Menaces de mort / entraves à la liberté de réunion - TUN 001 / 0105 / OBS 007

21/01/2005
Appel urgent

L’Observatoire a été informé par le Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) de nouveaux actes de harcèlement et de nouvelles entraves à la liberté de réunion à l’encontre de ses membres.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la FIDH et de l’OMCT, vous prie de bien vouloir intervenir de toute urgence à propos de la situation suivante en Tunisie.

Description des faits :

Selon les informations reçues, Me Raouf Ayadi, avocat, membre et ancien secrétaire général du CNLT, a reçu, le 18 janvier 2005, un appel anonyme le menaçant de mort s’il ne se dessaisissait pas de l’affaire du Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDLT, parti d’opposition), dans laquelle il défend M. Mustapha Ben Jaafar, secrétaire général du FDTL.

De plus, le 15 janvier 2005, Me Ayadi a été insulté et menacé par un délinquant, dans le cadre d’une affaire civile, en présence d’un commissaire de police qui a par la suite refusé de dresser un procès-
verbal, malgré la demande expresse de Me Ayadi.
En outre, début janvier, Me Ayadi a été informé, par courrier, de la résiliation sans préavis du contrat de location de son cabinet, sans que le motif de cette décision ne lui soit communiqué. A ce jour, Me Ayadi est toujours menacé d’expulsion.
L’Observatoire rappelle que Me Raouf Ayadi fait l’objet de menaces et d’actes de harcèlement récurrents depuis plusieurs années, à l’instar de nombreux avocats militants des droits de l’Homme en Tunisie. Ses déplacements et son cabinet sont constamment surveillés, et sa clientèle est régulièrement soumise à des actes d’intimidation par les forces de l’ordre. En novembre 2003, Me Ayadi a fait constater par le Conseil de l’ordre cette surveillance permanente et a porté plainte contre le ministère de l’Intérieur pour entrave à ses activités professionnelles. Toutefois, aucune suite n’a jamais été donnée à cette affaire.

En outre, selon les informations reçues, le siège du CNLT, situé rue Abou Dhabi, à Tunis, a été encerclé par un important dispositif policier à l’occasion de son assemblée générale le 16 janvier 2005. Les forces de l’ordre ont en effet quadrillé le quartier et ont fait savoir aux militants qu’elles avaient reçues des instructions fermes pour interdire la réunion de cette association, et ce par tous les moyens.
La tenue de l’assemblée générale du CNLT avait été reportée au 16 janvier suite à la dispersion violente de membres du CNLT par les forces de l’ordre le 11 décembre 2004. A cette date, les membres du CNLT ont en effet été empêchés de se réunir au siège de leur organisation par un dispositif de près de 150 policiers. Ces derniers ont tenté d’empêcher les activistes d’accéder aux locaux en les agressant verbalement et physiquement, avant de les disperser violemment. A cette occasion, M. Mongi Ben Salah, syndicaliste et vice président de la section Monastir de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH), a été traîné sur plusieurs dizaines de mètres, insulté et roué de coups au visage et au ventre. MM. Lofti Hidouri et Nourredine Ben Ticha, trésoriers du comité de liaison du CNLT, ont été violemment frappés. Mme Sihem Bensedrine, porte-parole du CNLT, et M. Ahmed Kilani, membre, ont été bousculés, alors qu’ils tentaient de s’interposer. De plus, les victimes de ces agressions ont été harcelées par les policiers jusqu’à l’intérieur des centres médicaux où ils ont été soignés. Ces personnes ont porté plainte devant le procureur de la République, mais aucune suite n’a été donnée à ce jour.

L’Observatoire rappelle que le CNLT n’est toujours pas reconnu par les autorités tunisiennes en dépit de ses nombreuses requêtes en ce sens, tout comme les organisations de défense des droits de l’Homme suivantes : l’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques (AISPP), l’Association de lutte contre la torture (ALTT), le Centre tunisien pour l’indépendance de la justice et des avocats (CIJA), le Rassemblement pour une alternative internationale de développement (RAID), la Ligue des écrivains tunisiens libres (LEL).

L’Observatoire est vivement préoccupé par ces faits qui illustrent une nouvelle fois les graves entraves posées à la liberté de rassemblement en Tunisie et les actes de violence et de harcèlement constants dont sont l’objet les défenseurs des droits de l’Homme tunisiens.

Actions demandées :

Merci d’écrire aux autorités tunisiennes et de leur demander de :

i. Procéder à l’enregistrement du Conseil national pour les libertés en Tunisie, ainsi qu’à celui des autres organisations indépendantes de défense des droits de l’Homme dont la reconnaissance légale a été jusqu’à présent refusée ;
ii. Mettre un terme à tout acte de harcèlement à l’encontre des membres du CNLT et de tous les défenseurs des droits de l’Homme tunisiens ;
iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, notamment à son article premier qui dispose que " chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international ", à son article 5.a selon lequel " afin de promouvoir et protéger les droits de l’Homme et les libertés fondamentales, chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de se réunir et de se rassembler pacifiquement. ", et à son article 9.3.c selon lequel " chacun a le droit individuellement ou en association avec d’autres d’offrir et de prêter une assistance juridique professionnelle qualifiée ou tout autre conseil et appui pertinents pour la défense des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. " .
iv. Se conformer plus généralement aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et des instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme liant la Tunisie.

Adresses :

 M. Zine el-Abidine Ben Ali, Président de la République, Palais de Carthage, 2016 Carthage, Fax : +216 71 744 721 ou +216 71 731 009
 M. Mohamed Ghannouchi, Premier Ministre, Secrétariat Général du Gouvernement, Rue de la Kasbah, 1008 Tunis, Fax : +216 71 562 378
 M. Hédi M’henni, Ministère de l’Intérieur et du Développement local, Avenue Habib Bourguiba, 1001 Tunis, Fax : +216 71 354 331 ; e-
mail : mint@ministeres.tn
 M Dali Jazi, Ministère de la Défense Nationale, Avenue Bab Mnara, La Kasbah, 1008 Tunis, Fax : +216 71 561 804
 M. Bechir Tekkari, Ministère de la Justice et des Droits de l’homme, 57, Boulevard Bab Benat, 1006 Tunis, Fax : +216 71 568 106 ; email : mju@ministeres.tn - S.E M. Habib Mansour, Mission permanente de la Tunisie, 58 Rue Moillebeau, Case postale 272, 1211 Genève 19 ; Fax : +4122 734 06 63 ; email : mission.tunisia@ties.itu.int

Paris-Genève le 21 janvier 2005

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.
L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
E-mail : observatoire@iprolink.ch
Tel et fax FIDH : 33 (0) 1 43 55 20 11 / (0)1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

Lire la suite