Une décision historique et bienvenue de la CPI reconnaît sa compétence territoriale sur la Palestine, y compris Gaza et la Cisjordanie

(La Haye, Paris) Le 5 février 2021, la Chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale (CPI) a décidé majoritairement que la compétence de la Cour sur la Palestine s’étend à Gaza et à la Cisjordanie, dont Jérusalem-Est, et que par conséquent, la Procureure est autorisée à enquêter sur les crimes internationaux commis dans ces territoires. La FIDH se félicite de cette décision historique, qui va dans le sens de ses observations déposées en mars 2020, et appelle la Procureure à procéder à une enquête exhaustive et à des poursuites pour les crimes internationaux commis en Palestine.

Voir notre Q&R (en anglais) pour plus de détails sur la situation de la Palestine devant la CPI

Dans sa décision du 5 février 2021, la Chambre préliminaire I de la CPI a d’abord confirmé que la Palestine est un État partie au Statut de Rome et « a le droit d’exercer ses prérogatives en vertu du Statut » [1]. Elle a aussi noté que le processus d’adhésion de la Palestine au Statut de la CPI « a suivi la procédure ordinaire correcte » et n’a pas été contestée. Les juges de la Chambre préliminaire ont ensuite estimé que « la compétence territoriale de la Cour en Palestine s’étend aux territoires occupés par Israël depuis 1967, à savoir Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est » [2]. Ils ont ajouté que cette conclusion était conforme au droit à l’autodétermination [3]. La Chambre préliminaire a précisé que sa décision avait pour seul but de "définir la compétence territoriale de la Cour", et qu’elle "ne statue pas sur un différend frontalier en vertu du droit international ni ne préjuge de la question d’éventuelles frontières à venir" [4] .

« Avec la confirmation par la Chambre préliminaire de la compétence territoriale de la CPI en Palestine, y compris son territoire occupé, et en l’absence de justice au niveau national, il est impératif que la Procureure agisse immédiatement pour effectivement enquêter et poursuivre les responsables de l’ensemble des crimes internationaux commis en Palestine. Une telle enquête de la CPI constituerait une étape historique et contribuerait à renouveler les espoirs des victimes en matière de justice et d’établissement des responsabilités. »

Shawan Jabarin, secrétaire général de la FIDH et directeur général d'Al-Haq

Après près de cinq ans d’examen préliminaire, la Procureure Fatou Bensouda confirmait en décembre 2019 qu’il y avait “une base raisonnable de croire que des crimes de guerre ont été ou sont en train d’être commis en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et dans la bande de Gaza" [5]. Cependant, bien qu’elle concluait qu’une enquête était justifiée, elle demandait en janvier 2020 une décision des juges de la CPI pour confirmer, avant toute ouverture d’enquête, que la cour avait bien la compétence territoriale nécessaire pour cette affaire, incluant la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et Gaza. En mars 2020, la FIDH, avec Redress, No Peace Without Justice et Women’s Initiative for Gender Justice, a soumis des observations en tant qu’amicus curiae démontrant que la CPI a compétence sur la Palestine sur la base du statut d’État partie de la Palestine, et que la Cour est compétente pour enquêter sur les allégations de crimes internationaux sur l’ensemble du territoire de la Palestine, comprenant Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est [6]. Les organisations palestiniennes des droits humains, le Centre palestinien pour les droits humains (PCHR), Al-Haq Law in the Service of Man (Al-Haq), le Centre Al Mezan pour les droits humains (Al Mezan) et l’Association Al-Dameer pour les droits humains (Al-Dameer) ont également présenté des observations conjointes en tant qu‘amicus curiae à la Chambre préliminaire de la Cour pénale internationale (CPI). [7]

Les organisations membres de la FIDH en Palestine, Al-Haq, Al-Mezan Center for Human Rights (Al-Mezan), le Centre palestinien pour les droits humains (PCHR), ont également salué cette décision fondamentale à ce stade de la procédure devant la Cour. [8]

Voir également la réaction de Raji Surani, Directeur général du Centre palestinien pour les droits humains (PCHR), et Katherine Gallagher, Senior Staff Attorney au Center for Constitutional Rights (CCR) et représentante de victimes dans la situation de la Palestine devant la CPI, sur "Democracy Now" :

Contexte

La Procureure de la CPI a ouvert un examen préliminaire sur la situation en Palestine en janvier 2015, après que l’Assemblée générale des Nations unies ait reconnu la Palestine comme État observateur non membre de l’Organisation des Nations unies (ONU) en novembre 2012, et après que la Palestine ait accepté la compétence de la Cour et déposé ses instruments de ratification du Statut de la Cour en janvier 2015. Le Statut de la CPI est entré en vigueur pour la Palestine qui est devenue un État partie le 1er avril 2015. La Palestine a depuis référé sa situation à la Cour en 2018 et demandé à la CPI de procéder à une enquête sans plus attendre.

Au cours des cinq dernières années, le Bureau de la Procureure de la CPI a reçu de très nombreuses informations, notamment de plusieurs de nos organisations, sur les crimes commis et sur des questions de fait et de droit, dont celle de la compétence territoriale de la Cour dans cette situation.

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