Monsieur le Président Zine El Abidine Ben Ali, Président de la République Tunisienne

22/01/2002
Communiqué

Monsieur le Président de la République,

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) a l’honneur de s’adresser à vous au sujet de la situation de Monsieur Mohamed Moadda, qui suscite de très vives inquiétudes et porte gravement atteinte aux engagements internationaux de la Tunisie dans le domaine des droits de l’Homme.

Président du Mouvement des Démocrates Socialistes (MDS), M. Moadda fait l’objet ainsi que sa famille depuis le mois de septembre 1995 d’une répression et d’un harcèlement constants. Récusé par les autorités tunisiennes de sa qualité légale de dirigeant du MDS, emprisonné et condamné à 11 ans de prison ferme à l’issue d’un procès politique dont tous les observateurs ont constaté le caractère préfabriqué et non équitable, M. Mohamed Moadda a été libéré le 30 décembre 1996 dans le cadre d’une mesure de mise en liberté conditionnelle.
Durant les cinq années qui ont suivi, M. Mohamed Moadda a été confronté à un harcèlement et une répression systématiques. Professeur d’université, il a été mis d’office en retraite anticipée et il a fait l’objet à plusieurs reprises de mesures d’assignation à résidence et d’interpellations qui ont gravement affecté sa situation familiale. L’état de santé de son épouse s’en est trouvée fragilisé de façon inquiétante. Les pressions se sont multipliées pour priver ses enfants de travail.

Le 19 juin 2001, M. Mohamed Moadda a été arrêté à la suite de la décision de retrait de la mesure de mise en liberté conditionnelle dont il avait bénéficié le 30 décembre 1996. Privé du contact de ses avocats et détenu à la prison civile de Tunis, M. Moadda estime non sans raison que cette décision équivaut à une véritable séquestration sous couvert d’une "lettre de cachet" qui l’oblige à purger le reste de la peine de 11 ans de prison ferme à laquelle il avait été condamné en 1996. C’est donc pour plus de neuf ans et demi qu’il est de nouveau emprisonné, ce qui à l’évidence, ne vise qu’à sanctionner ses prises de positions politiques et les interventions qu’il a faite notamment sur la chaîne de T.V. "Al Mustaquellah" qui émet à partir de Londres.
M. Mohamed Moadda a entamé une grève de la faim le 14 janvier 2002 pour protester contre son incarcération. Il a été contraint d’y mettre un terme le lundi 21 janvier 2002 compte tenu de la dégradation de son état de santé notamment un début d’hémorragie lié à son ulcère de l’estomac. Dans le même temps deux de ses fils et son épouse avaient décidé de se joindre à cette grève de protestation, Madame Moadda s’exposant à des risques majeurs compte tenu de la précarité de son état de santé.

Face à cette situation très préoccupante, la FIDH appelle les autorités tunisiennes à se conformer à leurs engagements internationaux en libérant de manière inconditionnelle et immédiate M. Mohamed Moadda.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma haute considération.

Sidiki KABA

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