Italie : un double rejet de la politique anti-immigration de la Hongrie

Rome-Paris, le 4 octobre 2016 - "Nous saluons le rejet du référendum populiste de dimanche en Hongrie visant à obtenir un refus du système de relocalisation des réfugiés établi par l’UE". Ce sont les mots de Maitre Anton Giulio Lana, Président de l’Unione forense per la tutela dei diritti umani suite à l’invalidation de ce référendum qui n’a pas atteint le quorum requis de 50% de participation.

Le référendum avait été convoqué par le gouvernement de Viktor Orbán le 2 octobre dernier appelant le peuple hongrois à se prononcer sur le plan de répartition des réfugiés entre États Membres de l’Union Européenne approuvé par le Conseil de l’Union européenne (UE) en juillet 2015. La réussite du référendum telle que souhaité par M. Orbán aurait non seulement mis en danger l’autorité du droit européen, que les État Membres de l’UE ont l’obligation de respecter dans leur droit interne, mais cela aurait aussi constitué une atteinte supplémentaire aux droits des demandeurs d’asile et réfugiés. Ces derniers font depuis longtemps l’objet d’une campagne diffamatoire et stigmatisante aux accents nationalistes et xénophobes de la part du gouvernement hongrois, et de mesures que de nombreux organismes internationaux ont jugées contraires aux obligations internationales et européennes souscrites par la Hongrie [1]. À tel point que la Commission Européenne a ouvert, en décembre 2015, une procédure d’infraction vis-à-vis de cet État membre [2], toujours en cours.

“Le résultat positif du référendum peut être interprété comme s’inscrivant dans la même dynamique que les deux arrêts du Conseil d’État italien du 27 septembre dernier qui ont annulé l’expulsion de deux demandeurs d’asile vers la Hongrie et la Bulgarie en dénonçant les carences systémiques dans les procédures d’asile et d’accueil des deux pays”

Maitre Anton Giulio Lana, Président de l'Unione forense per la tutela dei diritti umani

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“Ces arrêts revêtent une importance particulière dans la mesure où ils sont susceptibles d’affecter directement les droits des migrants et demandeurs d’asile qui se trouvent dans la même situation, qui pourront donc s’en prévaloir pour faire respecter leurs droits en Italie. Ces décisions plaident pour une réforme des normes européennes relatives à l’asile dans le but d’assurer une homogénéité et une protection effective des demandeurs d’asile sur l’ensemble du continent”

Maitre Anton Giulio Lana, Président de l'Unione forense per la tutela dei diritti umani

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Les recours avaient été présentés par deux demandeurs d’asile déplorant les carences systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil dans les deux État Membres de l’UE, qui avaient de ce fait déposé une demande de protection internationale en Italie. Cependant, l’Italie avait demandé à la Bulgarie et à la Hongrie la reprise en charge des intéressés, conformément à ce que prévoit le règlement de Dublin.
Pour la première fois, les juges italiens ont affirmé que la Hongrie et la Bulgarie ne sont pas en mesure de garantir le respect des droits des demandeurs d’asile. La juridiction a estimé que ces derniers ne pouvaient pas être transférés vers ces pays étant donné qu’ils risquent d’y subir des traitements inhumains et dégradants, tels qu’un placement en détention, des abus par les forces de l’ordre et un manque d’information [3].

“ Les deux arrêts constituent un important précédent pour le droit européen en matière d’asile. Dès à présent, le renvoi de demandeurs asile vers ces États Membres ne pourra plus avoir lieu de manière automatique. Il nécessitera un examen détaillé des systèmes d’asile dans ces deux pays et de leur conformité aux standards européens et internationaux en la matière”

Dimitris Christopoulos, président de la FIDH

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“Les jugements mettent encore une fois en avant les faiblesses du ’système de Dublin’, qui exige le renvoi des demandeurs d’asile vers le premier État Membre d’entrée dans l’UE. Ce système impose une charge excessive aux État frontaliers en matière de gestion de l’urgence migratoire, et contribue au renforcement de carences dans les systèmes d’asile et d’accueil de ces États, qui se traduisent par un risque de violation des droits des demandeurs d’asile et réfugiés”

Dimitris Christopoulos, président de la FIDH

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L’instance administrative suprême italienne constate, en outre, à travers ces deux arrêts, l’absence de respect par la Hongrie de ses obligations internationales, particulièrement en matière d’asile. Les violations perpétrées dans ce cadre s’ajoutent à celles observées par la FIDH au cours d’une mission d’enquête effectuée en Hongrie en Octobre 2015 dans plusieurs secteurs, tels que la justice, la société civile, les médias ou encore le domaine électoral.

“De telles violations s’inscrivent dans le cadre d’un projet global, mis en oeuvre par le gouvernement hongrois au cours des six dernières années avec l’objectif de centraliser progressivement les pouvoirs de l’État entre les mains du gouvernement au détriment d’autres institutions. Ceci représente une violation manifeste de la séparation des pouvoirs et d’autres principes sur lesquels se fonde un État démocratique”

Dimitris Christopoulos, président de la FIDH

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“Le référendum du 2 octobre, et les carences dans le système d’asile et d’accueil hongrois constatées par le Conseil d’État italien le 27 septembre dernier, ne sont que le dernier épisode d’une série d’attaques systématiques menées par le gouvernement Orbán contre les principes de l’État de droit, les droits humains et la démocratie. Il est temps que ces offensives fassent l’objet d’une réaction sérieuse de la part des institutions européennes, afin de garantir le respect par la Hongrie de ses obligations internationales et européennes”

Dimitris Christopoulos, président de la FIDH

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Une telle réaction devrait notamment consister dans le déclenchement de la procédure d’infraction par la Commission Européenne à l’égard de la Hongrie au motif de la violation par cet État membre du droit européen en matière d’asile.

Les conclusions de la FIDH suite à sa mission d’enquête en Hongrie sur les violations des droits humains - en particulier des migrants, demandeurs d’asile et réfugiés - et de l’État de droit, seront publiées dans les prochaines semaines.

Communiqué de presse de l’Unione forense per la tutela dei diritti umani (en italien)

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