Violations graves et massives des droits de l’Homme à Bangui

La FIDH et son organisation affiliée, la Ligue Centrafricaine des Droits de l’Homme (LCDH), condamnent avec force les graves violations aux droits de l’Homme qui ont suivi le coup de force de l’ancien chef d’état-major centrafricain, le Général Bozizé, contre le président Patassé, et qui perdurent actuellement dans la capitale, Bangui.

Si le coup de force a été maîtrisé dans la capitale, le risque d’une nouvelle confrontation demeure.
A cet égard, la FIDH et la LCDH rappellent leur attachement indéfectible aux principes démocratiques et condamnent avec la plus grande fermeté les modes d’accession au pouvoir pratiqués hors de toute légalité constitutionnelle. En tout état de cause, toute la lumière doit être faite sur les violations des droits de l’Homme commises lors du coup de force, tant du côté des rebelles que des forces loyalistes appuyées par les troupes libyennes et les milices de Jean-Pierre Bemba.
La FIDH et la LCDH sont particulièrement préoccupées par la situation d’insécurité totale qui règne actuellement dans la capitale centrafricaine et ses alentours, qui touche au premier rang la population civile.
De sources concordantes, on a pu dénombrer à l’hôpital communautaire et à l’hôpital de l’amitié des dizaines de morts et plus d’une centaine de blessés, en grande majorité des civils. D’autres corps ont été retrouvés éparpillés dans la capitale, notamment sur l’avenue des martyrs, au lycée Boganda, et à l’école de police.
Alors que le coup de force tenté par Bozizé a été maîtrisé dans la capitale par les forces loyalistes, le Président Patassé livre la population aux exactions commises par sa milice privée dirigé par Abdoulaye Miskine et par les troupes congolaises de son allié, Bemba.
De nombreux témoignages font état d’exécutions sommaires de civils de nationalités tchadienne et centrafricaine, considérés comme complices du Général Bozizé, au Marché à bétail au PK 13. Il a été également rapporté l’assassinat du Colonel Zakatao, pourtant loyaliste, par les rebelles de Bemba.
La LCDH fait également état de viols systématiques, notamment sur des mineures, dont certaines sont âgées de 8 ans. Ces viols ont été commis dans le secteur Nord de Bangui jusqu’au PK 22 sur la route de Damara, plus particulièrement dans le quartier Yembe 1.
L’insécurité est en outre attisée par l’existence de pillages. On nous a signalé dans le quartier Nord de la capitale, le pillage des maisons du Docteur Christian Yangue, M. François Pendeoro, M. Robert Ngoki, M. Fidèle Ngouanze, M. Zane Fe Touambona, M. Vincent Wakoro, Mlle Roselyne Gotoas, M. Gabriel Dotte Badekara, M. Marcel Serekoisse Samba, etc... On nous a également signalé le pillage des domiciles de deux ministres du Gouvernement Patassé, M. Ringui, de l’Education nationale, et M. Betty Marace, du Secrétariat général du gouvernement. Cette situation montre bien l’absence totale de contrôle de l’Etat sur les auteurs de ces actes.
La FIDH et la LCDH réitèrent leur condamnation de toute tentative de prise de pouvoir par la force et exhortent les parties belligérantes à mettre un terme à la confrontation armée et à entamer des négociations. La FIDH et la LCDH exigent également le retrait de toutes les troupes étrangères du territoire centrafricain.
Pour faire la lumière sur toutes les violations des droits de l’Homme commises par les parties en présence lors du coup de force, la FIDH et la LCDH demandent la mise en place d’une commission d’enquête à caractère international, qui ne soit pas, à l’image de la commission d’enquête mise en place en juin 2001 suite à la tentative de coup d’Etat d’André Kolingba, un organe de répression du pouvoir multipliant arrestations et détentions arbitraires.
Considérant le caractère systématique et massif des violations des droits de l’Homme commises à l’encontre de la population civile dans la capitale et les alentours, la FIDH et la LCDH exigent que tous les auteurs de ces crimes soient jugés par les juridictions nationales compétentes et conformément aux normes internationales de protection des droits de l’Homme. La FIDH et la LCDH considèrent au surplus que les exactions perpétrées depuis le 23 octobre 2002 entrent dans le champs de compétence de la Cour pénale internationale (CPI), dont la République Centrafricaine a ratifié le Statut le 3 octobre 2001. La FIDH et la LCDH ne manqueront pas de saisir les instances compétentes de la CPI des faits incriminés.

Lire la suite