Djibouti : Libération de M. Osman Yonis Bogoreh et poursuite de la disparition forcée de M. Said Abdilahi Yassin

30/10/2019
Appel urgent

Nouvelles informations
DJI 001 / 1019 / OBS 087.1
Détention arbitraire / Détention au secret
Libération / Torture
Djibouti
30 octobre 2019

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, un partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence dans la situation suivante à Djibouti.

Nouvelles informations :

L’Observatoire a été informé par la Ligue djiboutienne des droits humains (LDDH) de la libération et des actes de torture pendant la détention de M. Osman Yonis Bogoreh, journaliste travaillant notamment sur des cas d’exactions par la police djiboutienne, ainsi que de la poursuite de la détention arbitraire et au secret de M. Said Abdilahi Yassin. Tous deux sont militants de la deuxième fédération du Mouvement pour le Renouveau démocratique et le développement (MRD), le principal parti d’opposition, et membres de la Ligue djiboutienne des droits humains (LDDH).

Selon les informations reçues, le 26 octobre 2019 à 1 heure du matin, M. Osman Yonis Bogoreh a été libéré par la police. M. Osman Yonis Bogoreh souffre des violences subies pendant sa détention. Il a notamment raconté avoir été battu au moment de son arrestation à Djibouti, puis conduit hors de la capitale, près de la localité de Goubetto, où il a été détenu dans des conditions inhumaines : sans accès à l’alimentation et à l’eau potable, il a été attaché à un arbre la nuit et menotté et caché dans une cabane en tôle la journée. Il a été à plusieurs reprises battu à coups de pieds, de tête et de crosse. Le lieutenant qui le gardait l’a également fait se déshabiller et l’a filmé nu, le menaçant de diffuser cette vidéo s’il venait à parler de ses conditions de détention une fois libre.

Selon les mêmes informations, M. Said Abdilahi Yassin a été détenu détenu au secret, sans accès à sa famille ou son avocat, à l’académie de police de Nagad, en périphérie de la capitale. Il aurait été depuis transféré vers un lieu inconnu.

MM. Osman Yonis Bogoreh et Said Abdilahi Yassin ont tous deux été arrêtés dans la nuit du 24 octobre 2019 et ensuite portés disparus pendant plus de 24 heures (voir rappel des faits).

L’Observatoire se félicite de la libération de M. Osman Yonis Bogoreh, mais rappelle que celui-ci n’aurait jamais du être arrêté en premier lieu et que sa détention était arbitraire, car ne visant qu’à sanctionner ses activités légitimes de défense des droits humains. L’Observatoire condamne fermement les actes de torture subis par M. Bogoreh ainsi que la poursuite de la détention arbitraire de M. Said Abdilahi Yassin.

L’Observatoire appelle les autorités djiboutiennes à offrir à M. Said Abdilahi Yassin un accès immédiat à son avocat et sa famille, effectuer une enquête transparente, indépendante, effective et rigoureuse quant aux allégations de torture à l’encontre de M. Osman Yonis Bogoreh, afin d’en identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi, ainsi qu’à mettre un terme à tout acte de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, contre MM. Osman Yonis Bogoreh et Said Abdilahi Yassin, et l’ensemble des défenseurs des droits humains à Djibouti.

Rappel des faits :

Le 24 octobre 2019 aux alentours de 22h, M. Osman Yonis Bogoreh a été arrêté par des policiers en civil dans une rue de la capitale, Djibouti. Selon des témoins oculaires, M. Osman Yonis Bogoreh a été violemment battu par les policiers au moment de son arrestation. Malgré des tentatives pour le localiser dans les lieux habituels de détention à Djibouti, le lieu de détention de M. Osman Yonis Bogoreh est resté inconnu pendant plus de 24 heures. Ni eau, ni repas n’ont donc pu lui être apportés. Et il n’a pas eu accès à son avocat ou à un médecin. Récemment, M. Osman Yonis Bogoreh enquêtait en tant que journaliste sur un cas de viol collectif de plusieurs policiers sur des femmes d’origine éthiopienne. Il avait contacté la rédaction de la radio La Voix de Djibouti (LVD) lorsqu’il avait appris par des amis qu’il était recherché par la police.

Le même jour, M. Said Abdilahi Yassin, ami de M. Osman Yonis Bogoreh et militant avec lui, a également été arrêté dans une rue de la capitale, par des policiers en tenue. Son lieu de détention est également resté inconnu pendant plus de 24 heures.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités djiboutiennes en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et le bien-être psychologique de MM. Osman Yonis Bogoreh et Said Abdilahi Yassin ;

ii. Fournir à M. Said Abdilahi Yassin un accès immédiat à son avocat, sa famille et une attention médicale ;

iii. Libérer de façon immédiate et inconditionnelle M. Said Abdilahi Yassin, ainsi que l’ensemble des défenseurs des droits humains arbitrairement détenus à Djibouti ;

iv. Mener sans délais une enquête exhaustive, indépendante, effective, rigoureuse, impartiale et transparente quant aux allégations de torture à l’encontre de M. Osman Yonis Bogoreh décrites ci-dessus, afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial conformément aux instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;

v. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de MM. Osman Yonis Bogoreh et Said Abdilahi Yassin, ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits humains à Djibouti ;

vi. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à ses articles 1 et 12.2 ;

vii. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par Djibouti.

Adresses :
• Son Excellence Ismail Omar Guelleh, Président de la République, République de Djibouti. Fax : 00 253 21 35 02 01
• M. Ali Hassan, Ministre de la Justice, des affaires pénitentiaires, chargé des droits de l’Homme, République de Djibouti. Fax : 00 253 21 35 54 20
• M. Id Ahmed, Procureur de la République, Fax : 00 253 21 35 69 90, Email : likmik@caramail.com
• S.E. Mohamed Siad Doualeh, Ambassadeur, Mission permanente de Djibouti auprès de l’Office des Nations unies à Genève, Suisse, Fax : + 41 22 749 10 91, Email : mission.djibouti@djibouti.ch
• M. Omar Abdi Said, Ambassadeur de Djibouti auprès des Pays du Benelux et de l’Union Européenne, Belgique, Fax : + 32 2 347 69 63 ; Email : ambdjib@yahoo.be

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de Djibouti dans vos pays respectifs.

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Paris-Genève, le 30 octobre 2019

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toute action entreprise en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire partenariat de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. La FIDH et l’OMCT sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Union européenne pour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par la société civile internationale.

Pour contacter l’Observatoire, appeler la ligne d’urgence :
• E-mail : Appeals@fidh-omct.org
• Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80
• Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

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