Paris – Alger, le 17 octobre 2017 - Depuis le début du mois, plus de 500 ressortissants du Niger, Mali, Cameroun et de Côte d’Ivoire ont été arrêtés. Certaines des personnes interpellées disposeraient [1] d’un droit au séjour [2] ou seraient reconnues réfugiées sous mandat HCR. Des centaines de ces migrants auraient été enfermés au camp de Zéralda, à l’ouest d’Alger, dans des conditions très précaires [3] puis transférés à Tamanrasset, dans le Sud du pays, avant d’être abandonnés dans le désert. En application des conventions internationales ratifiées par l’Algérie, nos organisations demandent à ce que le pays mette en place un système de protection effectif pour les réfugiés, et cesse les rafles, enfermements arbitraires et expulsions collectives des migrants vivant sur son sol.
Les récentes opérations d’arrestations, enfermement et déportation vers des zones désertiques interviennent dans un contexte fortement dégradé pour les personnes étrangères en Algérie.
Le pays ne dispose pas de politique d’accueil ou de dispositions claires permettant aux personnes migrantes de régulariser leur séjour. Les personnes d’Afrique subsaharienne établies en Algérie et ne disposant pas de carte de séjour ne peuvent donc compter que sur la tolérance - toute relative - des autorités algériennes à leur égard . Depuis des années, celles-ci alternent périodes « d’accalmie » et de répression. Une tolérance qui s’est désormais faite intransigeance.
Depuis 2014, plus de 18 000 personnes ont été expulsées vers le Niger avec l’accord des autorités nigériennes. Loin de se cantonner aux seuls nigériens, ces expulsions concernent également les ressortissants d’autres pays d’Afrique subsaharienne comme en décembre 2016, où 1 200 personnes furent renvoyées.
Ces expulsions interviennent alors que le débat public sur les migrants est instrumentalisé et radicalisé. Ainsi, le Premier ministre Ahmed Ouyahia accusait publiquement en juillet 2017 les personnes migrantes d’être « une source de criminalité, de drogue et de plusieurs autres fléaux » en Algérie. Alors que le ministère des Affaires étrangères les qualifiait de « menace pour la sécurité nationale » [4]. Ces déclarations ont été suivies d’une détestable campagne xénophobe sur les réseaux sociaux, intitulée « Non aux Africains en Algérie ».
Les autorités ont par ailleurs prises des mesures coercitives pour empêcher la mobilité des personnes migrantes sur son territoire. Ainsi, le 24 septembre 2017, le ministère des transports a émis la consigne n°2016, qui interdit aux chauffeurs de bus et de taxis de transporter des « migrants illégaux ». Cette consigne a été traduite en directive – annulée depuis - par le gouvernorat de Mostaganem, qui a alors menacé de « retrait de permis de transport » tous les conducteurs qui contreviendraient à cette règle [5]. Depuis, il a été rapporté par des chauffeurs de bus et de taxi « la même version des faits : il était interdit de transporter des migrants vers le nord […]. Ceux qui n’ont pas voulu vérifier les papiers des migrants ont été menacés par les forces de l’ordre de retrait de leur autorisation de travail. » [6]
Face à ce climat délétère, les organisations signataires demandent au gouvernement algérien, en application de la Convention de l’Union Africaine régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique et de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, toutes deux ratifiées par l’Algérie, de :
– mettre en place un système de protection effectif pour les personnes en recherche de protection internationale sur son territoire
– cesser les rafles, enfermements arbitraires et expulsions collectives dont font l’objet des personnes migrantes vivant sur le sol Algérien
– garantir à toute personne sans discrimination l’accès aux transports publics et de cesser toute menace à l’encontre des chauffeurs.