Paris, 6 juin 2024. Dans un arrêt rendu hier, la Cour d’appel de Paris a confirmé l’inapplicabilité des immunités fonctionnelles en matière de crimes internationaux. La Cour a ainsi refusé d’accorder le bénéfice de l’immunité invoqué par Adib Mayaleh, initialement mis en examen pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre.
« Nous saluons cette décision inédite. En reprenant les arguments avancés par nos organisations, la Cour d’appel de Paris a acté l’évolution de la jurisprudence et de la coutume internationales », déclare Clémence Bectarte, avocate de la FIDH et de SCM, parties civiles à la procédure. « Il s’agit d’un signal fort : l’immunité fonctionnelle ne peut plus être invoquée pour faire obstacle à la lutte contre l’impunité des crimes internationaux considérés comme les plus graves. »
La Cour d’appel de Paris a retenu que « ces crimes internationaux ne sauraient être couverts par le principe d’immunité et permettre une impunité à ses auteurs. » Elle consacre ainsi la position du pôle crimes contre l’humanité du Tribunal judiciaire de Paris, dont les juges d’instruction ont déjà émis dix mandats d’arrêt à l’encontre de hauts dignitaires syriens, estimant que les immunités fonctionnelles ne pouvaient entraver la poursuite des crimes internationaux.
La Cour d’assises de Paris a adopté la même position dans son arrêt rendu le 24 mai 2024, en condamnant à la réclusion criminelle à perpétuité Ali Mamlouk, Jamil Hassan et Abdel Salam Mahmoud pour complicité de crimes contre l’humanité et de délit de guerre.
« Cette décision est le fruit d’un long combat judiciaire mené par nos organisations et les victimes syriennes pour que les présumé⋅es responsables de crimes internationaux ne puissent échapper à la justice sous couvert d’immunité », explique Mazen Darwish, Directeur général du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression, partie civile à la procédure. « Cela est essentiel pour permettre aux victimes, notamment syriennes, d’espérer obtenir justice devant les seules juridictions disponibles à ce jour : celles de pays tiers. »
Adib Mayaleh, franco-syrien et ancien gouverneur de la Banque centrale syrienne, avait été mis en examen le 20 décembre 2022 pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, blanchiment du produit des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre et participation à un groupement formé ou à une entente établie en vue de commettre des crimes contre l’humanité.
Une enquête préliminaire avait été ouverte à son encontre le 8 décembre 2016 et il avait été interpellé sur le territoire français le 16 décembre 2022. Il a été placé sous le statut de témoin assisté en mai 2024.
Adib Mayaleh dispose désormais d’un délai de cinq jours pour se pourvoir en cassation.