Algérie : Arrestation arbitraire et harcèlement judiciaire contre Salim Yezza

05/10/2018
Appel urgent

ALG 001 / 1018 / OBS 120
Détention arbitraire /
Condamnation /
Algérie
5 octobre 2018

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, un partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir dans la situation suivante en Algérie.

Description de la situation :

L’Observatoire a été informé de sources fiables de l’arrestation arbitraire et du harcèlement judiciaire à l’encontre de M. Salim Yezza, militant de la cause berbère algérien. Engagé dans plusieurs mouvements de la société civile, il a toujours dénoncé la répression de la police algérienne et les violences contre les berbères, milité pour les droits des berbères et dénoncé les violences inter-communautaires.

Selon les informations reçues, le 7 août 2017, M. Salim Yezza a été condamné à un an de prison avec sursis et 100.000 Dinars (environ 720 EUR) d’amende pour « incitation à la haine et à l’attroupement », au titre de l’article 295 bis du Code pénal. La défense de M. Salim Yezza a fait appel de cette décision. Le procès en appel de M. Salim Yezza se tiendra en octobre 2018 devant la Cour d’appel de Ghardaïa.

M. Salim Yezza a été arrêté le 14 juillet 2018 à l’aéroport de Biskra alors qu’il s’apprêtait à rentrer en France, où il réside depuis 2011. Il a ensuite été transféré à la prison de ? Ghardaïa. M. Salim Yezza s’était rendu en Algérie le 3 juillet 2018 pour assister aux obsèques de son père. Les poursuites à l’encontre de M. Salim Yezza ont été engagées par le Parquet le 8 avril 2018. Son arrestation s’est faite sur la base d’un mandat d’arrêt émis par le procureur de Ghardaïa le 10 juillet 2018 pour « incitation à la haine et à l’attroupement ».

Selon nos informations, cette accusation serait liée à des déclarations publiques faites sur Facebook par M. Salim Yezza le 15 janvier 2014 suite à des affrontements inter-communautaires qui ont fait plusieurs morts dans la ville de Ghardaïa. Néanmoins, selon la loi algérienne, ces accusations auraient déjà dû être prescrites, puisque plus de quatre ans ont écoulé entre les faits et l’arrestation. Dans ces déclarations, M. Salim Yezza dénonce la passivité de ses compatriotes face à la répression policière contre les mozabites et au drame de Ghardaïa[1]. Il dénonce également la violence et les discriminations dans toutes leurs formes, parle du vivre ensemble entre Algériens, tout en dénonçant l’instrumentalisation de la religion et de l’islam.

M. Salim Yezza a été présenté le 24 juillet 2018 devant le Tribunal correctionnel de Ghardaïa, audience au cours de laquelle le Procureur a requis deux ans de prison ferme et une amende de 100,000 Dinars à son encontre pour « incitation à la haine et à l’attroupement ». Lors de l’audience en délibéré du 31 juillet, le verdict a été renvoyé au 7 août 2018.

L’Observatoire exprime ses plus vives inquiétudes quant à l’arrestation arbitraire de M. Salim Yezza, qui ne vise qu’à sanctionner ses activités pacifiques et légitimes de défense des droits humains et appelle les autorités à garantir le respect de son droit à un procès équitable au cours de l’ensemble des procédures engagées à son encontre.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités algériennes en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Salim Yezza et de l’ensemble des défenseurs des droits humains en Algérie ;

ii. Abandonner toutes les charges à l’encontre de M . Salim Yezza et annuler la sentence de condamnation à son égard ;

iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de M. Salim Yezza ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits humains en Algérie ;

iv. S’assurer que l’ensemble des procédures engagées à l’encontre de M. Salim Yezza soient conduites dans le respect du droit à un procès équitable ;

v. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à ses articles 1, 5 (b) et 12.2 ;

vi. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par l’Algérie.

Adresses :
· M. Abdelaziz Bouteflika, Président de l’Algérie, Fax : +213 21 69 15 95
· M. Ahmed Ouyahya , Premier Ministre, Fax : +213 21 28 38 37
· M. Nouredine Bedoui, Ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Email : webmaster@interieur.gov.dz
· M. Tayeb Louh, Ministre de la Justice, Fax : +213 21 92 17 01, E-mail : contact@mjustice.dz
· M. Boudjemâa Delmi, Ambassadeur, Représentation Permanente de la République d’Algérie aux Nations Unies à Genève, Suisse, Fax : +32 22 774 30 49, E-mail : contact@mission-algeria.ch

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques d’Algérie dans vos pays respectifs.

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Paris-Genève, le 5 octobre 2018

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toute action entreprise en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire partenariat de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. L’OMCT et la FIDH sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Union européenne pour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par la société civile internationale.

Pour contacter l’Observatoire, appeler la ligne d’urgence :
· E-mail : Appeals@fidh-omct.org
· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80
· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

[1] Entre décembre 2013 et le premier semestre 2014, de violents affrontements inter-communautaires (entre Berbères et Arabes) ont fait plusieurs morts et des centaines de blessés dans la ville de Ghardaïa.

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