Lettre ouverte à Monsieur Zine El Abidine Ben Ali

07/05/2004
Communiqué

Président de la République Tunisienne

Monsieur le Président de la République,

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) souhaite attirer votre attention sur la situation financière de la Ligue Tunisienne des droits de l’Homme (LTDH), organisation membre de la FIDH. La FIDH exprime ses plus vives inquiétudes quant à la menace qui pèse aujourd’hui sur la Ligue d’abandonner son siège central et celui de ses sections régionales.

La LTDH ne bénéficie d’aucun financement public et l’Union Européenne, dans le cadre de l’Initiative Européenne pour la Démocratie et les Droits de l’Homme, a décidé de financer la restructuration de la Ligue et la modernisation de ses moyens d’action. La première tranche de ces fonds avait été transférée au mois d’avril 2002.
Depuis le mois d’août 2003, le gouvernement tunisien bloque la deuxième tranche du transfert de fonds dont la Ligue devrait être bénéficiaire. Sous le prétexte fallacieux que la LTDH n’a pas produit l’autorisation nécessaire pour bénéficier de ces fonds.

Aujourd’hui, le Comité directeur de la LTDH se retrouve dans l’impossibilité de régler le loyer du siège dont le montant doit être versé d’avance, et au plus tard le 31 mai 2004. A défaut, la Ligue serait dans l’obligation de quitter le local. Cette fermeture mettrait un terme à ses capacités d’accueil des citoyens, de traitement des plaintes pour violation des droits de l’Homme, de rencontres entre membres de la société civile tunisienne et d’organisations de conférences et de séminaires.
Par voie de conséquence, la Ligue se retrouve également dans l’obligation de fermer les locaux de dix de ses sections régionales : Sfax, Jendouba, Sousse, Mahdia, Gafsa, Gabès, Kairouan, Monastir, Kebili et Bizerte.

Cette action s’inscrit dans le cadre des pressions constantes et systématiques exercées sur les défenseurs des droits de l’Homme en Tunisie. La FIDH s’inquiète d’une telle stratégie visant une fois encore à faire taire la voix de ces militants et à porter durement atteinte à la liberté d’association, d’expression et de réunion, dûment garanties par de nombreux instruments internationaux de protection des droits de l’Homme, dont la Déclaration universelle des droits de l’Homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques auquel la Tunisie est partie. De plus, cette décision contrevient à l’article 2 de l’accord d’association signé entre la Tunisie et l’Union Européenne.

La FIDH vous demande de prendre des mesures immédiates afin que les ONG de défense des droits de l’Homme en Tunisie soient autorisées à recevoir les fonds affectés à la LTDH par l’Union Européenne, et ce dans les meilleurs délais.

Je vous prie d’agéer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma haute considération.

Sidiki Kaba
Président

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