Le Général Dabira se dérobe à une convocation de la justice française

Convoqué et attendu ce matin par les juges d’instruction de Meaux, le général congolais Norbert Dabira, a préféré se soustraire à la justice française.

Norbert Dabira devait aujourd’hui répondre de ses actes suite aux plaintes avec constitution de partie civile déposées par plusieurs victimes et par la FIDH, la LDH et l’OCDH pour crimes contre l’humanité, disparitions forcées et torture dans l’affaire dite du " Beach ", où des centaines de réfugiés congolais ont été tués en 1999, de retour d’exil.
L’absence de Dabira ce matin semble un aveu de culpabilité non seulement du Général, mais aussi des plus hautes autorités congolaises qui, par la voie d’un communiqué de presse du porte-parole du gouvernement en date du 10 septembre 2002, soutiennent cette dérobade en affirmant que " Monsieur Norbert DABIRA, haut fonctionnaire congolais, ne peut pas se présenter devant ce tribunal, étant entendu que la procédure diligentée par le juge d’instruction du Tribunal de Grande Instance de Meaux, manque de fondement juridique ". Nos organisations soulignent la contradiction des autorités congolaises qui déclaraient encore il y a peu qu’elles ne pouvaient craindre de telles convocations.
La FIDH, la LDH et l’OCDH condamnent cette attitude du gouvernement congolais, ainsi que son immixtion dans le déroulement d’une affaire judiciaire, et confirment la capacité de la juridiction française d’instruire une telle affaire notamment sur le fondement de la compétence universelle pour les crimes de torture commis à l’étranger par un étranger, dès lors que l’auteur présumé est trouvé sur le territoire français, ce qui est le cas en l’espèce.
Ce comportement confirme la volonté du gouvernement congolais d’utiliser tous les artifices pour éviter que la procédure en France n’aboutisse. Nos organisations avaient déjà vivement réagi face à la mascarade de procès monté de toutes pièces à Brazzaville postérieurement à la procédure en France et en réaction à celle-ci. Une telle manœuvre ne saurait éteindre l’action de la justice française, d’autant que l’indépendance du pouvoir judiciaire au Congo est illusoire.
Nos organisations rappellent que, conformément à la procédure pénale en France, l’instruction doit se poursuivre et un mandat d’amener doit être délivré pour que le Général Dabira, qui ne peut invoquer aucune immunité, se présente devant les juges. Au cas où il ne se présenterait toujours pas, il est attendu de la justice française qu’elle décide d’une mise en examen assortie d’un mandat d’arrêt international.

Rappel des faits :

Mai 1999 : des milliers de Congolais qui avaient fui les combats faisant rage à Brazzaville depuis 1998 décident de retourner dans la Capitale congolaise, en profitant d’un couloir humanitaire placé sous les auspices du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR).
De sources concordantes, plus de trois cent cinquante cas de disparitions auraient été recensées au cours de ce retour d’exil. Pour la seule journée du 14 mai 1999, plus de 200 personnes auraient ainsi disparu.
Les plaintes ont pour fondement juridique la compétence universelle des juridictions françaises, pour les crimes de torture, disparitions forcées et crimes contre l’humanité (article 212-1 du Code Pénal, article 689-1 et 689-2 du Code de Procédure Pénale et Convention contre la torture de 1984 ratifiée par la France).
Lors du dépôt de la plainte, les parties civiles avaient précisé que le Général Norbert Dabira était localisé en France, où il dispose d’une résidence. Les juridictions françaises sont compétentes pour connaître des crimes de torture commis à l’étranger par un étranger, dès lors que l’auteur présumé est trouvé sur le territoire français.
Nos organisations se félicitent que dans ces affaires, une instruction ait été rapidement ouverte.
Cette affaire représente, pour les ONG, mais avant tout pour les victimes, une étape essentielle de la lutte contre l’impunité des crimes les plus graves. Cette procédure pourrait mettre fin à la spirale de l’impunité, qui engendre la violence et perpétue les violations des droits humains.

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