La FIDH et l’OMCT, sous l’égide de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, condamnent sans équivoque la condamnation prononcée aujourd’hui contre Oyub Titiev par le tribunal municipal de Shali pour "possession de marijuana à grande échelle" (Article 228(2) du Code pénal russe).
La procédure pénale engagée contre M. Titiev, détenu depuis son arrestation le 9 janvier 2018, constitue une parodie de justice et a pour seul but d’humilier et de punir Titiev pour ses activités en faveur des droits humains. La décision d’aujourd’hui, qui a été observée par l’Observatoire et IPHR, constitue également une mise en garde pour les autres défenseurs des droits humains : ils doivent garder le silence ou assumer les conséquences de leurs prises de positions.
"Il est épouvantable qu’un tribunal local puisse condamner un défenseur de haut niveau en violation de toutes les normes d’un procès équitable, en dépit de l’attention considérable qu’il reçoit aux niveaux local et international. On ne peut qu’imaginer à quoi ressemble l’administration de la justice dans les affaires "ordinaires", qui n’attirent pas autant l’attention”
Accusations fabriquées et procès inéquitable
Le 9 juillet 2018, le procès de M. Titiev s’est ouvert devant le juge Zainetdinova du tribunal municipal de Shali. Lors de chaque audience, Titiev était assis dans une cage métallique au milieu de la salle d’audience, une pratique que la Cour européenne des droits de l’Homme a condamnée à plusieurs reprises comme constituant un traitement inhumain et dégradant.
Le procès de Titiev a été rempli de violations aux normes du procès équitable. Avant le début du procès, le dirigeant tchétchène, Ramzan Kadyrov, a publiquement affirmé que Titiev était un consommateur de drogue, violant ainsi la présomption d’innocence de l’accusé. Au cours de ce procès de huit mois, le juge Zainetdinova a refusé les requêtes répétées de la défense pour contraindre une enquête sur des allégations bien étayées selon lesquelles de la marijuana avait été implantée dans la voiture de Titiev. En fait, le juge a rejeté toutes les requêtes des avocats de Titiev, sauf deux, sur plus de trente, contestant les preuves fabriquées par l’accusation.
"Le procès d’Oyub Titiev était une complète parodie de justice, rappelant les procès-spectacles de l’ère Staline. Et comme à l’époque, le but n’était pas tant de punir que d’humilier. C’est précisément pour cette raison que les autorités ont dépeint et inculpé Oyub comme un drogué - Kadyrov l’a qualifié à plusieurs reprises de "drogué" - pour qu’Oyub perde non seulement sa liberté mais aussi son honneur - ce qui est très important dans la société tchétchène,”
Harcèlement systématique des défenseurs des droits humains en Tchétchénie
Oyub Titiev travaille pour Memorial depuis 2001. Après l’assassinat de Natalia Estamirova en 2009, il est devenu le chef du bureau de Grozny de Memorial, l’une des organisations russes de défense des droits humains les plus anciennes et des plus respectées, et la dernière ONG de droits humains ayant un bureau en Tchétchénie.
"Ce procès absurde pourrait bien marquer la fin des activités de Memorial en Tchétchénie. Peut-être plus important encore, il a le potentiel d’achever le plan d’éradication des défenseurs des droits humains de Tchétchénie de Kadyrov, éliminant ainsi le dernier obstacle aux abus commis par les autorités,”
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L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme (l’Observatoire) a été créé en 1997 par l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et la FIDH. L’objectif de ce programme est d’intervenir pour prévenir ou remédier aux situations de répression à l’encontre des défenseurs des droits humains. L’OMCT et la FIDH sont toutes deux membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme des défenseurs des droits humains de l’Union européenne mis en place par la société civile internationale.
Le Partenariat international pour les droits de l’homme (IPHR selon son sigle en anglais) est une organisation non gouvernementale indépendante fondée en 2008. Basé à Bruxelles, l’IPHR travaille en étroite collaboration avec des groupes de la société civile de différents pays pour soulever les questions relatives aux droits humains au niveau international et promouvoir le respect des droits des communautés vulnérables.
Pour de plus d’informations, veuillez contacter :
OMCT : Iolanda Jaquemet / Roemer Lemaitre : + 41 79 539 41 06 / + 41 22 809 49 39
FIDH : Eva Canan : + 33 6 48 05 91 57
IPHR : Simon Papuashvili : +32 494 75 39 42