Guinée : Dégradation de l’état de santé en détention d’Oumar Sylla

Nouvelles informations
GIN 002 / 0420 / OBS 039.6
Dégradation de l’état de santé /
Détention arbitraire /
Harcèlement judiciaire /
République de Guinée
10 août 2021

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, un partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en République de Guinée.

Nouvelles informations :

L’Observatoire a été informé de la dégradation de l’état de santé en détention d’Oumar Sylla, alias Foniké Mengué, coordinateur national adjoint de Tournons La Page-Guinée [1] et responsable de la mobilisation et des antennes du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) [2].

Le 27 juillet 2021, Oumar Sylla a été évacué à l’hôpital Ignace Deen à Conakry suite à un malaise cardiaque. Les cardiologues qui l’ont examiné ont exigé son hospitalisation immédiate en raison de la dégradation avancée de son état de santé, M. Sylla souffrant de graves problèmes cardiaques et étant incapable de marcher seul. Les autorités guinéennes ont toutefois refusé son hospitalisation et ont reconduit Oumar Sylla à la prison centrale de Conakry, où il est détenu depuis le 29 septembre 2020, le soir même. Le 2 août 2021, Oumar Sylla a de nouveau été hospitalisé suite à un malaise cardiaque. Au moment de la publication de cet appel urgent, M. Sylla est toujours sous surveillance à l’hôpital Ignace Deen. Il s’agit de sa septième hospitalisation depuis janvier 2021.

L’Observatoire rappelle qu’Oumar Sylla a été violemment arrêté le 29 septembre 2020 alors qu’il s’apprêtait à participer à une manifestation organisée par le FNDC pour protester contre la candidature du Président Alpha Condé à un troisième mandat, avant d’être placé sous mandat de dépôt pour « attroupement illégal », « trouble à l’ordre public », « atteinte à la sûreté de l’État » et « destruction de bien public ». Après plusieurs interrogatoires, le juge d’instruction a finalement décidé de ne retenir que l’infraction d’ « attroupement illégal sur la voie publique » à son encontre. Après trois mois de détention provisoire, Oumar Sylla a entamé une grève de la faim le 25 décembre 2020 afin de protester contre sa détention arbitraire et de demander la tenue de son procès. Il y a mis fin le 8 janvier 2021 après que la date de son audience a été programmée. Très affaibli par sa grève de la fin, il a été hospitalisé le jour même avant d’être renvoyé en prison. Le 28 janvier 2021, le Tribunal correctionnel de Mafanco a reconnu Oumar Sylla coupable de « participation délictueuse à un attroupement susceptible de troubler l’ordre public » et l’a condamné à 11 mois de prison ferme. Les avocats de M. Sylla et le Ministère Public ont interjeté appel de cette décision. En attendant le procès en appel, deux demandes de mise en liberté provisoire ont été rejetées par le Tribunal. Le 11 juin 2021, la Cour d’appel de Conakry a condamné Oumar Sylla à trois ans de prison ferme. Les avocats d’Oumar Sylla se sont alors pourvus en cassation. Au moment de la publication de cet appel urgent, la date de son procès en cassation n’était toujours pas connue.

L’Observatoire rappelle également que le 27 août 2020, Oumar Sylla avait été libéré de la prison centrale de Conakry, où il était détenu depuis plus de quatre mois, après avoir été acquitté par le Tribunal de première instance de Dixinn des charges de « diffusion de fausses informations ». Le Procureur auprès du Tribunal de première instance de Dixinn a interjeté appel de cette décision et la première audience devant la Cour d’appel de Conakry avait été fixée au 30 septembre 2020. En raison de la nouvelle arrestation d’Oumar Sylla, cette audience n’a pas pu se tenir et a été reportée à une date encore inconnue au moment de la publication de cet appel urgent.

L’Observatoire rappelle enfin que de nombreux autres membres du FNDC font, depuis avril 2019, l’objet de menaces, d’arrestations arbitraires et de harcèlement judiciaire en raison de leur protestation pacifique contre la réforme constitutionnelle adoptée lors des élections législatives et référendaires de mars 2020, qui a permis au Président Alpha Condé de se présenter et d’être élu pour un troisième mandat présidentiel consécutif en octobre 2020. Parmi eux, MM. Abdourahamane Sanoh, Mamadou Baïlo Barry, Alpha Soumah, Abdoulaye Oumou Sow, Mamadou Bobo Bah, ainsi qu’ Ibrahima Dialloet Sékou Koundouno, qui restent tous deux sous contrôle judiciaire depuis le 13 mars 2020.

L’Observatoire exprime sa plus vive inquiétude quant à la dégradation de l’état de santé d’Oumar Sylla en détention et quant à son éventuel retour à la prison centrale de Conakry, où les mauvaises conditions de détention ont causé la mort de plusieurs opposants au cours des derniers mois. L’Observatoire appelle les autorités guinéennes à mettre en œuvre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour garantir la sécurité, l’intégrité physique et le bien-être psychologique d’Oumar Sylla ainsi que l’accès aux soins de santé dont il a besoin.

Par ailleurs, l’Observatoire dénonce la poursuite de la détention arbitraire et du harcèlement judiciaire d’Oumar Sylla, qui ne semblent viser qu’à sanctionner ses activités légitimes de défense des droits humains, et appelle les autorités guinéennes à procéder à sa libération immédiate et inconditionnelle pour raison de santé.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités guinéennes en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et le bien-être psychologique d’Oumar Sylla et de l’ensemble des défenseurs des droits humains en République de Guinée ;

ii. Procéder à la libération immédiate et inconditionnelle d’Oumar Sylla et de l’ensemble des défenseurs des droits humains arbitrairement détenus en République de Guinée ;

iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, à l’encontre d’Oumar Syllaet de l’ensemble des défenseurs des droits humains en République de Guinée, etveiller à ce qu’ils puissent exercer leurs activités sans entraves ni peur de représailles.

Adresses :

· M. Alpha Condé, Président de la République de Guinée, Twitter : @President_GN @Sekhoutoureya
· M. Ibrahima Kassory Fofana, Premier Ministre, chef du Gouvernement, Twitter : @IbrahimaKFofana @PrimatureGN
· M. Mamadou Lamine Fofana, Ministre de la Justice par intérim, Garde des sceaux, Email : contact@justice.gov.gn
· M. Mouctar Diallo, Ministre de la Jeunesse et de l’emploi jeune, Email : info@jeunesse.gouv.gn
· M. N’Famara Camara, Secrétaire général du Ministère de l’Unité nationale et de la citoyenneté, Email : jpfamara@gmail.com
· M. Ousmane Sylla, Ambassadeur de la République de Guinée à Bruxelles, Email : ambaguibruxelles@mae.gov.gn/ ambaguinee.bruxelles@yahoo.fr
· Représentation permanente de la République de Guinée auprès des Nations unies à Genève, Suisse, Eail : consulat.guineegeneve@gmail.com/ mission.guinea@ties.itu.int

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de la République de Guinée dans vos pays respectifs.

***
Paris-Genève,le10 août 2021

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, partenariat de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. La FIDH et l’OMCT sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Union européenne pour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par la société civile internationale.

Pour contacter l’Observatoire, appeler la ligne d’urgence :
· E-mail : Appeals@fidh-omct.org
· Tel FIDH : 33 1 43 55 25 18
· Tel OMCT : + 41 22 809 49 39

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