Khemaies Jhinaoui, Ministre des affaires étrangères tunisien a signé la déclaration permettant à des individus et ONG à saisir directement la CADHP, après épuisement des voies de recours interne. Cette signature est intervenue à l’occasion de la visite en Tunisie du Juge Sylvain Oré, Président de la CADHP. La Tunisie est, depuis bientôt 10 ans, un des 30 États parties au Protocole instituant la Cour. Par sa signature, elle devient le 8ème pays à déposer la déclaration sous l’article 34(6) du Protocole, autorisant ainsi la saisine citoyenne.
Cette avancée représente l’aboutissement d’une mobilisation de longue date de la FIDH. Nos organisations encouragent par ailleurs la Tunisie à ratifier les traités qu’elle a signé, en particulier le protocole de Maputo portant sur les droits des femmes (additionnel à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples). Signé par le Président de la République en janvier 2015, sa ratification ne semble toujours pas être à l’ordre du jour.
« En signant la déclaration au titre de l’article 34(6) du Protocole instituant la Cour africaine, la Tunisie ouvre une voie supplémentaire pour les victimes de violations des droits humains d’accéder à la justice et à la réparation. Elle envoie par la même occasion un signal fort d’engagement en faveur de l’effectivité et de l’efficacité de cette Cour, souhaitée et créée par les États africains, et qui nécessite aujourd’hui d’être pleinement soutenue »
Contexte
Créée sous l’égide de l’Union Africaine (UA), la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples est la principale instance judiciaire en matière de droits humains sur le continent. Etablie à Arusha en Tanzanie, elle est entrée en fonction en novembre 2006. Sa fonction est de veiller au respect, par ses États membres, de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples. Elle agit en complémentarité avec la Commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples (CADHP).
Tous les Etats parties au Protocole portant création de la Cour reconnaissent la compétence de la Cour pour les affaires portées à leur encontre. Ces affaires concernent des violations présumées des droits reconnus dans la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, et de tout autre instrument relatif aux droits humains ratifié par l’État en question. La Cour peut être saisie par la CADHP, par un Etat partie ou par une organisation inter-gouvernementale africaine. L’article 34(6) du Protocole prévoit la possibilité pour les Etats de déposer une déclaration permettant aussi aux individus et aux ONGs ayant le statut d’observateur devant la CADHP de porter plainte directement devant la Cour, après épuisement des voies de recours internes.
Les décisions de la Cour sont définitives et contraignantes. La Cour a rendu son premier jugement en 2009 dans une affaire impliquant l’État du Sénégal, mais qui s’est soldée par une déclaration d’incompétence. En mars 2017, la Cour avait reçu 124 requêtes et avait rendu 32 décisions. Elle a encore à son agenda 92 affaires à examiner et 4 demandes d’avis consultatif. La FIDH et plusieurs de ses organisations membres en Afrique sont parties à 3 procédures actuellement en cours d’examen par la Cour.
Pour plus d’informations sur la Cour :
"Guide pratique : La Cour africaine des Droits de l’Homme et des peuples vers la Cour africaine de justice et des droits de l’Homme"
"Plaintes et admissibilité devant la Cour africaine"