Un observateur au procès de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme refoulé à l’aéroport de Tunis

28/01/2001
Communiqué

Aujourd’hui dimanche 28 janvier 2001, Me Eric Plouvier, avocat au Barreau de Paris, mandaté par l’Observatoire pour la Protection des droits de l’Homme (programme conjoint de la FIDH et de l’OMCT) et le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme pour observer le procès de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH), qui doit s’ouvrir lundi 29 janvier, s’est vu interdire l’accès au territoire tunisien dès son arrivée à l’aéroport de Tunis.

Me Plouvier a été empêché de passer le poste de contrôle de police, sans aucun motif et en l’absence de tout cadre légal. Me Plouvier a demandé une notification écrite de cette interdiction, qui lui a été refusée.

Avant même son départ, Me Plouvier avait fait l’objet de pressions et d’intimidations de la part des représentants des autorités tunisiennes à Paris.

Me Plouvier avait déjà effectué plusieurs missions d’observations judiciaires en Tunisie pour l’Observatoire ; il s’était notamment rendu à Tunis en décembre 2000 pour observer le procès du Professeur Moncef Marzouki et la première audience du procès de la Ligue tunisienne.

L’Observatoire rappelle qu’en juillet 2000, le Président de la FIDH, Patrick Baudouin, ainsi que deux représentants d’Amnesty international, s’étaient déjà vu interdire l’accès au territoire tunisien dans les mêmes conditions, alors qu’ils devaient effectuer une mission de contact avec les défenseurs des droits de l’Homme tunisiens.

Le procès de la Ligue tunisienne qui s’ouvre demain constitue un enjeu majeur pour son avenir et plus généralement pour la survie du mouvement des droits de l’Homme en Tunisie. Interdire la présence d’Eric Plouvier en tant qu’observateur judiciaire est un élément de plus tendant à montrer que ce procès a été monté de toutes pièces, afin de faire obstacle aux activités de la ligue.

L’Observatoire condamne fermement cette mesure de refoulement, qui s’inscrit en flagrante violation de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et notamment de son article 9.3.b qui stipule que " chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, d’assister aux audiences, procédures et procès publics, afin de se faire une opinion sur leur conformité avec la législation nationale et les obligations et engagements internationaux applicables ".

Cette mesure illustre une nouvelle fois le décalage flagrant entre le discours des autorités tunisiennes sur les droits de l’Homme et l’Etat de droit, et la situation réelle sur le terrain. Force est ainsi de constater qu’un pas supplémentaire vient d’être franchi dans la stratégie de répression mise en place par les autorités tunisiennes visant à museler toute opinion divergente. C’est en effet la première fois qu’un observateur judiciaire international est interdit d’entrée en Tunisie, celle-ci se plaçant ainsi au rang des rares Etats refusant la venue de tels observateurs sur leur territoire.

L’Observatoire attire l’attention des organes des Nations unies et du partenariat euro-méditerranéen sur cette inquiétante dérive des autorités tunisiennes, en les invitant à prendre toutes mesures appropriées face à un régime de plus en plus policier.

L’Observatoire réaffirme enfin sa totale solidarité avec les défenseurs des droits de l’Homme tunisiens, victimes, au quotidien, d’un harcèlement systématique de la part des autorités tunisiennes et objets de poursuites judiciaires arbitraires visant clairement à empêcher le libre exercice de leurs activités en faveur de la démocratie et de l’Etat de droit.

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