Maroc : le militant ouïghour Yidiresi Aishan risque l’extradition vers la Chine après un an de détention

21/07/2022
Déclaration
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Kuzzat Altay

Maroc, le 21 juillet 2022. La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et une coalition d’ONG de défense des droits humains appelle les autorités marocaines à annuler la procédure d’extradition visant Ydiresi Aishan et à mettre fin à sa détention qui dure depuis un an.

Un an après son arrestation à l’aéroport de Casablanca, le militant Yidiresi Aishan, également connu sous le nom d’Idris Hasan, membre de la communauté ouïghoure, demeure sous la menace d’une extradition vers la Chine, où des motifs sérieux laissent croire qu’il risque d’être soumis à la torture.

Après être arrivé au Maroc à bord d’un vol en provenance de Turquie où il vivait avec sa famille depuis 2012, M. Aishan a été arrêté dans la nuit du 19 au 20 juillet 2021 sur la base d’une notice rouge diffusée par Interpol à la demande de la Chine et fondée sur des accusations d’appartenance à une organisation terroriste. Ces dernières années, la Chine a de plus en plus eu recours au système des notices rouges d’Interpol pour étouffer toute dissidence.

Le 20 juillet 2021, M. Aishan a été présenté devant le procureur de la Cour de première instance de Casablanca, qui a ordonné son placement en détention préventive à la prison de Tiflet, dans l’attente du jugement de la Cour de cassation. Depuis lors, il demeure détenu dans cette même prison.

Malgré l’annulation de la notice rouge par Interpol, au motif qu’elle constituait une violation de ses statuts et le dépôt d’une demande de statut de réfugié auprès du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), la Cour de Cassation de Rabat a émis un avis favorable à la demande d’extradition le 15 décembre dernier.

Depuis cette décision, l’émission d’un décret d’extradition par le Premier Ministre du Maroc est la seule étape qui sépare M. Aishan de l’extradition.

La ratification d’un tel décret entrerait en contradiction avec les engagements internationaux du Maroc, notamment la Convention contre la torture qui prévoit en son article 3 qu’« aucun État partie n’expulsera, ne refoulera, ni n’extradera une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture. »

Il a été rapporté que lorsqu’il vivait en Turquie, M. Aishan fournissait une aide à la traduction à d’autres Ouïghour·es en exil et contribuait à recueillir des témoignages sur les violations des droits humains au Xinjiang. En tant que membre de la communauté ouïghoure et compte tenu de son militantisme, M. Aishan serait exposé à des risques réels de torture et d’autres mauvais traitements, ainsi qu’à une détention arbitraire prolongée, s’il était renvoyé de force en Chine.

Les personnes ouïghoures sont de plus en plus reconnues victimes de persécutions et de violations des droits humains à grande échelle dans leur région du Xinjiang, tandis que les membres de la diaspora qui ne sont pas fermement installé·es dans des pays tiers sont confronté·es à un risque exceptionnel de détention et de refoulement.

De multiples instances internationales ont ainsi appelé le Royaume du Maroc à ne pas extrader M. Aishan vers la Chine en conformité avec le principe fondamental et intangible du non-refoulement.

Le 11 août 2021, plusieurs titulaires de mandats au titre des procédures spéciales ont adressé un appel urgent au Maroc, rappelant notamment l’interdiction absolue et intangible du renvoi de personnes vers un lieu où elles seraient exposées à la torture ou autres mauvais traitements.

Les expert·es ont renouvelé leur appel dans un communiqué du 16 décembre 2021 soulignant le risque de « graves violations des droits humains, notamment la détention arbitraire, la disparition forcée, ou la torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants  » que M. Aishan encourrait s’il devait retourner en Chine.

À la demande de MENA Rights Group et de Safeguard Defenders, le Comité contre la torture de l’ONU a envoyé aux autorités marocaines une demande de mesure provisoire le 20 décembre 2021. Afin de prévenir un préjudice irréparable à l’encontre de M. Aishan, ces dernières ont été sommées de « ne pas extrader le requérant [Aishan] vers la Chine pendant que sa requête est en cours d’examen par le Comité ». Le cas de M. Aishan est toujours en cours d’examen devant le Comité, lequel ne s’est pas encore prononcé de manière définitive.

En vertu de ce qui précède, nous, les organisations signataires, demandent aux autorités marocaines d’annuler la procédure d’extradition visant M. Ydiresi Aishan et de trouver une solution alternative à la détention de M. Aishan qui dure depuis une année et qui, en l’absence d’un examen périodique, d’une appréciation individuelle et de motifs valables, peut constituer une détention arbitraire.

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  • Co-signataires

    Alberta Uyghur Association
    Acat Belgium
    Amnesty International
    Australian Uyghur Association
    Australian Uyghur Tangritagh Women’s Association
    Belgium Uyghur Association
    Campaign for Uyghurs
    Cairo Institute for Human Rights Studies (CIHRS)
    Center for Uyghur Studies
    China Research Institute
    Dutch Uyghur Human Rights Foundation
    East Turkistan Association of Canada
    East Turkistan Foundation
    European East Turkistan Union
    Front Line Defenders
    Human Rights Watch
    Ilham Tohti Initiative
    International Federation for Human Rights (FIDH), within the framework of the Observatory for the Protection of Human Rights Defenders
    Isa Yüsüp Alptekin Foundation
    Japan Uyghur Association
    MENA Rights group
    Norwegian Uyghur Committee
    Public Association of Uyghurs “Ittipak” of the Kyrgyz Republic
    Safeguard Defenders
    Society for Threatened Peoples
    Sweden Uyghur Union
    Swiss Uyghur Association
    Teklemakan Uyghur Publishing House
    UK Uyghur Association
    Umer Uygur Trust Pakistan
    Uyghur Academy
    Uyghur Academy Foundation
    Uyghur American Association
    Uyghur Association of Victoria, Australia
    Uyghur Center for Human Rights and Democracy
    Uyghur Community in Austria
    Uyghur Cultural and Education Union
    Uyghur Human Rights Project
    Uyghur Republican Party
    Uyghur Research Institue
    Uyghur Rights Advocacy Project
    Uyghur Science and Education Foundation
    World Organisation Against Torture (OMCT), within the framework of the Observatory for the Protection of Human Rights Defenders
    World Uyghur Congress
    World Uyghur Congress Foundation

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