En mars 2016, la Chambre des députés - chambre basse du Congrès chilien - s’était déjà prononcée contre l’interdiction totale de l’avortement instaurée en 1989 à la fin de la dictature d’Augusto Pinochet. Selon cette législation, toujours en vigueur, tout type d’avortement, même thérapeutique, est prohibé. Le Code pénal prévoit en outre des peines de prison pour les femmes qui recourent à l’avortement ainsi que pour les personnes qui le pratiquent [1]. Plusieurs organes de protection des Traités des Nations unies ont critiqué à maintes reprises ces lois drastiques et recommandé aux autorités chiliennes de prévoir des exceptions à l’interdiction générale de l’avortement [2].
Mardi 6 septembre 2016, la Commission santé du Sénat, après plusieurs mois de débats et après avoir entendu plus de 50 experts, académiques, représentants de l’église et d’organisations de la société civile, a approuvé l’idée de légiférer en ce sens et décidé de suivre l’avis de la Chambre des députés. La décision a été adoptée à trois voix contre deux, grâce au vote en faveur du projet de la sénatrice du parti des chrétiens démocrates, traditionnellement opposé au texte. Le projet introduit par Michelle Bachelet en janvier 2015 doit encore être examiné par la Commission constitutionnelle, avant de faire l’objet d’un nouveau débat devant le Sénat.
« Le processus législatif n’est pas terminé mais ce vote est encourageant. Le Chili doit maintenant adopter définitivement cette mesure. La situation des femmes chiliennes sur le plan des droits reproductifs et sexuels est dramatique et urgente. »
La présidente Michelle Bachelet devrait donner au projet un caractère urgent afin d’accélérer la procédure d’adoption et empêcher que sa discussion soit prolongée inutilement.
Si la loi est adoptée, le prochain combat sera sa mise en œuvre effective. Dans de nombreux pays à travers le monde, l’avortement est autorisé par la loi dans certains cas ou même sur demande, mais n’est pas ou peu accessible dans la pratique.
En outre, Dimitris Christopoulos, président de la FIDH, souligne que :
« même si l’adoption de cette loi serait une avancée importante, les exceptions envisagées sont tout de même très restrictives. L’interdiction même partielle de l’avortement pousse les femmes à avorter clandestinement, en mettant en danger leur santé et leur vie »
Les législations qui interdisent ou limitent l’accès à l’avortement engendrent en effet de nombreuses violations des droits des femmes et des filles en compromettant leur santé physique et mentale, leur droit à l’éducation et à la non-discrimination. L’impossibilité pour les femmes de choisir si et quand elles veulent avoir des enfants affecte aussi grandement leur participation à la vie publique et politique.