attaques contre la justice et la responsabilité, les menaces contre la société civile et les défenseur·es des droits humains ayant également augmenté ces dernières années. En outre, les droits des victimes en vertu du Statut de Rome continuent de se heurter à des obstacles importants, tels qu’un accès restreint à l’information, une participation limitée aux procédures et un soutien juridique inadéquat. Le manque de coopération et d’efforts de complémentarité significatifs de la part de certains États compromet encore davantage le mandat de la Cour et la poursuite de la justice.

Dans ce contexte, la Cour fait l’objet d’une surveillance accrue, ce qui exige une protection renforcée : les États parties doivent se mobiliser pour défendre l’indépendance de la Cour et maintenir leur engagement en faveur d’une justice centrée sur les victimes.

Les recommandations de la FIDH pour l’AEP23

1. Prendre position et défendre la CPI et les défenseur·es des droits humains contre les menaces externes et internes.

2. Défendre les droits des victimes dans le cadre du Statut de Rome - en adoptant une approche inclusive, transparente et intersectionnelle de l’information et de la sensibilisation, de la participation et de la représentation légale.

3. Défendre et promouvoir l’obligation de rendre des comptes au moyen de la coopération des États et de procédures nationales véritables.

ASP23 FIDH note de position

La note de position contient également une vue d’ensemble du travail de la FIDH en matière de justice internationale au cours de l’année 2024.

Participation de la FIDH à l’AEP23

La FIDH participe à l’AEP23 avec une délégation dirigée par Oleksandra Matviichuk, vice-présidente de la FIDH et directrice du Center for Civil Liberties (Ukraine). Cette délégation comprend des représentant·es du Secrétariat international de la FIDH et de ses organisations membres du monde entier.

La FIDH participe aux sessions plénières et conduit activement du plaidoyer en faveur de politiques et d’activités qui placent les victimes au centre des préoccupations. La FIDH co-organise également une série d’événements parallèles, abordant des questions critiques telles que la priorisation et la qualité de la documentation sur les atrocités, les possibles recours pour les victimes du Soudan, le rétablissement de la confiance en les droits des victimes en vertu du Statut de Rome, et l’intimidation politique des fonctionnaires de la Cour pénale internationale (CPI). Notamment, lors d’un événement parallèle le 6 décembre, la FIDH, en collaboration avec la Coalition pour la CPI, lance un nouveau rapport La société civile et la CPI : Perspectives pour une collaboration et un engagement authentiques, qui explore le rôle crucial des organisations de la société civile (OSC) dans le soutien du mandat de la CPI et les moyens de renforcer les interactions entre les OSC et la CPI.

1) Protecting and Defending Human Rights Defenders and Civil Society : Advancing the Role of ICC States Parties and the Court

Lundi 2 décembre 2024 | 13:15 - 14:45 CET | Salle Antarctica, World Forum, La Haye

Co-organisé par le Costa Rica, la Finlande, l’Irlande, la Nouvelle-Zélande, l’Afrique du Sud, Al-Haq, Al-Haq Europe, Al-Mezan pour les droits de l’homme, la Coalition pour la prévention du génocide Hazara, la Coalition pour la Cour pénale internationale (CCPI), la FIDH, Lawyers for Justice in Libya, Palestinian Centre for Human Rights and the Transitional Justice Coordination Group-Afghanistan

2) Prioritization criteria, I-Doc, and the quality of atrocity documentation

Lundi 2 décembre 2024 | 13:15 – 14:45 CET | Salle Europe 1&2, World Forum, La Haye
Co-organisé par la Norvège, la République de Corée, Centre for International Law Research and Policy (CILRAP), Coalition for International Criminal Justice (CICJ), Commission for International Justice and Accountability (CIJA), Fondacija Fond za humanitarno pravo (Foundation Humanitarian Law Center), Global Rights Compliance (GRC), Human Rights Law Centre (Université de Nottingham), FIDH, Norwegian Helsinki Committee, and Truth Hounds.

3) Justice for Sudan’s Victims & Survivors : Mapping Accountability Pathways

Mardi 3 décembre 2024 | 18:15 - 19:45 CET | Salle Europe 1&2, World Forum, La Haye

Co-organisé par l’Afrique du Sud, la Suède, African Centre for Justice and Peace Studies (ACJPS), la FIDH, REDRESS, le Sudanese Human Rights Monitor (SHRM) et le Darfur Women Action Group (DWAG).

4) Victims’ Rome Statute Rights at the ICC : Rebuilding Trust & Advancing Justice

Jeudi 5 décembre 2024 | 08:30 – 09:45 CET | Antarctica Room, World Forum, La Haye

Co-organisé par la Finlande, l’Irlande, l’Afrique du Sud, la CCPI, la FIDH and REDRESS

5) Obstructing Justice and Promoting Impunity : Political Pressure and Intimidation of International Criminal Court Officials

Jeudi 5 décembre 2024 | 13:15 – 14:45 CET | Foyer Oceania, World Forum, La Haye

Co-organisé par la Bolivie, le Chili, l’État de Palestine, Al-Haq, Al-Haq Europe, Al-Mezan Center for Human Rights, FIDH, et le Palestinian Center for Human Rights

6) Voices of the Voiceless : Addressing Political Prisoners and the Criminalization of Dissent in Venezuela

Jeudi 5 décembre 2024 | 13:15 – 14:45 CET | Salle Antarctica, World Forum, La Haye

Co-organisé par le Canada, Foro Penal, Robert F. Kennedy Human Rights et FIDH

7) Gender Justice and the Crimes Against Humanity Treaty Initiative

Vendredi 6 décembre 2024 | 13:15 – 14:45 CET | Oceania Foyer, World Forum, La Haye

Co-organisé par le Royaume Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Crimes Against Humanity Initiative à l’Université de Washington, Global Justice Center (GJC), la FIDH, Physicians for Human Rights, Promise Institute for Human Rights at UCLA Law and Women’s Initiatives for Gender Justice

8) Civil Society and the ICC : Pathways to Collaborative and Genuine Engagement

Vendredi 6 décembre 2024 | 13:15 – 14:45 CET | Salle Antarctica, World Forum, La Haye

Co-organisé par le Costa Rica, la Finlande, l’Afrique du Sud, la Slovénie, la CCPI et la FIDH

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