Ahmed Maher (Rigo) est en détention provisoire depuis mai 2020. Il est accusé d’avoir rejoint un groupe terroriste, d’avoir publié de fausses informations et d’avoir fait un usage abusif des réseaux sociaux. Le tribunal a prononcé sa libération dans le cadre de l’affaire no. 586/2020 en octobre 2020, mais le parquet de la sûreté de l’État a ordonné sa détention pour les mêmes charges dans le cadre d’une autre affaire, l’affaire no. 885/2020.
Abdelrahman Tarek (Moka) a purgé une peine de trois ans de prison suivie d’une libération conditionnelle après avoir participé à une manifestation contre les procès militaires pour les civil·es en août 2013. Il a été de nouveau arrêté en septembre 2019 et accusé d’avoir rejoint un groupe terroriste. Il est placé depuis en détention provisoire. En mars 2020, la Cour a ordonné sa libération et le remplacement de sa détention provisoire par des mesures de sursis. Cependant, il a fait l’objet d’une rotation (une forme de harcèlement judiciaire consistant en l’inculpation d’un·e individu·e dans plusieurs affaires à la suite, sur la base des mêmes charges) en avril 2020 sous un numéro de dossier différent. En septembre 2020, la Cour d’Assises a ordonné sa libération, mais cette décision n’a jamais été appliquée. Il a par la suite subi une « disparition forcée » de plus de 60 jours avant de re-apparaître, et d’être impliqué dans un troisième dossier, accusé des mêmes charges, l’affaire no.1056/2020. En fin d’année 2020, il a commencé une grève de la faim pour protester contre sa détention prolongée sans procès. Après 53 jours, sous la pression des autorités pénitentiaires et devant la rapide dégradation de son état de santé, il a été contraint d’y mettre un terme.
Galal El Beheriy a été arrêté le 3 mars 2018 et a disparu pendant une semaine avant de reparaître sous les accusations d’affiliation terroriste, diffusion de fausses informations, usage abusif des réseaux sociaux, blasphème, outrage religion et insultes à l’armée. Il a été torturé et battu durant sa disparition. Le 31 juillet 2018, il a été condamné à trois ans de prison et à une amende de 10,000 EGP (livres égyptiennes) pour sa poésie, accusée d’insulter l’armée et de diffuser de fausses informations.
Les forces de sécurité ont arrêté Dr Walid Shawky dans sa clinique du Caire le 14 octobre 2018. Il a par la suite subi une disparition forcée de six jours. Shawky est réapparu au parquet de la sûreté de l’État, où il était accusé d’avoir rejoint un groupe terroriste et de publier de fausses informations dans l’affaire no. 621/2018. En août 2020, la Cour d’Assises l’a libéré dans le cadre de cette affaire. Cependant, le parquet de la sûreté de l’État a ordonné par la suite sa détention sur la base des mêmes charges dans le cadre d’une autre affaire, l’affaire no. 880/2020.
Le Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations unies a souligné un « problème systémique concernant la détention arbitraire en Égypte », ajoutant que « dans certaines circonstances, l’emprisonnement généralisé et systématique, ainsi que d’autres privations de libertés en violation du droit international pouvait constituer des crimes contre l’humanité ».
Il y a des dizaines de milliers d’individus arbitrairement détenus en Égypte, parmi lesquels des activistes, figures politiques, étudiant·es, avocat·es, membres d’organisations de la société civile, défenseur·es des droits humains (HRD), y compris des femmes défenseures des droits humains (WHRD), proches d’opposant·es politiques et de défenseur·es des droits humains vivant à l’étranger, femmes influenceuses sur les réseaux sociaux, ainsi que des individus critiques des conditions politiques, économiques ou sociales.
Les individus suivants font partie de ceux et celles qui se trouvent en détention arbitraire. Certain·es ont été condamné·es, mais la plupart sont en détention provisoire :
– Abdel Moneim Aboul-Fotouh (politicien)
– Abdel Rahman Tarek Mokka (défenseur des droits humains)
– Ahmed Allam (journaliste)
– Ahmed Amasha (vétérinaire, activiste environnemental, défenseur des droits humains et syndicaliste)
– Ahmed Badawy
– Ahmed Douma (activiste et écrivain), condamné par la Cour d’Assises
– Ahmed Maher (Rigo)
– Ahmed Sebei (journaliste)
– Ahmed Mohy
– Ahmed Samir Santawi, condamné par la Emergency State Security Court
– Ahmed Tammam (défenseur des droits humains)
– Aisha El Shater (défenseure des droits humains)
– Alaa Abdel Fattah (défenseur des droits humains et blogueur), condamné par Emergency State Security Court
– Alaa Essam (défenseur des droits humains)
– Amr Imam (défenseur des droits humains et avocat)
– Anas al-Beltagy
– Amr Nohan (défenseur des droits humains et avocat)
– Ayman Abdel Moaaty (chercheur)
– Azoz Mahgoub (avocat)
– Bahaa Eldin Ibrahim (journaliste)
– Bader Mohamed (journaliste)
– Dawlat Yehia
– Ezzat Ghoneim (défenseur des droits humains et avocat)
– Gaffer al-Zaafarani, condamné par la Cour d’Assises
– Galal El Beheriy (poète), condamné par la Cour militaire
– Haytham Mohammadein (défenseur des droits humains et avocat)
– Hamdy El-Zaime (journaliste)
– Haneen Hossam (créatrice de contenu en ligne), condamnée par la Cour d’Assises
– Hassan Barbari (défenseur des droits humains)
– Hassan Mostafa
– Hisham Abdelaziz (journaliste)
– Hisham Fouad (journaliste), condamné par Emergency State Security Court
– Houssam Moanis (journaliste), condamné par Emergency State Security Court
– Hoda Abdel Moneim (défenseure des droits humains et avocate)
– Hossam Khalaf
– Hussein Khamis Mohammed Chabel
– Ibrahim Ezz el-Din (défenseur des droits humains)
– Ibrahim Metwaly (défenseur des droits humains et avocat)
– Ismail Alexandrani (journaliste), condamné par la Cour militaire
– Kholoud Saied Amer
– Marwa Arafa
– Moaatez AbdelWahab (producteur)
– Mohamed Adel (défenseur des droits humains)
– Mohamed El Baqer (défenseur des droits humains et avocat), condamné par Emergency State Security Court
– Mohammed al-Qassas (activiste et politicien)
– Mohamed Ibrahim Radwan « Oxygen » (défenseur des droits humains et journaliste / blogueur), condamné par Emergency State Security Court
– Mohamed Mohieldin
– Mohamed Saied Fahmy (journaliste)
– Mohamed Ramadan (défenseur des droits humains et avocat)
– Mohamed Salah (journaliste)
– Mostafa Gamal
– Mawadda al-Adham (créatrice de contenu en ligne), condamnée par la Cour d’Assises
– Nermeen Hussein (blogueuse)
– Omar El Shenety (économiste)
– Radwa Mohamed Farid
– Safwan Thabet
– Salah Soltan, condamné par la Cour d’Assises
– Seif Fateen (professeur d’ingénierie)
– Said Abdellah (journaliste)
– Seif Thabet
– Tawfiq Ghanem (journaliste)
– Walid Shawky (dentiste et activiste)
– Zyad El-Elaimy (avocat des droits humains et politicien), condamné par Emergency State Security Court
Les procédures spéciales des Nations unies ont soulevé de graves préoccupations concernant les conditions de détention inhumaines, notamment le refus des visites familiales, le manque d’accès aux avocat·es et les soins médicaux inadéquats qui ont conduit ou contribué à des décès en détention. Elles ont exhorté l’Égypte à « remédier rapidement à ces conditions de détention et à inverser ce qui semble être des pratiques profondément ancrées qui portent gravement atteinte au droit à la vie, au droit de ne pas être soumis à une détention arbitraire, au droit de ne pas être soumis à la torture ou à des mauvais traitements, au droit à une procédure régulière et à un procès équitable, ainsi qu’à des soins médicaux adéquats ».
Les femmes détenues sont confrontées à la torture et aux violences sexistes en détention, commises par les autorités en toute impunité. Les procédures spéciales de l’ONU et le Comité CEDAW se sont inquiétés de l’absence de mesures spécifiques répondant aux besoins des femmes détenues, du refus d’accès aux installations et au matériel nécessaires pour répondre aux besoins des femmes en matière d’hygiène personnelle, de l’absence de mécanismes de recours et d’obligation de rendre des comptes pour les victimes de violences sexistes et sexuelles, de l’absence de soins médicaux et du manque d’hygiène dans les prisons, ainsi que du recours aux fouilles à nu et à l’isolement cellulaire prolongé en guise de punition.
Le 12 mars 2021, 31 États du Conseil des droits de l’homme des Nations unies ont exhorté l’Égypte à mettre fin à la persécution des militant·es, des journalistes et des opposant·es politiques, ont demandé à l’Égypte de les libérer sans condition et ont exhorté le pays à mettre fin à la « pratique consistant à impliquer des détenu·es à de nouvelles affaires portant des charges similaires après l’expiration du délai légal de détention provisoire » (rotation). Un an plus tard, l’Égypte n’a pas répondu à ces appels.
Nous exhortons l’Égypte à :
– libérer immédiatement et sans condition toute personne détenue pour avoir exercé pacifiquement ses droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion, ainsi que son droit de défendre les droits humains ;
– libérer les autres personnes détenues arbitrairement, y compris celles placées en détention provisoire prolongée sans possibilité de contester la légalité de leur détention ;
– cesser la pratique consistant à inculper des accusé·es dans de nouvelles affaires sur la base du même ensemble de faits, communément appelée rotation ;
– protéger les personnes détenues contre la torture et autres mauvais traitements et leur garantir un lien régulier avec leurs familles, leurs avocat·es de leur choix et l’accès à des soins médicaux adéquats, y compris dans le contexte de la pandémie de COVID-19 ;
– annuler immédiatement les verdicts injustes prononcés, abandonner toutes les charges et mettre fin immédiatement aux procès en cours contre les personnes détenues arbitrairement dont les dossiers ont été transmis aux tribunaux d’exception avant la levée de l’état d’urgence.
Nous demandons instamment aux États et à la société civile d’être solidaires de toutes les personnes détenues arbitrairement en Égypte, et exhortons l’Égypte à les libérer immédiatement et sans condition et à leur fournir des réparations complètes et adéquates pour la privation arbitraire de leur liberté et les autres préjudices subis.