Frontière algéro-marocaine : un entêtement qui pourrait coûter des vies

07/06/2017
Communiqué
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AFP

Rabat - Paris, le 6 juin 2017 : Faudra-t-il qu’une personne meure pour que les familles syriennes bloquées depuis des semaines à la frontière algéro-marocaine puissent obtenir de l’eau, de la nourriture, et la protection qui leur est due ? Nos organisations exhortent les autorités des deux pays à trouver une solution immédiate avant qu’il ne soit trop tard.

Le 2 juin, le Ministère des Affaires Etrangères algérien se déclarait prêt à accueillir, pour des motifs humanitaires, les "ressortissants syriens" bloqués à la frontière. La situation semblait se dénouer, peu de temps après la dénonciation le 31 mai 2017 par le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) d’une situation « dangereuse et intenable ».

La déclaration du Ministère ouvrait enfin la voie vers un pis-aller, malgré tout pétride fortes incertitudes quant au devenir réel de ces personnes, dans un pays sans loi sur l’asile notamment. Cette déclaration est toutefois restée sans application concrète, faisant durer une situation insupportable, en raison des entêtements souverainistes d’Alger et Rabat.

Le 5 juin, une délégation du HCR et du Croissant Rouge algérien a ainsi attendu plusieurs heures au poste frontière de Béni-Ounif, sans que le transfert n’ait lieu, sur fond de conflit territorial larvé. Et ce, après que les forces marocaines se soient rendues coupables quelques heures plus tôt de refoulement en arrêtant, en pleine ville de Figuig à six heures du matin, une dizaine des réfugié-e-s pour les ramener dans la zone.
L’impasse perdure donc, alors que le groupe - joint hier par téléphone - avait accepté d’entrer en Algérie en désespoir de cause plutôt que de survivre dans de telles conditions. Et ce, même si leur souhait demeure de rejoindre leurs familles établies légalement au Maroc ou dans des pays de l’Union européenne.
Alors que l’absence de dialogue entre l’Algérie et le Maroc perdure, des hommes, des femmes, et des enfants attendent depuis cinq jours que les forces militaires des deux pays daignent leur apporter de l’eau et de la nourriture. Personne ne semble pouvoir accéder aux réfugié.e.s : ni médecin, ni HCR, ni association. Même l’eau que des résident.e.s tentent de faire parvenir depuis hier n’est jamais parvenue aux familles. La rivière toute proche est, selon les réfugié.e.s, à sec. Dans le même temps, les forces militaires ont renforcé la surveillance de la zone ces dernières heures.

Nous dénonçons les traitements inhumains et dégradants infligés par les autorités des deux pays pour des motifs territoriaux, au mépris de leurs obligations légales et morales. Et nous exhortons les autorités algériennes et marocaines à faire sortir immédiatement ces personnes de la zone hors droit où elles sont maintenues arbitrairement.

Ces autorités devraient au contraire veiller à ce que ces personnes soient traitées dignement (eau, nourriture, soins). Elles devraient par ailleurs leur donner un accès sans délai au HCR (Alger, Genève, ou Rabat) pour qu’elles soient enregistrées et puissent entamer les démarches nécessaires à leur accueil et au respect plein et entier de leurs droits dans le pays d’asile de leur choix. Ce qui comprend le droit à l’unité et à la réunification familiale. Enfin, nous demandons aux instances des Nations Unies à Genève, en particulier les bureaux du HCR mais aussi le bureau du Rapporteur Spécial des Nations Unies pour les droits de l’Homme des migrant.e.s, de maintenir leur engagement au plus haut niveau sur ce dossier compte tenu de la gravité de la situation.

Nos organisations sont outrées que cet imbroglio territorial, incarné par une militarisation croissante de la zone, conduise à en oublier les principes les plus fondamentaux non seulement du droit, mais de l’inhumanité. Cette situation, largement médiatisée et dénoncée, n’a que suffisamment duré.

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